Depuis que la Cour permanente d'arbitrage (CPA) a rendu son verdict sur la mer de Chine méridionale, le problème a gagné en complexité. La Chine n'a pas participé à ce verdict et l'a rejeté, ce que je comprends parfaitement. Dans la Déclaration conjointe de la République populaire de Chine et de la République des Philippines sur les consultations concernant la Mer de Chine méridionale et la coopération dans d'autres domaines du 10 août 1995, les deux pays sont convenus qu'« un processus graduel et progressif de coopération doit être engagé en vue de négocier, au final, un règlement des différends bilatéraux ». Par la suite, les deux parties ont réaffirmé à plusieurs reprises leur engagement à cette déclaration. Dans les relations internationales, un « engagement » à « négocier un règlement final » dans le cadre d'un accord diplomatique est légalement contraignant. Cependant, la Chine exclut depuis 2006, en vertu de l'article 298 de la CNUDM, les différends liés entre autres à la délimitation maritime et à la souveraineté territoriale de l'application des procédures obligatoires de règlement, comme c'est d'ailleurs le cas des trois autres membres permanents du conseil de sécurité de l'ONU ayant ratifié la convention (les Etats-Unis ne l'ayant pas signée). Or, l'essence de la demande d'arbitrage des Philippines est la question de la souveraineté territoriale des îles et récifs en mer de Chine méridionale.
Cet arbitrage n'est d'aucune aide dans la résolution des contentieux en mer de Chine. Comme l'a fait remarquer le professeur agrégé à l'Université de Wuhan Huang Wei, il ne fait que « semer les graines de nouveaux conflits ». Dans le Pacifique Sud et l'Océan Indien, il y a quantité de petits Etats insulaires de faible superficie qui, si l'on s'en tenait à la logique du tribunal d'arbitrage provisoire, seraient considérés comme des « récifs rocheux » et à ce titre, ne pourraient prétendre ni à une zone économique exclusive de 200 milles marins ni à un plateau continental, ce qui serait à coup sûr fatal à ces pays.
En fin de compte, un jugement n'étant véritablement ancré dans les faits historiques et le droit international ne peut pas être viable et avoir une portée universelle.
Dans cet exposé, je souhaite analyser, du point de vue de l'histoire et du droit international, la perspective du Japon sur les conflits en mer de Chine méridionale, le but étant de nous aider à comprendre la nature des problèmes actuels.
Professeur depuis de nombreuses années dans une université japonaise, j'ai toujours suivi de près la façon dont le Japon se positionnait dans les différends en mer de Chine. Jusqu'à présent, les matériaux utilisés dans les recherches sur le sujet proviennent pour la plupart de Taïwan ou de l'étranger, qui sont donc des sources indirectes ; je me base pour ma part sur des données directement extraites de documents historiques japonais, dont certaines sont inédites.