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Un atelier de traitement des produits de la mer. |
Jin Duoyou
Quartier d'habitation de Qianxilong, arrondissement de Huangdao, à Qingdao, au bord du golfe de Tangdao. Seules dix petites minutes séparent ce quartier de la plage. Et dès 2008, ses habitants furent les premiers à expérimenter l'air conditionné à l'eau de mer.
Econome en énergie, ce système possède quasiment les mêmes capacités de réchauffement et de refroidissement que les climatiseurs traditionnels. Wang Yunlong, directeur adjoint du Bureau de protection de l'environnement de Huangdao, explique que l'air conditionné à l'eau de mer ne consomme pas de charbon, de gaz ou pétrole. Par rapport au système de réchauffement des chaudières, l'effet indirect de ce nouveau produit dans la protection de l'environnement est évident.
De plus, le coût de ce nouveau dispositif est moindre, comparé à celui des systèmes classiques. D'après Yang Song, ingénieur du projet, le coût pour le réchauffement en hiver et le refroidissement en été avoisine les 22 yuans le m², contre 30,4 yuans le m². Jusqu'au présent, l'air conditionné à l'eau de mer a été installé dans le théâtre et le musée du Centre olympique de Voile de Qingdao. Le projet est actuellement étendu aux zones d'habitations de cette ville littorale.
Une technologie d'avenir
Ces dernières années, l'utilisation de l'eau de mer se développe, après une longue phase de recherche scientifique. Cette nouvelle industrie qui entre peu à peu dans notre quotidien attire l'attention du public. Le « Rapport océan 2010 » publié le 12 mai 2010 par le Bureau océanique d'Etat indique que l'économie de la mer maintient un taux de croissance annuel moyen de 16,3 % depuis 2001, soit 1,4% supérieur à la croissance du PIB de la même période.
« Au cours de la première décennie du XXIe siècle, la croissance de l'économie de la mer est clairement plus rapide que celle du PIB, ce qui démontre le rôle d'entraînement de l'industrie maritime sur l'économie chinoise », a précisé Han Limin, directeur de l'Institut des études de développement maritime (IEDM) de l'Université océanique de Chine.
En 2009, malgré la crise financière mondiale, le produit brut lié aux mers a atteint les 3196,4 milliards de yuans, soit 9,53 % du PIB et 15,5 % du produit brut des régions littorales.
La mer est en effet une véritable mine d'or, encore trop peu exploitée. Selon Liu Shuguang, directeur adjoint de l'IEDM, l'économie maritime doit devenir un pôle majeur de l'économie chinoise. Mais certaines difficultés demeurent.
« Goulot d'étranglement » du développemnt des secteurs maritimes traditionnels
Par rapport aux pays maritimes puissants, la Chine ne dispose que d'un espace maritime réduit. Malgré la possession de mers comme Bohai, Huanghai (Mer Jaune), Nanhai (Mer de Chine Méridionale) et Donghai (Mer de Chine Orientale), la Chine n'est limitrophe que de l'Océan Pacifique. Alors que les Etats-Unis sont voisins de l'Océan Atlantique, l'Océan Pacifique et l'Océan Arctique, et que le Japon est bordé de quatre océans.
« Les ressources marines naturelles de Chine ne sont pas abondantes et l'efficacité de l'utilisation de ces ressources laisse à désirer », a déploré Liu Shuguang. En raison de la pollution marine et de la pêche intensive, les poissons sont de plus en plus rares. Pour maintenir la culture des alevins, le gouvernement chinois interdit la pêche pendant trois mois par an. Il y a actuellement plus de 13 millions de pêcheurs dans les régions littorales du pays, ce qui provoque un chômage technique. « C'est une perte de main d'œuvre », a ajouté Liu Shuguang.
Liu Hongbin, professeur à l'Université océanique de Chine, promoteur des expériences de la Corée du Sud, propose la construction d'une ferme marine. La ferme marine vise à établir un environnement favorable à la culture et à la multiplication des organismes marins. Les organismes marins naturels et ceux qu'on y élève artificiellement, par élevage scientifique, forment une ferme marine artificielle. « La Corée du Sud a remporté de grands succès dans ce domaine. En Chine, on a essayé ces dernières années de construire des récifs artificiels pour poissons et des petites fermes marines. Mais ils sont petits et sous-développés », a-t-il déploré.
A cette difficile situation de la pêche, le transport dans les ports, autre pilier de l'économie maritime chinoise, est saturé, conséquence de la boulimie économique des gouvernements régionaux. « De 1978 au 2008, les villes littorales ont développé l'exportation, suscitant une vague de construction de ports dans ces régions », a raconté M.Liu.
En Chine, on compte actuellement cinq grandes zones portuaires : autour du Bohai, les deltas du Yangtzé et de la rivière des perles, la côte ouest du détroit de Taiwan et le golfe de Beibu. Obnubilés par la croissance, les gouvernements régionaux construisent toujours plus de ports. Le Shandong par exemple, abrite de nombreux ports du nord au sud. Selon Liu Shuguang, « ce développement excessif des ports, peut-être temporaire, provoque une série de conflits régionaux ». D'après lui, le développement excessif des ports réflète les contradictions entre l'utilisation rationnelle de la mer préconisée par l'Etat, et la chasse aux intérêts économiques à court terme des gouvernements locaux.
Opportunités et défis des nouvelles industries maritimes
En 1978, Yu Guangyuan, économiste reconnu a proposé pour la première fois le concept d'économie maritime en Chine. Après un développement de plus de trois décennies, l'économie maritime chinoise, auparavant composée de quatre industries traditionnelles, compte actuellement treize industries. D'après le « Rapport statistique de l'économie maritime chinoise 2009 », la valeur ajoutée des quatre industries traditionnelles (communications et transport, élevage, tourisme et industrie salinière) représente une part de 77,2 % dans la valeur ajoutée maritime totale.
Malgré une proportion encore faible, les nouvelles industries maritimes ont un avenir prometteur. Selon les statistiques partielles, entre 2001 et 2008, les nouvelles industries maritimes ont maintenu un taux de croissance supérieur à 20 %. Les secteurs dont le dégré d'industrialisation est plus élevé, comme l'exploitation des eaux de mer, l'électricité maritime, et la pharmacie biologique, réalisent respectivement une croissance de 18,6, 25,2 et 12,6 % en 2009.
D'après Liu Hongbin, la désalinisation de l'eau de mer est une activité d'avenir. « Les techniques de ce secteur sont déjà matures. Le coût d'un mètre cube d'eau dessalée est de 4 à 6 yuans, contre 3 yuans pour l'eau courante. L'écart de prix n'est donc plus significatif. D'autant plus que la construction des infrastructures pour la dérivation des eaux élève le coût de l'eau courante. Dans ce contexte, la généralisation de l'eau dessalée dans les régions littorales est très probable.
Selon Liu Shuguang, ces nouvelles industries demeurent un vrai casse-tête. « La Chine n'a pas encore la propriété intellectuelle sur les hautes technologies. » Les énergies marines, dont l'énergie éelienne marine, l'énergie thermique des mers, l'énergie des courants marins, l'énergie marémotrice, sont prometteuses. Mais la Chine ne maîtrise pas les hautes technologies, et les principaux équipements dépendent encore totalement de l'importation.
La pollution marine est une des conséquences négatives du développement économique des régions littorales. L'enteromorpha, qui a surgi au large de Qingdao avant les JO de 2008, est le résultat de la détérioration de l'écosystème marin. Liu Hongbin explique : « Dans les pays développés, les industries employant beaucoup de main d'œuvre sont concentrées sur une petite zone, ne polluant ainsi qu'une zone délimitée. Mais en Chine, difficile de voir une côte sauvage, car elles sont toutes envahies par les entreprises. »
Trois zones d'économie maritime
Le Bureau océanique d'Etat a divisé le plan de l'économie maritime chinoise en trois zones : région autour de la mer de Bohai, delta du Yangtzé et delta de la rivière des Perles. Selon le « Rapport statistique de l'économie maritime chinoise 2009 », le produit brut lié aux mers de la région de Bohai est de 1201,5 milliards de yuans, soit 37,6 % du total national. Les deltas du Yangtzé et de la rivière des Perles réalisent respectivement 946,6 milliards (29,6 %) et 661,4 milliards (20,7 %). Ces pôles économiques maritimes représentent à eux trois environ 90 % de l'économie maritime chinoise.
Selon ce rapport, ces trois zones se concentrent principalement sur les communications et le transport, l'industrie de la pêche et le tourisme. Ces industries maritimes ont entraîné le développement de l'ensemble de l'économie de ces régions.
Pourtant, le problème de la construction superflue se manifeste. D'après Liu Shuguang, la redondance de construction modérée est normale dans le développement d'une économie d'échelle. Mais la construction superflue excessive et à bas niveau entraîne l'épuisement des ressources et une offre trop importante. Actuellement en Chine, le problème de la construction superflue existe dans les trois zones de l'économie maritime, où l'industrie de hautes technologies est relativement sous-développée.
D'après Liu Shuguang, le gouvernement devrait encourager le développement des industries de pointe, et limiter celui des industries à forte main-d'œuvre, afin de former une chaîne industrielle complète.
Beijing Information
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