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La musique comme exutoire

François Essomba  ·  2021-08-22  ·   Source: Chinafrique
Mots-clés: bikutsi; musique; Cameroun

Genre musical de tradition ancienne, le bikutsi trouve son origine dans la culture des Beti, peuple de la forêt équatoriale du Cameroun. 

Danseuses de bikutsi en tenue traditionnelle. (COURTOISIE) 

Le bikutsi est une danse ethnique pratiquée par les Beti, qui vivent principalement dans la région du Centre, au Cameroun. En ewondo, langue locale parlée à Yaoundé, capitale camerounaise, le rythme se prononce « Biakut si », signifiant « nous frappons le sol ». Il se danse généralement en ondulant les membres supérieurs et inférieurs du corps sur un tempo amplifié par des instruments synchronisés, ce qui donne un rythme frénétique et très entraînant. 

Au fil du temps, le bikutsi a connu à la fois une évolution et une révolution, tant dans les textes que dans les résonances des mélodies, devenant un rythme mondialement reconnu. On doit cette évolution musicale à certains monuments du genre, tels que Messi Martin, Ange Ebogo, Anne Marie Ndzié, Elanga Maurice, etc., qui ont su donner au bikutsi une prééminence importante dans l’univers musical camerounais des années 1960 et 1970.

Toutefois, c’est dans les années 1990 que le bikutsi a connu son véritable essor international, avec le groupe mythique Les Têtes Brûlées, dont le premier passage à la télévision nationale en 1987 fut un véritable succès. Pépite en matière de création musicale, il comptait dans ses rangs Epémé Zoa Théodore, alias Zanzibar, guitariste et maître à jouer du groupe, qui a été malheureusement très vite arraché à la vie. Malgré son décès, Les Tête Brûlées ont continué à ravir le cœur des fans par leur talent mais également leurs costumes excentriques, leurs crânes à moitié rasés et la peinture blanche sur leurs corps. Le bikutsi a alors bénéficié d’une visibilité élargie et d’une réputation internationale : le groupe a été convié à se produire lors de tournées en Afrique, en Europe, aux États-Unis et même au Japon.

Pendant la tournée française en 1988, la réalisatrice Claire Denis, qui avait remarqué le groupe à Yaoundé, a décidé de le suivre sur sa tournée dont elle a tiré le film-documentaire Man No Run (1989). Le groupe a également accompagné l’équipe nationale de football du Cameroun lors de sa brillante participation à la Coupe du monde 1990 en Italie.

Aujourd’hui, cette musique, bien que noyée dans un métissage culturel, garde encore toute sa sonorité originale, qui se reconnaît facilement dès les premières notes d’introduction.

Origines et rôle des femmes

D’après les patriarches du peuple beti, le bikutsi tire son origine des femmes. On raconte que le peuple beti, comme les autres peuples bantou, est une société patriarcale, où seuls les hommes avaient droit à la parole. Les femmes beti, quant à elles, n’avaient pas le droit de s’exprimer en public ou devant les hommes ni même de formuler un quelconque avis. Une situation qu’elles considéraient comme inconcevable et injuste. Pour contourner cet interdit, elles se retrouvaient entre elles, organisant des rassemblements festifs où elles interprétaient des chants destinés à dénoncer les infidélités de leurs maris, guérir les maux, calmer la douleur de la perte d’un être cher, soulager les peines, les frustrations et la souffrance. Chacune tapait des mains en chantant, sous les acclamations des autres femmes qui reprenaient en chœur les refrains, en tapant des pieds en cadence.

Plus tard, les hommes ont récupéré ces rythmes et leur ont insufflé différents éléments de l’acoustique traditionnelle, constituée essentiellement de danses initiatiques et de certains instruments musicaux.

Par la suite, le bikutsi s’est très largement féminisé, avec des figures emblématiques telles que Catherine Edoa Ngoa alias K-Tino surnommée « la Femme du peuple », qui a ouvert la voie, il y a une quinzaine d’années, à une pléiade de jeunes artistes dont Lady Ponce, Majoie Ayi, Mani Bella, Letis Diva ou encore Sally Nyolo, qui ont toutes en commun de belles mélodies envoûtantes dans leur répertoire.

Le groupe mythique Les Têtes Brûlées, reconnaissable par son maquillage excentrique. Le regretté Zanzibar est présent au deuxième rang (au centre). (COURTOISIE)

Une perception nuancée

Aujourd’hui, le bikutsi connaît encore un énorme succès qui ne semble pas près de faiblir, et ce grâce à la capacité de ce rythme à s’adapter à l’évolution technologique. Cette cadence affiche une constance qui permet de l’identifier facilement, grâce notamment à sa guitare solo, au son du balafon, aux chœurs et à sa guitare basse.

Et au-delà des percussions rythmiques qui captivent les adeptes de musique camerounaise, s’ajoutent aussi les thématiques proposées dans les textes qui gravitent autour de faits de société comme l’amour, la femme, la corruption et le mariage.

De ce fait, les avis sur cette musique sont quasi unanimes au sein de l’opinion camerounaise. Selon Anong Alémao, journaliste et coordonnateur de plusieurs organes de presse à Yaoundé, « le bikutsi s’était taillé une bonne réputation mais il connaît parfois de fausses notes, avec l’accent actuellement mis sur la perversion des mœurs ».

Un message salace qui, en effet, ne passe pas bien au sein de l’écrasante majorité de l’opinion publique. Cependant, ce genre musical tient encore la route grâce à des paroliers talentueux, comme Aijo Mamadou. Pour pérenniser son rayonnement international, cette musique a besoin d’être repensée, tout comme le makossa, qui est en perte de vitesse.

De son côté, John Ibé, opérateur économique d’origine nigériane établi au Cameroun depuis plus de 30 ans, précise que « le bikutsi se distingue par sa cadence merveilleuse et dynamique, que beaucoup de mélomanes apprécient. C’est une musique qui s’exporte bien à l’international. Mais pour y parvenir durablement, quelques ajustements sont nécessaires pour la conformer aux tendances musicales contemporaines. Le bikutsi fera ainsi son grand retour sur le devant de la scène et s’épanouira à nouveau ».

Pour Germaine Ngo Holl, journaliste et secrétaire de rédaction de l’hebdomadaire Le Démocrate Infos, « le bikutsi est une musique rythmique et dansante, qui fait les beaux jours des fêtards et qui valorise hautement la culture camerounaise dans sa diversité. Cependant, la jeune génération, en voulant innover, se livre parfois à la perversion. C’est certainement dû à un effet de mode caractérisant la société actuelle, préférant les messages qui sortent du cadre initial qui déterminait autrefois la conscientisation des mœurs dans la société camerounaise. Les musiciens de la nouvelle génération ne devraient pas sortir du sillage tracé par leurs aînés, qui leur ont légué un très riche héritage ».

 

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