La mi-août est le moment idéal pour planter des fraisiers. Un seul problème : Ding Liangsheng ignorait comment faire. Autour de lui, dans sa ville natale de Changsha, dans la province du Hunan (centre), personne n'avait planté de fraisiers auparavant. Il refusait toutefois d'abandonner l'idée : il avait entendu dire que les fraisiers lui rapporteraient un bon bénéfice. Il a donc acheté des plants et s'est mis à chercher une solution sur Internet, en vain.

C'est suite à la recommandation d'un ami qu'il a découvert l'application mobile Tiantian Xuenong (qui se traduit par « étudier l'agriculture tous les jours »). Il y a trouvé une courte vidéo de trois minutes tournée par une experte de la culture de fraises. Exactement ce dont il avait besoin.

« Cette vidéo m'a été très utile. J'ai donc décidé de continuer d'étudier systématiquement les techniques de culture de fraises », a-t-il affirmé à CHINAFRIQUE. Il a ensuite trouvé un cours complet d'une durée de 4 heures, disponible au coût de 99 yuans (13,86 dollars). Il constate que plus de 45 000 personnes ont déjà suivi ce cours en ligne. Les commentaires sont positifs et M. Ding n'a pas hésité à s'inscrire.

Tiantian Xuenong est une plateforme numérique innovante pour acquérir des connaissances sur l'agriculture. À l'heure actuelle, la plateforme rassemble environ 500 experts agricoles autour de 5 000 cours de qualité, attirant plus d'un million d'utilisateurs. En août, cette plateforme d'enseignement professionnel a annoncé l'achèvement d'un nouveau cycle de financement, son quatrième depuis sa fondation en 2017.

Selon son fondateur Zhao Guang, Tiantian Xuenong vise à fournir des services standardisés aux agriculteurs. « Par exemple, pour la culture des agrumes, des kiwis et des raisins, il existe des problèmes communs. Nous espérons colliger ces problèmes via la plateforme et apporter des solutions aux agriculteurs », a expliqué M. Zhao.

D'autres applications, telles que Kuaishou, Nan Niwan, Bee TVs, ont également investi dans ce domaine. Peu à peu, apprendre aux agriculteurs comment mieux cultiver est devenu la nouvelle tendance.

Enthousiasme chez les agriculteurs 

Aux yeux de Xu Ming, qui enseigne comment cultiver le maïs sur la plateforme Kuaishou, les vidéos offrent des opportunités précieuses aux jeunes agriculteurs. Contrairement à leur stéréotype de « mauvais élèves », les jeunes ruraux sont très emballés par les études. Un Rapport sur les jeunes des bourgs 2019 publié par Kuaishou montre que la popularité des vidéos d'apprentissage chez ces derniers est huit fois plus élevée que parmi leurs pairs urbains.

Environ 140 des 200 millions d'utilisateurs quotidiens de Kuaishou sont originaires de petites villes, parmi lesquels les jeunes de moins de 30 ans représentent 70 %. Selon l'analyse de Li Zhuo, directeur des opérations de Kuaishou, la vie des jeunes dans les petites villes est plus limitée, alors que les ressources éducatives dans la région sont relativement rares et que les besoins en apprentissage sont difficiles à satisfaire. Les cours de formation agricole et professionnelle comblent les lacunes.

Le prix des cours n'est pas élevé : souvent inférieur à 100 yuans (14 dollars), il est parfois moins de 10 yuans (1,4 dollar). Selon les données officielles, il y a environ 10 000 enseignants sur la plateforme Kuaishou et le nombre de personnes qui payent pour les cours a atteint environ six millions. « Notre plateforme comprend près de 2 000 grands experts agricoles, et même si les cours durent souvent plus de 75 minutes, les utilisateurs sont nombreux », a déclaré à National Business Daily Tu Zhijun, un responsable de l'éducation chez Kuaishou. En fait, au cours de ces dernières années, la Chine a mis en place une série de mesures, autant politiques que financières, afin de promouvoir le développement de haute qualité de l'agriculture. Alors même que l'urbanisation a assimilé la main-d'œuvre rurale excédentaire, les villages ont également accéléré le transfert des droits d'utilisation des terres, jetant ainsi une bonne base pour une exploitation efficiente de l'agriculture.

« Le transfert des droits d'utilisation des terres a entraîné un changement important : les agriculteurs sont plus disposés à considérer la plantation comme une entreprise à long terme à but lucratif. Par exemple, ils considèrent maintenant si les produits agricoles cultivés sont biologiques, car ces derniers sont plus en demande sur le marché. Ce changement a également apporté de nombreuses opportunités aux startups dans les domaines de connaissances payantes », a avancé Zhang Yunxiang, partenaire et fondateur de l'entreprise Topsailing Capital, une société chinoise d'investissement.

Opportunité pour les startups 

Dans les villes de premier et deuxième rang, les connaissances payantes sont déjà très populaires et la concurrence est féroce. Or, les agriculteurs ne disposaient pas d'un accès à long terme à des connaissances de grande qualité. Ces derniers ne rechignent pas à payer pour ces connaissances, car les nouvelles techniques peuvent directement augmenter leur revenu. En termes d'accès à de nouvelles techniques, les agriculteurs dépendent souvent de deux sources. D'abord, il y a les vendeurs de pesticides et d'engrais chimiques de leur village. Mais comme leurs connaissances sont souvent dépassées et simples, ils sont peu aptes à trouver des solutions innovantes. Aussi, il y a souvent un ou deux techniciens agricoles dans leur bourg, la plupart diplômés d'un collège d'agriculture. Comme ces derniers n'ont pas vraiment travaillé dans les champs, ils ne disposent pas beaucoup d'expérience pratique.

Par conséquent, selon Zhao Guang, suite à la modernisation de l'industrie agricole chinoise, la demande pour des connaissances professionnelles parmi les agriculteurs est sérieusement inadéquate par rapport à l'offre. Aujourd'hui, 260 millions d'agriculteurs travaillent dans les champs. Personne n'est en mesure de leur fournir les connaissances ou les compétences qu'ils demandent. C'est exactement ce que Tiantian Xuenong veut faire, en saisissant l'opportunité offerte par ce marché.

Ce domaine innovant a également attiré l'intérêt des capitaux. « Ces dernières années, la Chine a vigoureusement encouragé la formation professionnelle des agriculteurs de nouveau type. Les agriculteurs ont de fortes exigences en matière de contenu agricole de haute qualité, alors que le modèle visant à fournir des connaissances agricoles payantes est rapidement adopté sur Internet », a déclaré à 36Kr Peng Guoti, partenaire de Changce Investment.

Né dans les années 1980, Zhao Guang a lancé Tiantian Xuenong il y a seulement deux ans. Il est optimiste quant à l'avenir. « Les données sur le secteur montrent que le marché des services de technologie agricole se chiffrera bientôt à 100 milliards de yuans (14 milliards de dollars). De plus, les connaissances en matière de technologie agricole présentent également un grand potentiel », a-t-il expliqué.

Récemment, Kuaishou a annoncé le lancement d'un canal destiné à soutenir les experts agricoles et à les encourager à résoudre en ligne les problèmes rencontrés par des agriculteurs.

« La revitalisation des talents est la clé de la revitalisation des villages. Nous espérons qu'un nombre croissant d'agriculteurs pourront utiliser les vidéos courtes pour combler le fossé de l'information et que plus de créateurs pourront se joindre à notre plateforme. Les vidéos courtes et les émissions en direct sont autant d'outils inclusifs pour la réduction de la pauvreté, la promotion du cybercommerce et le développement économique des zones rurales », a déclaré M. Tu.

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