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Respecter le principe de bénéfices mutuels lors des différends territoriaux

Liu Jiangyong (professeur)

Institut de recherche sur les questions internationales

Université Qinghua

Les différends territoriaux sur les îles Diaoyu entre la Chine et le Japon ne datent pas d'hier. Néanmoins, le dernier contentieux a eu un fort impact sur les relations diplomatiques entre ces deux poids lourds asiatiques. Le 7 septembre 2010, un bateau de patrouille japonais a heurté un bateau chinois venu pêcher autour de l'archipel. Le gouvernement japonais a arrêté l'équipage du bateau chinois en se basant strictement sur ses propres lois, ce qui a déclenché une escalade de la tension. Cet événement a suscité l'inquiétude de tous les gens qui se sont consacrés à l'amitié sino-japonaise, et une grande attention de la communauté internationale.

Le 4 octobre, Wen Jiabao, premier ministre chinois, a rencontré son homologue Naoto Kan en marge du huitième Dialogue Asie-Europe. Les deux parties ont évoqué des sujets comme le maintien et la promotion des relations à bénéfices mutuels sino-japonais, le renforcement des communications gouvernementales et des échanges civils, l'entrevue des hauts dirigeants des deux pays à une occasion opportune. Cette rencontre qui a eu lieu un mois après la collision des bateaux marque un signal positif et montre que les deux parties veulent chercher une convergence de vues en prenant en considération l'intérêt général. Mais les deux gouvernements sont mis à l'épreuve : comment prévenir l'instabilité de la situation et continuer à promouvoir les relations bilatérales ?

Le livre chinois Yijing nous instruit un principe : si une personne dans son tort persiste en se justifiant, la malchance lui arrivera un jour. Pour transformer le danger en sécurité, il faut se repentir et se corriger. Quant à la collision des bateaux, le gouvernement japonais ne devrait-il pas revoir ce qu'il a fait ?

Pour défendre la souveraineté nationale et assurer la sécurité de ses concitoyens, le gouvernement chinois a légitimement exigé la libération de l'équipage et la restitution du bateau. Cependant, la Chine aurait dû expliquer patiemment les détails de certaines questions et savoir recourir à l'opinion publique sur les sujets sensibles. Cependant, la prise continuelle et systématique de mauvaises décisions par la partie japonaise a été la cause principale de l'escalade de la tension.

Tout d'abord, les deux pays ont respectivement affirmé leur souveraineté sur ces îlots. L'arrestation du capitaine chinois est une agression dangereuse contre la Chine, car aux yeux des Chinois, l'archipel de Diaoyu fait depuis l'Antiquité partie du territoire chinois. Le Japon, en persistant à punir les pêcheurs chinois en se basant sur ses propres lois, vise à manifester ses droits de possession et d'administration du territoire, ce qui est inacceptable pour les Chinois. Même selon l'Accord de pêche Chine-Japon, les deux pays n'ont que le droit de gérer leurs propres bateaux et non de procéder à des arrestations.

En outre, certains Japonais ne s'attendaient pas à de telles réactions de la Chine, ce qui reflète leur jugement insuffisant en la matière. Après une protestation sévère du gouvernement chinois, le 13 septembre, l'équipage a été relâché à l'exception du capitaine. Cette décision a dans une certaine mesure été influencée par les élections au Japon. Plusieurs jours après l'incident, les élections internes du Parti au pouvoir depuis un an, le Parti démocrate, ont compliqué la résolution de l'affaire. Mais grâce à l'importance des relations sino-japonaises, Naoto Kan et son rival Ichiro Ozawa ont gardé leur attention sur cette question.

Après la victoire de Naoto Kan, le gouvernement japonais aurait pu libérer immédiatement le capitaine chinois, avant la constitution du nouveau gouvernement. Néanmoins, lors d'une visite au Japon, Richard Lee Armitage, ex-assistant du secrétaire d'État des États-Unis, a incité le pays à adopter une position ferme. Finalement, après la constitution du nouveau gouvernement, le Japon a déclaré le 17 septembre une prolongation de dix jours de la détention du capitaine chinois. Pour riposter, la Chine a rapidement pris une série de mesures. Le 21 septembre, Wen Jiabao a refusé de rencontrer Naoto Kan à New York et a donné un discours aux termes forts devant les représentants des Chinois d'outre-mer.

Enfin, le 24 septembre, la libération du capitaine chinois a prévenu la dégradation continue des relations sino-japonaises. Cependant, le Japon a insisté sur une résolution basée strictement sur ses lois nationales et n'a pas renoncé à son droit de sanction. Ce cas a suscité le mécontentement de la Chine, et le ministère des Affaires étrangères a demandé le 25 septembre des excuses et un dédommagement pour l'arrestation du capitaine. Les actes du gouvernement japonais ne sont pas même considérés comme acceptables par ses concitoyens. Selon une enquête lancée par Mainichi Newspapers, la cote de popularité du gouvernement de Naoto Kan a chuté, de 64 % début septembre à 49 % début octobre. Cette baisse est principalement attribuée au mécontentement du peuple japonais sur cette crise diplomatique. 87 % des sondés indiquent que « la libération du capitaine chinois est un jugement de l'autorité régionale » est une excuse inacceptable. 80 % des sondés pensent qu'il s'agit clairement d'un jugement politique.

En réalité, la détention et la libération du chalutier et de l'équipage chinois ont été rendues possibles par le jugement politique d'un cabinet chargé de traiter des relations extérieures, tandis que le traitement en vertu du droit intérieur n'est qu'une mesure que le gouvernement a tenté de prétexter par la suite. Or, les faits ont prouvé que la mesure n'a pu faire jurisprudence. Au contraire, elle a été rejetée en raison de la détérioration des relations bilatérales. Le parquet du district de Naha, par souci diplomatique, a fini par libérer le capitaine chinois. Par le même jugement politique, admettant comme « correcte » la décision du parquet de Naha, le gouvernement de Naoto Kan a finalement approuvé la libération. Ces faits permettent de conclure que la libération du capitaine chinois est entièrement le résultat d'un jugement politique global des autorités japonaises.

Le cabinet de Naoto Kan n'a pas du tout besoin de se soucier d'être accusé d'ingérence dans le domaine judiciaire. Bien qu'au Japon, l'ingérence administrative soit comprise comme de l'ingérence politique, le système institutionnel, en accord avec le principe fondamental de la politique, distingue la législation, l'administration et la justice. La politique et l'administration sont deux notions différentes. Le Japon pratique la séparation des pouvoirs législatif, administratif et judiciaire ; le pouvoir exécutif ne peut intervenir dans le domaine judiciaire, mais cela n'empêche pas que les autorités judiciaires et administratives adoptent les mêmes jugements et décisions politiques. En ce qui concerne la libération du capitaine chinois, si l'on regarde l'affaire de manière objective, le gouvernement de Naoto Kan ne s'est pas mêlé des affaires judiciaires. Sa libération a été le résultat d'un jugement politique identique du parquet de Naha et du gouvernement central. Pour savoir s'il s'agit d'ingérence politique, voire d'un jugement politique, il suffit d'observer le résultat et l'effet du jugement, non de se focaliser sur la question de l'ingérence elle-même.

Feu le premier ministre japonais Ohiramasa Yoshi a dit qu'« il vaut mieux rester sincère que de recourir à la ruse ». Certains Japonais ont appelé à promouvoir la position nationale sur la question des îles Senkaku (îles Diaoyu en chinois) sur la scène internationale, mais le résultat va à l'encontre de leur objectif. Cela montre bien que l'argument disant qu'il n'existe pas de différend territorial entre la Chine et le Japon est un mensonge. Les faits ont et continueront à prouver que la persévérance de cette affirmation, en tentant de fabriquer une jurisprudence sur l'affaire des îles Diaoyu, n'a pas d'issue. L'idée de certains Japonais d'augmenter les forces militaires sur l'archipel et d'y opérer des manœuvres conjointes entre le Japon et les États-Unis ne pourra que transformer le désaccord territorial en opposition militaire, et réduira les relations sino-japonaises d'avantages mutuels stratégiques en une expression abstraite sur papier. Il n'y a qu'un seul choix raisonnable pour les deux pays : conjuguer nos efforts pour défendre les relations d'avantages stratégiques mutuels, et traiter avec mesure les questions sensibles comme les litiges territoriaux.

Beijing Information

 

 

 


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