Matières grises, exposition de Clément Bagot à Yishu 8 |
Yang Jiaqing Après avoir séjourné trois mois à Beijing, Clément Bagot, artiste français lauréat du Prix Yishu 8 2012, expose ses œuvres réalisées lors de sa résidence dans la capitale chinoise. Intitulée Matières grises, l'exposition a commencé le 16 décembre 2012 et se clôturera le 16 janvier 2013.
Né en 1972, Clément Bagot a débuté comme styliste au département Accessoires chez Jean-Paul Gaultier après avoir obtenu un diplôme de stylisme de mode au Studio Berçot à Paris. Dès 1996, il se consacre au dessin, puis aux sculptures et aux installations. Il multiplie depuis les expositions. En 2012, il reçoit le Prix du Salon du dessin contemporain Drawing Now à Paris. Il est représenté par la galerie Eric Dupont (Paris). Depuis un an ou deux, Clément Bagot a développé des séries de petites tailles dans son dessin. Cela lui permet d'expérimenter en mélangeant différentes sortes d'écritures (trait, trame, hachure…). L'artiste essaye de les faire coexister les unes avec les autres ; c'est assez intéressant car cela crée des valeurs différentes, des rencontres, de nouvelles textures…
« Je crois que ce qui est récurrent dans mon travail, que ce soit en dessin, en sculpture mais aussi dans les installations, c'est la densité. Autrement dit, les phénomènes d'accumulation ; cela sous-entend les notions de plein / vide, le détail / la masse, la répétition, la structure », a indiqué Clément Bagot. Ceux qui sont entrés dans l'atelier que Clément occupe depuis presque trois mois à Yishu 8 ont souvent vu un homme de dos, penché sur une grande feuille accrochée au mur, appliqué à suivre les contours et les surprises d'un dessin en cours. La stupéfiante image sur laquelle l'artiste travaille depuis des semaines suscite émerveillement et respect. L'artiste cherche-t-il à construire, maîtriser, élaborer des architectures complexes, tel un artisan de la complexité qui nous rappellerait que le XXIème siècle est celui des réseaux enchevêtrés, des urbanisations folles, de la saturation d'informations et d'objets ?
L'artiste cherche-t-il à se perdre, à se laisser faire par des formes qui soudain s'imposent à lui pour l'entraîner ailleurs, sous la terre ou dans le ciel, à la recherche d'une énergie spirituelle ? Car une tension sourde entre la terre et le ciel se joue dans ces créations sophistiquées. La matière (charbon, craie, bois…) que Clément aime travailler sert à construire des images ou des espaces qui nous entraînent ailleurs, au pays de Jules Verne ou d'Heidegger mais aussi dans les hutongs pékinois ou les rizières du sud de la Chine qui ont confirmé ses recherches car, en fin de compte, « tout se trouve déjà dans la nature ». Ce que Clément Bagot trouve intéressant à Beijing, c'est la notion de double réseau : il y a ces grandes avenues embouteillées avec des enseignes, des commerces, des boutiques mais aussi tout ce qui se passe derrière, dans les hutongs. Le rythme pékinois c'est aussi le rythme lent des vélos et des habitants qui vivent au cœur de ce réseau parallèle dans les quartiers populaires. « J'aime passer d'un rythme à l'autre», a-t-il précisé. Dans ses bagages, l'artiste a emporté des règles, du papier, des Letraset et des stylos Rotring, mais aussi beaucoup d'idées et d'intuitions… La recherche de Clément, aussi préméditée soit-elle, n'a rien de « scolaire ». La main levée cherche, se trompe, et jamais ne cède à la facilité. Car au sein de ces villes imaginaires, de ces morceaux de charbon ou de craie, c'est un rythme qu'il s'agit de créer. Le rythme d'une matière noire ou grise et d'une intelligence qui, en proposant de nouveaux liens, reste toujours aux aguets.
Beijing Information |