Xiamen, ville portuaire historique dans la province du Fujian, dans le sud-est de la Chine, où le climat est subtropical et où la pluie tombe toute l'année, est connue pour Kulangsu, l'île magique située à seulement dix minutes de ferry de la ville. les mariées sont partout : s'agenouillant théâtralement au milieu de la route, se camouflant dans leurs robes pour se protéger du soleil, posant devant de vieux murs couverts de mousse ou gambadant sur la plage. De jeunes et belles mariées, vêtues de robes blanches à froufrous, un bouquet de fleurs filandreuses en soie à la main. Un escadron d'hommes portant parapluies, trépieds, appareils photos et même kits de maquillage les escortent. Est-ce la réalité ou est-ce un tournage de film sophistiqué ? Un peu des deux, puisque Kulangsu paraît désormais comme destination préférée en Chine pour les photos prénuptiales, un rituel obligatoire pour les couples chinois qui se sont engagés pour la vie.
Liang Zhao et Li Sainan en font partie. M. Liang a 26 ans et gère une petite entreprise, et Mlle Li, 26 ans également, est infirmière. Ils sont venus à Kulangsu depuis la province du Shanxi dans le nord du pays, afin de faire réaliser leur album de mariage par une agence de photographie professionnelle, avant d'échanger leurs vœux le 9 septembre. « Vivant dans le nord, ma femme et moi ne voyons que très peu la mer », confie M. Liang, expliquant le choix de Kulangsu. « C'est un très bel endroit, rempli d'une histoire et d'une culture incroyables ».
Avec une population d'environ 20 000 habitants, l'île attire presque 65 000 visiteurs par jour, selon Shen Huan, délégué du Département des relations publiques du centre touristique de Kulangsu. En pleine saison, s'étendant des vacances d'octobre jusqu'en novembre, on peut atteindre les 120 000 touristes par jour. « L'année dernière, nous avons accueilli 13 millions de visiteurs », confie M. Shen. « L'argent généré par les ventes de billets uniquement (pour les endroits pittoresques et les musées) représentent presque 150 millions de yuans (soit 22,5 millions de dollars). Kulangsu est la destination la plus prisée après la Cité interdite à Beijing ».
Ancrée dans l'histoire
Qu'est-ce qui fait d'une petite île de moins de deux kilomètres carrés un paradis pour les touristes ? Pas seulement ses jardins luxuriants, ses plages dignes de cartes postales, ses côtes de granite et ses rochers culminants offrant une vue à couper le souffle sur les environs. C'est aussi l'ambiance, résultat d'un fort ancrage dans cette histoire unique et d'un mélange de cultures.
Xiamen a été l'une des premières villes chinoises à s'ouvrir au commerce extérieur après que la Première guerre de l'opium (1840-1842), entre la Chine et l'Angleterre, se soit terminée sur la signature d'un traité inégal imposé à la Chine. Kulangsu, tout comme Xiamen, a donc observé un flot d'étrangers venir travailler ou faire du commerce, et qui, tombés amoureux de l'île, y ont élu domicile. C'est aussi, selon les dires, la première île en Chine sur laquelle des missionnaires chrétiens ont débarqué. Ils y ont construit trois églises, qui font désormais partie de l'héritage culturel, un cimetière chrétien et le quartier résidentiel de la Société missionnaire de Londres pour les femmes de l'équipe.
Ce mélange de cultures a valu à Kulangsu le surnom de « méditerranée chinoise ». L'impact de ce patchwork culturel se ressent principalement sur l'architecture, métissage du style local et du style européen, mais aussi sur l'importance donnée à la protection environnementale. Malgré la cohue quotidienne, la petite île est épargnée de la pollution et des bouchons, les voitures et véhicules plus grands y étant prohibés. Les voiturettes électriques ou les vélos sont les moyens de transport les plus appréciés. Un bon nombre d'habitants de Kulangsu sont partis à l'étranger, n'ayant parfois pas le choix ou cherchant à faire fortune. Ces Chinois d'outre-mer maintiennent de forts liens avec leur île natale et contribuent à son développement en construisant des établissements scolaires, des hôpitaux, des musées et autres institutions progressives, découvertes dans leur pays d'accueil.
Les histoires de ces Chinois d'outre-mer et de leur amour pour leur terre-mère, minutieusement collectées par le Musée des Chinois d'outre-mer de Xiamen, fait de Kulangsu une île encore plus spéciale. Hu Youyi fait partie de ces Chinois expatriés. Un Chinois au regard international, M. Hu a suivi un parcours peu commun : il a appris à jouer de l'orgue et du piano au Conservatoire royal de Bruxelles. Plus tard, il est parti vivre en Australie et a fait fortune dans les domaines de l'immobilier et des transactions boursières. Bien que M. Hu soit décédé en 2013 à l'âge de 77 ans, son nom vit toujours à Kulangsu, devenu un héritage culturel indélébile de l'île.
