Liu Nili, journaliste du Commerce de Beijing
Le Midi Festival vient de souffler sa dixième bougie. Cette rencontre événementielle n'était qu'au début une simple soirée d'un petit nombre de musiciens. Mais aujourd'hui, elle est l'étendard de la musique chinoise moderne. Les jeunes l'appellent le « Woodstock chinois ».
« La décennie qui vient de s'écouler constitue l'âge d'or de ma vie. Quand je songe au Midi Festival c'est comme si j'observais mon propre épanouissement dans un miroir. C'est un mélange d'affection et d'espoir», a évoqué M. Li Ge, rédacteur en chef du portail musical de Sohu.net.
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Scène satellite du Midi Festival 2009 à Zhenjiang.(365huodong.com) |
D'une rencontre amicale à une carte de visite musicale
En juillet 2000, la première édition du Midi Festival venait au monde. Bière, musique, cheveux teints en jaune ou vert, tatouages, garçons et filles en folie... Tous les ingrédients de la musique de jeunes étaient réunis. Les quelques groupes sur scène s'intitulaient Yaksha, Bombe ou autres noms dynamiques.
Un musicien criait vers la foule de jeunes spectateurs : « Ce qui compte, ce n'est pas le rock, mais vous-mêmes ».
Cette première édition, à entrée libre, dura une semaine. Surla Culture Plaza de Xidan, 10 000 spectateurs étaient réunis chaque soir. Toute la capitale succomba à ce nouveau son. Une nouvelle époque musicale s'ouvrit alors en Chine.
Le Midi Festival est la première fête de la musique d'auteur de Chine. Son organisateur, le Conservatoire Midi de Beijing, est le berceau du rock chinois. Parmi les premiers pionniers dans l'enseignement musical privé en Chine, cette école fut fondée en 1993 où la musique académique était prépondérante.
En mai 2001, la deuxième édition du Midi Festival fut organisée. Plus de 40 groupes nationaux y participèrent. Le critique musical M Yan Jun désigne les deux premières éditions de « vieux » Midi. A cette époque, la musique retentissait tandis que l'auditoire s'abreuvait de bières gratuites. Les quelques centaines de participants étaient tous des amis ou camarades de classe au Conservatoire. « Nous nous sentions comme des clandestins, malades et stressés. Marginalisés par l'enseignement académique, ces jeunes artistes éprouvaient du ressentiment. Leur passion pour le rock et la musique moderne leur donnait le goût de l'aventure », a raconté M. Yan.
En 2002, le Conservatoire Midi déménagea du troisième périphérique nord-ouest pour s'installer dans les beaux paysages dela Collineparfumée. Le Festival possédait enfin une pelouse. Le rock , longtemps considéré comme la peste, sortait de l'ombre et trouvait sa place au soleil. On chantait l'amour et l'amitié.La glace s'est brisée entre la musique moderne et la société.Des jeunes, professionnels ou amateurs, amis ou étrangers, fans fidèles ou simples curieux, se réunissaient pour ce carnaval estival. « C'était merveilleux ! J'étais ivre même avant les spectacles », reconnut M Yan, encore ému.
Cette troisième édition attira plus de 50 groupes nationaux talentueux et accueillit 6 000 à 8 000 spectateurs par jour. De grands médias internationaux tels que la BBC et ABC couvrirent ce gala. La capitale chinoise disposait désormais d'un nouvel emblème culturel.
Un coût d'organisation de 100 000 yuans
En 2003, la quatrième édition du Midi festival fut reportée à cause de la pandémie de SRAS. Cette année là, de nombreux groupes se dissolvèrent ou s'exilèrent dans les régions lointaines telles que le Tibet, le Xinjiang ou le Yunnan. Des groupes de musique expérimentale ou de musique électronique qui avaient émergés lors de la précédente édition furent réduits à un cercle restreint. Le rock risquait de mourir. Pour le sauver, il fallait que le festival tienne le coup. L'organisateur eut toutes les peines pour collecter 100 000 yuans, dont 85 000 de sa poche et 15 000 yuans accordés par le Fonds de la musique populaire. Avec un si modeste investissement , on ne pouvait que payer la location du matériel, l'impression des affiches ainsi que la restauration des musiciens. Les 40 groupes participants n'ont pas touché un seul sous pour leurs représentations. Ceux qui vinrent des provinces étaient obligés de payer eux-mêmes leur déplacement et de passer la nuit dans la grande salle du spectacle ou dans les dortoirs du Conservatoire. Quant aux musiciens de Beijing, ils faisaient chaque jour un aller-retour de plusieurs heures entre le centre ville etla Collineparfumée où se tenait le festival.
Une porte commerciale ouverte pour le Festival
En 2004, l'ombre du SRAS disparut. Le Midi Festival dût de nouveau déménager. Dans le Parc des sculptures de Beijing, cette cinquième édition connut son premier nirvâna. La fréquentation avoisinait les 80 000 personnes. L'entrée n'était plus gratuite. Une porte commerciale s'est ouverte devant le Festival. De 2005 à 2009, le tarif d'entrée a grimpé de 10 yuans à 50 yuans, le nombre des visiteurs s'est parallèlement multiplié.
En 2005, la sixième édition du Midi Festival eut lieu dans le Parc de Haidian. Durant 4 jours, ce gala international de musique attira 46 délégations musicales et 22 musiciens venus deChine, des Etats-Unis,France, Danemark, Canada, deNorvègeet deSuède.Letarif journalier s'élevait à 30 yuans, et le tarif universel (quatre jours), de 100 yuans. Le Festival produit son premier DVD. Les boissons étaient désormais payantes. Un verre de bière coûtait 3 yuans. Mais, la plus audacieuse tentative de cette année était la création du Mini Midi, scène satellite du Festival Midi.
Des années d'efforts inlassables furent récompensées en 2007. Cette année, le Festival devint enfin rentable. Pour un investissement de 1,2 million de yuans, il engrangea 1,4 million. Malgré un tarif journalier de 50 yuans, les tickets de quatre jours s'arrachèrent dans l'après-midi de la première journée. Le nombre de visiteurs dépassa 350 000 personnes, un record en 8 ans. De petits marchands de boissons et de restauration rapide firent fortune dans le parc. Le Midi remporta son premier succès commercial.
Etendard de la musique des jeunes
Devenu un événement culturel influent à l'échelle nationale, le Midi Festival a formé un étendard de la musique contemporaine en Chine. La voie de sa progression est aussi celle de la maturation du marché chinois des festivals musicaux. Depuis dix ans, de nombreuses fêtes de la musique ont pris naissance en copiant le modèle du Midi. Ces fêtes constituent ensemble une plate-forme où de nouvelles formes de culture se manifestent. On ne les considère plus comme des sous-cultures, mais comme une précieuse source de création.
Beijing Information
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