Avec l'ouverture du secteur financier, et la concurrence qui y fait rage, les banques agissent vite pour dépasser leurs concurrents.
Lan Xinzhen
BOC Fullerton Community Bank recrute et forme à tour de bras, à la veille de l'ouverture de nouvelles banques communautaires dans quatre districts du Shandong. Ces ouvertures marquent le début de l'expansion de la banque, qui a créé à la mi-mars sa première banque communautaire dans le district Qichun du Hubei.
Fondée par Temasek Holdings - un des fonds souverains de Singapour - et la Banque de Chine, la BOC Fullerton Community Bank offre des services financiers aux petites et moyennes entreprises, micros entreprises, aux particuliers ainsi qu'aux paysans. Temasek Holdings a annoncé son intention d'installer, d'ici à cinq ans, 400 banques communautaires dans les régions rurales. La BOC Fullerton Community Bank pourrait donc s'étendre sur un cinquième des districts chinois.
En fait, Temasek Holdings n'est pas le premier à pénétrer les régions rurales. Selon la Commission de supervision bancaire de Chine (CSBC), à la fin de 2010, le territoire n'accueillait pas moins de 349 banques communautaires, dont une quarantaine appartient aux banques à capitaux étrangers. Avec 16 établissements, c'est la HSBC qui occupe la première place, suivie par la Citibank.
Facilité d'accès au marché
Faible couverture bancaire, défaut d'approvisionnement financier, manque de concurrence… Pour régler ces problèmes dans les régions rurales, la CSBC a proposé en 2006 de créer les banques communautaires, un nouveau modèle d'établissement financier rural, ayant pour objectif de s'installer dans les régions où les services financiers sont sous-développés.
Créer un établissement financier dans ces régions rurales est abordable : 3 millions de yuans pour les capitaux d'enregistrement dans un district, 1 million dans un canton ou un bourg, tandis que 100 000 yuans suffisent pour fonder une société de micro crédit dans un village administratif.
Les conditions d'accès au marché et le périmètre d'action des banques communautaires sont moins contraignants en comparaison avec les banques commerciales. Encouragées à lancer différents produits, elles sont autorisées à créer divers produits bancaires. Elles peuvent ne posséder qu'un conseil d'administration, qui supervise les gestionnaires de haut rang. De plus, la CSBC a simplifié les inspections sur la qualification des dirigeants de haut rang qui travaillent dans les établissements nouvellement créés dans les régions rurales.
La seule mesure un peu stricte concerne l'utilisation des fonds des banques communautaires. Selon le « Règlement temporaire sur le contrôle des banques communautaires » publié par le gouvernement central, les banques communautaires doivent, après avoir versé les réserves obligatoires pour les dépôts, mettre tous leurs capitaux disponibles dans le développement économique local. Il faut tout d'abord que leurs crédits satisfassent aux demandes des paysans, de l'agriculture et du développement économique rural. Les capitaux restants peuvent être destinés à d'autres secteurs, à l'achat d'obligations liées à l'agriculture, ou au financement d'autres activités.
Le 13 décembre 2007, la première banque communautaire à capitaux étrangers en Chine a été ouverte dans le bourg Sanligang à Suizhou, dans la province du Hubei, dont la principale fonction était d'offrir un service financier complet aux paysans et aux entreprises agricoles à Sanligang et dans les bourgs des environs.
« Les banques à capitaux étrangers ont pénétré le marché chinois très récemment, elles ont donc besoin d'augmenter le nombre de leurs installations, et sont impatientes de s'installer dans les régions rurales. Dans le même temps, les départements de supervision chinois leur donnent des soutiens politiques, en espérant qu'elles développent le marché financier rural. Voilà pourquoi les banques à capitaux étrangers se précipitent dans les régions rurales », a indiqué Guo Tianyong, professeur à la faculté de Finances relevant de l'Université des Finances et d'Economie de Chine.
« Que ce soit en termes d'investissements ou de taux des crédits malsains, les établissements de petite envergure, comme les banques communautaires, ne constitueront pas un fardeau pour les banques à capitaux étrangers. En ce qui concerne l'offre de services, les banques à capitaux étrangers pourront prendre pour référence leur expérience de services aux PME », a-t-il ajouté.
Selon certaines sources, la CSBC permettrait bientôt à des établissements financiers autres que les banques d'être l'actionnaire majoritaire ou l'unique actionnaire des banques communautaires. Si cette mesure était prise, tous les capitaux étrangers, y compris l'American International Group, première capitalisation mondiale, pourraient participer à la concurrence sur le marché financier rural de Chine.
Lacunes du marché
A l'heure actuelle, les coopératives de crédit rurales sont les principaux établissements financiers dans les régions rurales chinoises, qui assument des missions mi-commerciales et mi-politiques. Attachant une grande importance à l'agriculture, le gouvernement central impose aux coopératives de crédit rurales de nombreuses missions politiques, cependant, elles n'ont qu'un système de crédit, et pas de système de contrôle des risques ni de ressources humaines. La plupart d'entre elles affrontent donc des problèmes de mauvaise gestion et de crédits malsains. Contraintes par le montant de leurs capitaux, les 32 000 coopératives de crédit rurales actuelles ne satisfont pas aux demandes du financement rural.
D'après le « Projet de travail d'ensemble 2009-2011 sur les établissements financiers ruraux de nouveau modèle » élaboré en 2009 par la CSBC, 1 294 établissements financiers ruraux de nouveau modèle devraient être créés entre 2009 et 2011, dont 1 027 banques communautaires. Aujourd'hui, nous sommes encore loin des ces objectifs.
Les grandes banques commerciales à capitaux chinois sont très en retard dans la création de banques communautaires, ce qui laisse des opportunités aux banques à capitaux étrangers. Jusqu'à présent, la Banque de Construction a créé neuf banques communautaires, quatre pour la Banque agricole, trois pour la Banque des Transports, et deux pour la Banque industrielle et commerciale.
« Face à la faiblesse et aux lacunes du marché financier dans les régions rurales chinoises, les banques à capitaux étrangers agissent rapidement pour saisir les premières opportunités », a remarqué Guo Tianyong.
Les banques communautaires sont promises à un bel avenir. La Chine compte plus de 700 millions de paysans. Avec l'accélération de l'urbanisation, les paysans qui fondent des entreprises et le développement des PME nécessitent des services financiers, d'autant plus que le gouvernement chinois encourage fortement l'ouverture du marché financier rural de nouveau modèle.
Faire d'une pierre deux coups
« Pour les banques à capitaux étrangers, la création des banques communautaires constitue l'occasion d'obtenir l'immatriculation sur le marché chinois, et une base d'investissements à long terme », a indiqué Guo Tianyong.
D'une part, du fait que les micros crédits accordés aux paysans ne présentent pas de grands risques en terme de recouvrement, et que la vitesse d'augmentation des capitaux des banques communautaires est largement inférieure à celle des capitaux totaux sur le continent chinois, les banques communautaires exerceront, au début, peu d'influence sur les banques à capitaux étrangers. D'autre part, le bilan des banques communautaires ne constituera pas un fardeau pour les banques à capitaux étrangers. La HSBC China a révélé que, parmi ses 16 banques communautaires, trois étaient déjà à l'équilibre. Cela montre que face aux énormes besoins du marché, il ne faut pas se soucier du déficit de la création des banques communautaires.
L'accélération du développement des activités des banques à capitaux étrangers dans les régions rurales pourrait signifier beaucoup à l'avenir. « Dans dix ou vingt ans, les bourgs actuels pourraient bien devenir des villes. Ainsi les banques communautaires deviendront probablement les succursales des banques », a exprimé Wang Dongsheng, PDG de la HSBC Asie-Pacifique.
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