Lancement du premier MOOC sur l'entreprenariat responsable en Chine |
Le premier MOOC (Massive Open Online Course) sur l'entreprenariat responsable sous l'égide de l'Université du commerce international et d'économie de Beijing et de Stephan Rothlin a été officiellement lancé le 22 avril. Jacques Fourrier
Près de 80 invités des milieux professionnels et académiques étaient présents sur le campus de l'Université du commerce international et d'économie de Beijing (UIBE) pour porter le MOOC sur l'entreprenariat responsable sur les fonts baptismaux aux côtés du Shi Jianjun, professeur et président de l'UIBE, de Mme Irene Giner-Reichl, ambassadrice d'Autriche en Chine et en Mongolie, de Mme Salome Meyer, ministre auprès de l'ambassade de Suisse en Chine et de Stephan Rothlin, président du cabinet Rothlin International Management Consulting. Les MOOC, un outil éducatif d'avenir en Chine Dans son allocution d'ouverture de cette cérémonie, le professeur Shi Jianjun a rappelé que les MOOC sont une plateforme de transmission du savoir aux potentialités énormes, mais restent encore limités en Chine. Le pays est en effet entré tardivement sur ce marché qui a vraiment explosé en 2012, mais compte rattraper son retard. Les MOOC sont une extension de l'éducation à distance (EAD) : les universités, mais aussi des plateformes commerciales (comme Coursera) ou à but non lucratif (comme edX), proposent des cours en ligne ouverts à tous et des forums d'interaction entre étudiants, mais aussi entre les étudiants et le corps professoral.
Le professeur Shi Jianjun, président de l'UIBE Rappelons que l'EAD traditionnel relève souvent d'une institution ou d'un organisme agréé, admet un nombre limité d'étudiants sélectionnés qui suivent un cursus complet et payant sanctionné par un diplôme. La plupart des grandes universités disposent maintenant de plateformes d'apprentissage en ligne de type Moodle ou Blackboard, une extension interactive de l'EAD. Le MOOC va cependant plus loin dans le domaine de l'ouverture : outre l'accessibilité à tous et la gratuité (la délivrance de certificats est parfois payante), il permet de sortir du format éducatif traditionnel en proposant souvent des cours de remise à niveau et de perfectionnement qui s'inscrivent dans la formation continue. Ainsi, par exemple, un étudiant en sciences humaines de Chine pourra suivre un MOOC sur les statistiques proposé par l'université de Berkeley via la plateforme edX. Ou un responsable financier français pourra suivre des cours d'introduction à la programmation C++ proposés par l'université de Beijing via la plateforme Coursera. Ce lien entre éducation à distance et formation continue a été souligné par Yan Jichang, professeur à l'université Tsinghua de Chine et secrétaire général de l'Association d'éducation à distance moderne. Les MOCC doivent selon lui répondre aux besoins de certains secteurs économiques, mais aussi s'adapter aux besoins spécifiques de certaines activités. Il évoque dans ce dernier cas les « MOOC professionnels », qui permettent à tous de suivre une formation rapide et qualifiante adaptée à un projet particulier. Sans oublier les femmes : pour Vivien Xiong, de l'Association des femmes chefs d'entreprise de Chine, elles jouent un rôle considérable à la fois dans la création d'entreprise et dans la promotion des principes éthiques, qui sont « naturellement et plus facilement intégrés par les femmes ». Fruit de trois années de réflexion et d'efforts de Stephan Rothlin en collaboration avec le professeur Men Ming, doyen de l'Institut de l'enseignement à distance de Chine, ce MOOC sur l'entreprenariat responsable proposé par l'UIBE s'inscrit dans ce cadre : il permettra aux apprenants de se familiariser avec les arcanes du Business plan et ses multiples déclinaisons en termes de responsabilité sociale et d'innovation. Il incitera aussi à réfléchir à la définition des valeurs de l'entreprise, qu'elles aient trait à la protection de l'environnement, à la dignité ou à l'intégrité. Responsabilité sociale et entreprenariat : une révolution en marche en Chine Au cours du séminaire qui a suivi la cérémonie de lancement, les intervenants ont fait référence à la « Décision sur d'importantes questions relatives à l'approfondissement d'ensemble de la réforme en Chine » adoptée le 12 novembre 2013 par la 3ème session plénière du Comité central issu du XVIIIème Congrès du Parti communiste chinois. La réforme entre dans les « eaux profondes » en Chine et l'accent est désormais mis notamment sur la « nouvelle normalité », les mécanismes de marché, l'autonomie décisionnelle et l'instauration d'un Etat de droit. On comprendra que l'éthique soit au cœur de la réussite de cette réforme. Ye Chengang, professeur du Département des études commerciales de l'UIBE, rappelait d'ailleurs une phrase de Jack Ma, le fondateur du site d'achats en ligne Alibaba : « L'honnêteté est la plus grande richesse ». Lier responsabilité sociale et entreprenariat, c'est selon les termes d'Irene Giner-Reichl, « faire le lien entre justice sociale, protection de l'environnement et développement économique ». Une idée que reprend Salome Meyer en donnant l'exemple de la Suisse : ce pays a su créer un environnement innovant grâce à son « système d'éducation sur mesure qui se focalise sur la formation professionnelle ». Tous les ingrédients sont réunis pour donner à ce zeitgeist son plein élan. Ce paradigme, comme d'aucuns l'ont nommé durant le séminaire, est celui du développement durable. Une nouvelle génération d'entrepreneurs doit émerger en Chine, qui respecte les principes d'éthique des affaires. Stephan Rothlin les a clairement énoncés : la diligence raisonnable, la sagesse dans la gouvernance, une prise de position ferme contre la corruption et les pots-de-vin, l'éthique environnementale, la déontologie, le rushang (éthique confucianiste) et le principe de subsidiarité notamment. Ce dernier principe est celui de la responsabilisation et de la confiance sur laquelle doit reposer toute aventure humaine, l'entreprenariat en étant une parmi d'autres. Ces principes doivent aussi être solidement ancrés sur le socle constitué par la trinité valeurs-dignité-intégrité.
Salome Meyer William Valentino, un zhonguotong (connaisseur de la Chine), qui enseigne la responsabilité sociale des entreprises depuis plusieurs décennies en Chine, reprend les mêmes idées : l'entrepreneur doit partir des valeurs, obtenir l'engagement de tous, élaborer une vision et faciliter l'autonomie : inséparable des valeurs et de l'action, l'intégrité est cruciale, c'est même, pour reprendre une expression de Stephan Rothlin, un « argument de vente ». Le dernier intervenant à ce séminaire, Christoph Graf von Waldersee, spécialiste des projets financiers relatifs à la protection environnementale auprès d'Ecosequestrust, a fait part de son expérience en Chine et mis l'accent sur les coûts induits par la responsabilité sociale, et plus particulièrement vis-à-vis de l'environnement. C'est en effet l' « éléphant dans la salle » : si les entreprises veulent bien adhérer aux principes éthiques, elles gardent toujours un œil sur le compte de résultat. C'est là que les initiatives gouvernementales interviennent, elles sont d'ailleurs prévues dans le plan de réforme du gouvernement chinois. On voit de temps à autres fleurir les slogans en Chine, notamment une phrase (congwozuoqi) qui incite les habitants à prêcher par l'exemple : le MOOC sur l'entreprenariat responsable permettra de propager les principes éthiques que la course effrénée au PIB et à la rentabilité immédiate a occultés et de nombreux entrepreneurs pourront ainsi donner l'exemple et contribuer à leur manière au développement durable en Chine.
Pour référence, quelques liens sur nos précédents articles sur la responsabilité sociale des entreprises en Chine. Stephan Rothlin : l'éthique au service de la « nouvelle normalité » en Chine (I) http://french.beijingreview.com.cn/alaune/txt/2015-03/09/content_675534.htm Stephan Rothlin : La tradition chinoise au service de la responsabilité sociale des entreprises (II) http://french.beijingreview.com.cn/alaune/txt/2015-03/19/content_678874.htm
Beijing Information
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