Le 19 octobre 2009, la presse chinoise a annoncé qu'une équipe d'experts serait envoyée à l'étranger pour recenser l'ensemble des pièces du Palais Yuanmingyuan (« Jardin de la Clarté Parfaite », également connu sous le nom de l'ancien Palais d'été) dispersées à travers le monde. Le mois prochain, la délégation se rendra aux Etats-Unis, première étape de sa tournée d'enquête. Récemment, l'Université Duke aux Etats-Unis a autorisé l'Administration du Palais Yuanmingyuan à utiliser sept anciennes photos qu'elle possédait représentant les ruines de l'ancien Palais d'été détruit et incendié en 1860 par les troupes anglo-françaises. Parallèlement, elle a envoyé des copies en haute définition des photos.

Vestiges de Haiyantang (« Salle de la Paix Nationale ») : construit en l'an 25 sous le règne de l'empereur Qianlong (1760), ce complexe de style européen est célèbre pour sa fontaine-horloge. De part et d'autre du bassin, 12 statues ayant la tête d'un animal en bronze et le corps d'un humain sculpté en pierre étaient alignées en ordre et formaient le caractère chinois « 八 ». La clepsydre a été conçue de manière à ce que de l'eau jaillisse successivement de chaque tête toutes les deux heures, et qu'à midi, elle coule simultanément des douze têtes. Selon la tradition chinoise, chaque journée se composait de douze périodes de deux heures. Chacune de ces périodes de deux heures porte le nom d'un des Douze Rameaux Terrestres. (Photo prise en 1918 et fournie par l'Université Duke aux Etats-Unis)

Vestiges de Xieqiqu (« Palais du Plaisir Harmonieux ») : situé dans le sud-ouest de la zone des bâtiments de style européen, ce complexe, achevé en l'an 16 sous le règne de l'empereur Qianlong (1751), servait à abriter la première fontaine de style occidental de la Chine. Autour du bassin principal, se trouvaient 22 statues d'animaux en bronze déversant de l'eau, dont 18 oies sauvages et 4 moutons. (Photo prise en 1918 et fournie par l'Université Duke aux Etats-Unis)

Vestiges de Qichunyuan (« Jardin du Printemps Resplendissant », désormais rebaptisé « Jardin des dix mille Printemps ») : Faisant partie des trois jardins qui composent l'ancien Palais d'été (à savoir le « Jardin de la clarté parfaite »), le Jardin Qichunyuan couvre une superficie de plus de 53,3 hectares. Regroupant plusieurs sites construits à différentes époques, le Qichuanyuan est considéré comme un ensemble de parcs et de lacs réunis sur une petite surface. (Photo prise en 1918 et fournie par l'Université Duke aux Etats-Unis)

Selon l'Administration du Palais Yuanmingyuan, la restitution des photos à son pays d'origine a été réalisée avec l'aide d'un Américain d'origine chinoise. Ayant appris que l'Université Duke aux Etats-Unis possédait des archives photographiques, celui-ci a immédiatement pris contact avec l'université et a joué le rôle d'intermédiaire. Cette démarche a abouti à la signature d'un accord d'autorisation entre la « Harvard du Sud » et l'ancien Palais d'été.

Prises en 1918 par le photographe américain Sidney D. Gamble, ces anciennes photos,  représentant les ruines des bâtiments de style européen situées dans le sud-est du jardin impérial, témoignent une nouvelle fois du pillage et de la destruction survenus à l'époque. Certains vestiges en pierre que l'on peut voir sur ces images en noir et blanc sont aujourd'hui introuvables.

Certains spécialistes ont expliqué que les photos de l'Université Duke pourraient aider à combler des lacunes concernant les recherches sur l'ancien Palais d'été dues à la faible quantité de photos du genre conservées en Chine.

De plus, les objets d'art restants du Palais Yuanmingyuan sont principalement des vestiges sculptés en pierre, lesquels se trouvent dans la zone des bâtiments de style européens. Malheureusement, en raison de leur mauvais état, ces pierres ont été déplacées de leur emplacement d'origine et ont été entassées çà et là. Les photos américaines pourraient servir de repères pour situer l'emplacement de ces pierres, revêtant une portée significative pour les recherches sur les sculptures en pierre de Yuanmingyuan.

Selon un spécialiste du patrimoine culturel, il faut établir une liste complète

« Avant d'être incendiés en 1860 par les troupes anglo-françaises, les bâtiments de l'ancien Palais d'été possédaient chacun des archives d'ameublement, indiquant la disposition des meubles et des objets d'art dans chacune des pièces. Malheureusement, ces documents ont également été brûlés par les envahisseurs. C'est pourquoi il nous est aujourd'hui très difficile de deviner la quantité exacte des trésors que possédait le palais avant le pillage », a déclaré M. Wang Daocheng, membre de la Société d'études du Palais Yumingyuan de Chine.

« A l'étranger, les musées ont l'habitude d'inscrire l'origine des reliques qu'ils conservent, afin de garantir une transmission ordonnée des antiquités. De ce fait, s'ils sont d'accord pour travailler en collaboration avec notre équipe à l'occasion de la tournée d'enquête, il nous sera possible d'établir un catalogue relativement complet sur les objets d'art de Yuanmingyuan disparus dans l'incendie », a-t-il ajouté.

Selon un juriste, un partage des archives historiques serait possible

Selon Yu Fei, docteur en sciences juridiques et maître de conférences à l'Université des sciences politiques et juridiques de Chine, le projet de recherche des trésors de l'ancien Palais d'été à l'étranger est une méthode pragmatique compte tenu des difficultés qu'implique la restitution. « Lors de la tournée d'enquête, on pourra nouer des liens avec des musées étrangers et entamer, dans la mesure du possible, une négociation sur une coopération ultérieure. Par exemple, sans revendiquer un droit de possession, on proposera la mise en place d'un partage des ressources patrimoniales, telles que les documents et les anciennes photos. De plus, en s'unissant avec d'autres pays victimes du pillage de leur patrimoine tels que la Grèce, l'Egypte et l'Italie, la Chine pourra promouvoir l'élaboration d'une convention internationale chargée de rechercher une solution aux problèmes légués par l'histoire », a-t-il précisé.

Chen Mingjie, Directeur de l'Administration de Yuanmingyuan

« Depuis 1860, en plus des innombrables objets d'art qui ont disparu dans l'incendie de l'ancien Palais d'été provoqué par l'Armée anglo-française, d'autres ont été disséminés à travers le pays, alors que la plupart des antiquités qui constituent la quintessence de la culture chinoise ont été écoulées à l'étranger, et principalement en Grande-Bretagne, en France, dans d'autres pays d'Europe ainsi qu'aux Etats-Unis et au Japon», a-t-il déclaré.

« Selon des calculs approximatifs, environ 1,5 million d'antiquités sont conservées dans plus de 2 000 musées dans 47 pays », a-t-il ajouté, citant notamment le British Museum et le Musée d'art français de Fontainebleau. « La Chine espère établir une base de données et ne va pas forcément demander la restitution des objets d'art ».

La tournée d'enquête à l'étranger se divisera en trois étapes, à savoir une étape aux Etats-Unis, une en Europe et une en Asie. Il est prévu que la visite aux Etats-Unis, première étape du recensement, débutera le mois prochain. « La principale mission de l'équipe d'experts est d'enquêter sur l'état réel des trésors existants, de collecter et de réunir les archives ainsi que les anciennes photos concernées. Une autre tâche est de se servir de tous les moyens photographiques possibles pour que les images réelles des antiquités puissent retourner en Chine, afin de faciliter les recherches sur le Yuanmingyuan et de fournir des données historiques permettant la reconstruction du Jardin de la Clarté Parfaite », a-t-il poursuivi.

Selon Cheng Mingjie, au moins une centaine d'archives photographiques représentant l'ancien Palais d'été est conservée aux Etats-Unis. « La plupart de ces archives n'ont jamais été publiées, c'est pour cela que la délégation se rendra d'abord dans trois villes américaines, à savoir Washington, Boston et New York, et se mettra en contact avec une dizaine d'établissements locaux ainsi qu'avec des collectionneurs privés ».

La visite aux Etats-Unis s'achèvera à la fin de l'année. Le recensement en Europe et en Asie (surtout au Japon) sera lancé au début de l'année prochaine. « La tournée d'enquête à travers ces trois continents permettra de compléter et de perfectionner la mise en place de la banque d'archives et de données sur l'ancien Palais d'été. Cette mission visant à contacter les musées étrangers concernés et à établir une coopération avec eux pourra faciliter l'organisation d'une exposition de notre patrimoine pillé, notamment dans notre pays », a conclu M. Cheng.

Beijing Information