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Une priorité absolue |
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Piet Mahasha Rampedi · 2021-09-18 · Source: Chinafrique | |
Mots-clés: biodiversité; Afrique |
Le compte à rebours est lancé pour la préservation de la biodiversité sur le continent africain.
Manchot africain dans la réserve naturelle de Stony Point, en Afrique du Sud. (XINHUA)
La biodiversité est d’une importance capitale pour les moyens de subsistance des populations en Afrique. Contrairement aux pays développés, le continent africain n’est pas aussi industrialisé que l’Europe occidentale, les États-Unis et certaines régions d’Asie, où la production alimentaire ne dépend pas entièrement de la nature.
La 15e réunion de la Conférence des parties à la CDB, qui se tient en octobre à Kunming devrait offrir à la communauté mondiale une occasion d’unir ses forces pour construire un avenir meilleur en harmonie avec la nature.
Moyens de subsistance
La plupart des pays africains sont signataires de conventions internationales sur la préservation de la biodiversité et ont pris des engagements envers la CDB. Pourtant, certains d’entre eux ont fait peu de progrès en matière de protection de la nature. Les exceptions concernent quelques pays relativement riches (Afrique du Sud, Kenya, Égypte et Maroc) grâce à leurs ressources, leur volonté politique et la mise en œuvre de lois strictes en matière de protection de la biodiversité.
Comme la plupart des régions du monde, le continent connaît des pertes massives de biodiversité dues, notamment, à la déforestation, à la dégradation des sols, à la pollution, au changement climatique, etc. Croissance démographique et pauvreté ont conduit certaines communautés à empiéter sur les zones protégées et à braconner des animaux rares, comme le rhinocéros. Les plantes et les animaux rares sont donc menacés d’extinction car la plupart des pays d’Afrique subsaharienne disposent de ressources limitées pour investir dans des programmes de préservation de la biodiversité.
Selon William A. Shivoga, écologiste aquatique au département des sciences biologiques de l’Université Masinde Muliro des sciences et technologies (Kenya), si les gouvernements africains ne parviennent pas à préserver la biodiversité, la population courra à la catastrophe.
« La non-protection de la biodiversité et de la nature posera de graves problèmes. Une grande partie du tourisme en Afrique est associée à la nature. De nombreux visiteurs viennent en Afrique observer les paysages et les animaux sauvages. L’interférence avec la biodiversité ou sa dégradation engendrera forcément la pauvreté », indique-t-il. « Les Africains sont en effet très liés à la nature et directement dépendants de l’état de la biodiversité, ayant un impact plus d’important sur eux que sur les citadins anglais ou les japonais. La dégradation et l’érosion des sols ont un impact direct sur la biodiversité. »
Progrès et défis
Le Kenya a fait des progrès en matière de biodiversité grâce aux efforts de l’agence publique Kenya Wildlife Service. Celle-ci a investi des ressources humaines et financières pour préserver, entre autres, la forêt tropicale de Kakamega, le parc national du Mont Kenya et la réserve nationale du Masai Mara. Le gouvernement kényan organise également des excursions en bus permettant aux communautés locales de visiter les parcs nationaux et de prendre conscience de l’importance de la biodiversité. Les efforts du Kenya en tant que pays pour s’engager conformément à la CDB sont considérables. Toutefois, selon M. Shivoga, le défi concerne, comme dans de nombreux pays en développement, les besoins en ressources et en finances pour protéger ces zones de conservation. « La population du Kenya a augmenté rapidement et le taux de pauvreté est très élevé dans certaines régions. Beaucoup dépendent directement des ressources naturelles. Par conséquent, le braconnage et les empiètements subsistent du fait de la pression démographique, même lorsque le gouvernement a délimité des zones protégées. »
Dans la plupart des régions où le gouvernement kényan applique des mesures de protection et de conservation de la faune et de la flore, M. Shivoga précise qu’il y a « une pression humaine car en cas d’augmentation rapide de la population et manque de terres cultivables, les efforts vont toujours dans le sens de la conversion de forêts naturelles et de prairies naturelles en zones agricoles. Dans de nombreux cas, le gouvernement a même exigé la mise en place de clôtures électriques dans certaines zones protégées. »
Il en va de même pour l’Afrique du Sud. Si l’économie la plus développée du continent a fait des progrès significatifs en matière de préservation de la biodiversité, elle reste confrontée à des défis similaires à ceux du Kenya, selon le professeur Joshua Olowoyo, expert environnemental de l’Université Sefako Makgatho de Pretoria. « Le pays dispose d’un système efficace pour protéger de biodiversité. Des programmes ont été mis en place pour prévenir le déclin de la biodiversité (perte et de la dégradation des habitats). Le South African National Biodiversity Institute (SANBI) et différentes organisations tentent de faire respecter ces réglementations », explique-t-il.
D’autres lois sont en place en Afrique du Sud, notamment un livre blanc sur la convention et l’utilisation durable de la diversité biologique du pays de 1997, la loi sur la gestion de l’environnement de 1997, ainsi que la loi sur la gestion de l’environnement national établissant les principes de la législation environnementale et définissant et soutenant un objectif qui aidera à poursuivre la protection de certains animaux.
En Afrique du Sud, des progrès ont été réalisés grâce aux agences gouvernementales, telles que les parcs nationaux sud-africains, ainsi que les programmes Grasslands, partenariat entre le gouvernement, les ONG et le secteur privé, pour intégrer la biodiversité, avec l’intention d’équilibrer la conservation de la biodiversité et les impératifs de développement dans un paysage de production.
Malgré tout, l’Afrique du Sud doit encore relever des défis tels que l’utilisation des terres et le développement minier. Le pays a besoin de programmes de sensibilisation à l’importance de la biodiversité pour obtenir l’adhésion de la population. Les avantages économiques (production alimentaire), la valeur commerciale et la valeur médicale (plantes médicinales) doivent être expliqués au grand public pour le faire adhérer à cette cause.
Les gouvernements africains doivent mettre en œuvre les lois de réduction de la pollution en vigueur et introduire des technologies modernes pour réduire l’impact de la pollution. Il est important de minimiser la corruption et le gaspillage des ressources publiques, et de respecter l’adage selon lequel les ressources collectives doivent être utilisées à bon escient. Les dirigeants africains doivent également autoriser davantage d’acteurs privés à faire de la préservation de la biodiversité une responsabilité partagée entre les secteurs public et privé.
Plus important encore, la création d’emplois permettrait de lutter contre la pauvreté et ainsi d’éviter l’empiétement sur les zones protégées et le braconnage d’animaux rares. « Pourquoi protéger un parc national constitué d’une faune magnifique quand les autochtones vivent dans l’extrême pauvreté ? Voilà le défi principal à relever par le gouvernement », lance M. hivoga.
Pour vos commentaires : liuwei@chinafrica.cn
* L’auteur est rédacteur en chef de Pretoria News, Afrique du Sud.