Lors d'un forum consacré à la qualité de la vie des femmes chinoises, Mme Yu Dan, professeur à l'École normale supérieure de Beijing et spécialiste du confucianisme, évoque les points faibles de la mentalité du deuxième sexe : « La motivation de la consommation excessive provient du complexe d'insécurité. Les produits luxueux ne sont pas nécessaires et ne servent qu'à embellir les choses déjà belles ».
Nous sommes loin des fleurs printanières et de la lune d'automne
Quelles traditions les femmes actuelles ont-elles perdues ? La réponse de Mme Yu est plutôt étonnante : « C'est le goût naturel pour les fleurs printanières et pour la lune d'automne. Certes, cela n'a rien à voir avec l'augmentation du salaire et les produits de luxe, mais la plupart des femmes ne les chérissent plus. De ce fait, nous sombrons souvent dans un stress inutile sans éprouver le plaisir de faire de notre vie une aventure poétique et merveilleuse à l'instar de nos ancêtres lettrés ».
« Désormais, nous célébrons la fête de la mi-automne (le 15e jour du 8e mois du calendrier lunaire, il s'agit d'une fête familiale) dans le faste, en rejetant la tradition qui consiste à admirer le clair de lune, comme le faisaient les générations précédentes. La nostalgie se raréfie tandis que la nervosité matérialiste se multiplie. À vrai dire, mener une vie élégante est la projection de notre sentiment interne. Les femmes ne peuvent se surpasser sans garder une attitude mentale sincère et positive. Ce que nous éprouvons au fond de nous-mêmes détermine notre expression, une chose que nous ne pouvons camoufler avec le maquillage. Ce n'est qu'en maintenant, en notre for intérieur, l'autosatisfaction et l'esprit d'indépendance que nous arriverons à atteindre le bonheur à tout moment », explique-t-elle.
La curiosité est comme l'eau de Jouvence
Lorsqu'on l'interroge sur les secrets de sa réussite, Mme Yu explique : « La curiosité est une véritable eau de Jouvence pour les femmes ». Quand Yu Dan était petite, elle s'intéressait à l'opéra classique Kunku et apprenait cet art auprès d'un professeur, issue d'une famille d'aristocrates. « Bien qu'elle soit déjà septuagénaire, elle avait l'air très jeune et dynamique lorsqu'elle m'enseignait le « Pavillon aux pivoines». Comme si une jeune fille de 17 ans s'était incarnée en elle », s'exclame Yu Dan.
« Au cours des dernières années de sa vie, mon professeur n'a cessé de faire preuve de curiosité à l'égard des choses nouvelles. Dans les années 1980, elle m'a demandé de faire du shopping avec elle pour l'aider à choisir une chemise chauve-souris. Elle en a acheté une pour seulement 8 yuans. Ce vêtement allait parfaitement bien avec ses cheveux blancs. Une fois, je me suis rendue chez elle. Son mari était en train de réciter des poèmes tandis qu'elle faisait le ménage comme une jeune mariée, tout en fredonnant un morceau de l'opéra Kunqu. Cette scène impressionnante m'a fait comprendre que le bonheur résidait dans la vie quotidienne et ne dépendait certainement pas des revenus financiers ».
Passionnée des romans de cape et d'épée
Habillée en Armani, Mme Yu Dan n'est pas du tout une simple puriste. « En tant que femme, je suis plus souvent irrationnelle que rationnelle. Dans la vie, les marques à la mode ont leur raison d'être. Mais, pour moi, le mot « marque» signifie plutôt « empreintes». Je préfère donc les empreintes naturelles aux empreintes luxueuses. Par exemple, j'aime me promener au bord de l'eau, car selon Laozi, « la bonté suprême est comme l'eau qui favorise tout et ne concurrence rien». C'est pourquoi, à mes yeux, les régions méridionales ont plus de charme que les régions septentrionales ».
Évoquant le choix de ses parures, Mme Yu avoue avoir une préférence pour les grands bijoux. En ce qui concerne son style vestimentaire, elle reconnaît préférer les vêtements qui peuvent être portés aussi bien par un homme que par une femme. « Quand j'étais à l'école, les romans de cape et d'épée étaient en vogue. Il m'arrivait d'en lire de temps en temps. Ma passion pour le héros me poussait à choisir des vêtements à la fois masculins et féminins, comme des chemises à manches longues et des blues jeans. J'aimais également beaucoup les couturiers un peu extravagants », poursuit-elle. À l'étonnement général, cette femme jette son dévolu sur le gerbera au mépris de la rose. « Si un homme m'offrait un bouquet de roses, je ferais semblant de l'accepter avec plaisir », dit-elle malicieusement.
Beijing Information
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