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Un enfant ingénieur autodidacte

François Essomba  ·  2020-11-25  ·   Source: Chinafrique
Mots-clés: Blaise Awa Chi; technologie robotique; Cameroun

Victime du conflit armé, un jeune Camerounais valorise ses aptitudes innées pour la technologie robotique afin de réaliser son rêve d’enfance.

Blaise Awa Chi présente son avion nouvellement achevé. (COURTOISIE)

Doté d’un talent inné, Blaise Awa Chi, est déjà, à 16 ans seulement, un ingénieur accompli. C’est à Douala, capitale économique du Cameroun, que ce jeune prodige de la technologie robotique s’est révélé. Passionné, Blaise fabrique des bulldozers, des pelleteuses à chenilles, des niveleuses, des chargeurs Tourneau, ainsi que de petits avions, calqués sur des modèles occidentaux qu’il adapte suivant sa propre vision. Il en résulte des prototypes en carton, en contreplaqué et autres matériaux, qu’il fait marcher à l’aide d’une batterie et d’une télécommande.

La belle aventure de Blaise remonte à son plus jeune âge, lorsqu’il a commencé à fabriquer ses propres jouets, ses parents n’ayant pas les moyens de lui en offrir à Noël. Frustré par le niveau social de sa famille, Blaise a exprimé sa révolte en fabriquant ses propres jouets, mettant en application ses connaissances en mécanique automobile, acquises auprès de son frère aîné Derick, qui a fait des études en mécanique à l’université. « Pour connaître la marche à suivre, j’ai observé les appareils électroniques et les objets à piles. Et je me suis adressé à ceux qui travaillent dans ce secteur d’activité pour leur demander comment connecter une batterie à une voiture, mais je ne pensais pas que cela prendrait une telle ampleur », raconte-t-il.

Conception et origine des matériaux

Blaise Awa Chi présente une pelleteuse à chenille. (COURTOISIE)

Fier de ses ouvrages, Blaise termine toujours une nouvelle création par mentionner le nom de son propre label « Chi Style ». Il réalise ses produits finis en matériaux de récupération, qui constituent l’essentiel de son arsenal de travail, surtout le carton, et en associant d’autres matériaux tels que contreplaqué, DVD, peinture, fils, cartes mères usagées, batteries, débris de bois, de plastique et de métal, qu’il trouve en écumant les décharges publiques locales. « Je récupère une partie des matériaux dans les poubelles. Il s’agit de vieux postes récepteurs radios, de platines (lecteurs DVD), parce que je n’ai pas d’argent pour en acheter des neufs, alors j’ai décidé de travailler pour un bac à ordures afin de trier facilement et obtenir toute la ferraille électronique. Ensuite, je prends des cartons et des panneaux en contreplaqué pour les combiner à ma manière et obtenir ce que je veux fabriquer, par exemple une pelleteuse à chenilles », ajoute-t-il. Notons qu’il faut à Blaise entre une semaine et deux mois pour terminer la fabrication d’un engin. Cela dépend de la disponibilité des matériaux qu’il utilise.

Une scolarité perturbée

Doublement victime du conflit armé opposant les forces régulières aux combattants séparatistes, Blaise a été contraint d’interrompre sa scolarité alors qu’il était en classe de troisième. « J’étais à Bamenda lorsque le conflit a éclaté. J’allais à l’école et j’ai décidé d’abandonner à cause de l’insécurité dans la ville occasionnée par les combats constants. J’ai donc été obligé de quitter Bamenda pour m’installer à Douala et y poursuivre ma scolarité tout en continuant mon projet de recherche. »

Pour se mettre à l’abri des détonations des armes, le jeune Blaise, orphelin de père, s’est installé chez sa tante à Douala. Dès son arrivée dans cette ville de 5 millions d’habitants, un enfant de la rue lui a arraché son téléphone portable des mains. De plus, Blaise, anglophone, s’exprimait difficilement en français. Un obstacle qui ne l’a pas découragé pour autant, bien au contraire. Ses démonstrations dans les grandes artères de Douala sont toujours couronnées de succès : plusieurs centaines de curieux s’attroupent pour admirer ses petits engins au format jouets. Blaise force l’admiration des habitants de Douala, qui n’hésitent pas à déposer des pièces dans sa besace pour l’encourager. Jean Biboum, résidant local, affirme : « Le travail de cet enfant est vraiment celui d’un génie. J’apprécie vraiment ce qu’il réalise parce que quand nous étions enfants, nous voyions ces objets comme des miracles. Nous pensions que c’était des compétences et des secrets qui appartenaient uniquement aux Occidentaux, mais cela prouve qu’au Cameroun, nous avons aussi la capacité de nous industrialiser. »

En quittant sa ville natale de Bamenda, rien n’était plus précieux aux yeux de Blaise que ses petites créations électroniques, dont chacune avait été construite avec les matériaux de la décharge locale : réservoir en contreplaqué avec canon pivotant à 360, camion-benne pouvant soulever et déposer les cargaisons, bulldozer en bois poussant terre et gravats en minuscules piles bien rangées... Il les a emballées soigneusement dans des cartons et a prié pour qu’elles arrivent intactes à Douala.

Partagé entre son succès et ses regrets causés par la guerre

À ce jour, Blaise continue de progresser dans son ingéniosité puisqu’il est passé à la construction d’avions (capables de parcourir une petite distance), d’engins à chenilles, de drones, etc. Les fonctionnalités de ces miniatures n’en restent pas moins surprenantes en raison de la qualité de la reproduction à l’identique du modèle en taille réelle.

Néanmoins, en quittant la maison familiale de Bamenda, Blaise a dû renoncer à beaucoup de choses : il n’a pas pu emporter sa planche à dessin ou sa table de travail sur laquelle il avait passé de longues heures à étudier l’ingénierie en autodidacte. Il a dû également se séparer de ses manuels scolaires et pire, des personnes les plus chères : sa mère (veuve) ; sa tante, son oncle et ses cousins, qui ont tous participé à son éducation ; ainsi qu’un groupe d’amis d’enfance.

« J’ai quitté l’école car lorsqu’on y allait, on se faisait attaquer et nous avions très peur. De plus, les fréquentes patrouilles militaires au carrefour près de notre école nous ont également effrayés car ils tiraient souvent en l’air, au hasard », confie-t-il.

Pour rappel, c’est fin 2016 qu’ont été déclenchés les combats opposant l’armée régulière à la rébellion séparatiste du Cameroun anglophone. Suite à des revendications corporatistes constituées de l’ordre des avocats et des enseignants des deux régions anglophones, contestant la nomination d’un grand nombre de francophones dans leurs tribunaux et leurs écoles, synonymes de marginalisation pour ces corps d’activité. De ce fait, ces derniers avaient alors organisé une marche pacifique dans les rues de Bamenda, violement dispersée par les forces de maintien de l’ordre, ouvrant ainsi la boîte de Pandore, qui a conduit à d’autres revendications, élément déclencheur de la guerre civile qui dure depuis 4 ans exactement, causant de lourdes pertes humaines, des dizaines de milliers de déplacés ainsi que la non-scolarisation de près de 850 000 enfants.

C’est dans cette ambiance de violence, que le jeune Blaise a quitté sa charmante région du Nord-Ouest, pour s’installer en zone francophone où sa vie a pris un tournant décisif et où il se révèle comme l’un des plus grands atouts de technologie de sa génération avec qui il faudra désormais compter.

(Reportage du Cameroun)

Pour vos commentaires : lixiaoyu@chinafrica.cn

 

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