A cœur vaillant d'impossible
L'industrie chinoise du cinquième art est en proie à bien des difficultés, certains acteurs de ce secteur se faisant depuis longtemps du mouron en raison du piratage chronique et des ventes de musique numérique qui n'ont pas pris le bon pied. Selon un rapport annuel publié sur Internet par iResearch, chef de file des enquêtes sur ce support numérique au niveau national, le nombre d'utilisateurs de la toile a dépassé les 298 millions en 2008, dont 84,5 % d'entre eux téléchargèrent ou écoutèrent de la musique en ligne. Cette analyse fut complétée par l'enquête d'Inmusic, l'un des magazines musicaux les plus influents du pays, qui estima que la quasi totalité des téléchargements gratuits de musique en ligne étaient illégaux. Par ailleurs, la part des CD pirates représentent près de 90 % de la vente total de disques compacts.
« De par la présence du moteur de recherche baidu.com, dans le climat actuel, peu de musiciens indépendants peuvent vivre de la commercialisation de leurs œuvres », a regretté M.Shi. Premier serveur de recherche de cette contrée, Baidu.com se taillait la part du lion, englobant environ 94,3 % de l'ensemble du marché, selon de précédentes enquêtes effectuées par iResearch.
En revanche, selon la source précédente, l'égard accordé aux arts vocaux et l'envie de mélodies des consommateurs redoublent de plus belle tandis que les ventes de galettes ne cessent de chuter. « Nous pouvons mobiliser leur sensibilité musicale pour les réorienter vers d'autres types de produits, de la sorte, nous serons à même d'engendrer des profits tout en leur proposant des téléchargements gratuits », souhaite M.Shi. « A mon humble avis, il n'existe pas de tels types de modes d'opération dans d'autres pays ».
Cette idée qui coule de source fut soulevée par Ed Peto, consultant et promoteur musical britannique qui a posé ses valises dans la capitale chinoise. Celui-ci fonda le label MicroMu en juin 2008. M.Peto dévoila son concept lors de l'Exposition PALM 2008 (17e Exposition internationale de Chine pour l'audio, la lumière, la musique et la technologie professionnelles) où il suscita l'intérêt du public et dénicha son premier sponsor. Beyerdynamic, une marque de matériel audio de prestige internationale et dont les produits sont prisés par des musiciens de la pointure de Bob Dylan ou Joni Mitchell, lui offrit du matériel d'enregistrement.
Cette idée réveilla la vocation de Dominic Johnson Hill, père de la boutique Plastered T-shirts de Beijing et qui, prenant le jeune site sous son aile, lui proposa un soutien financier. « Nous avions toujours souhaité nous lancer dans le domaine musical, c'est pourquoi cette initiative parut à nos yeux être un projet parfait », reconnut M.Johnson Hill, présent sur la scène musicale indépendante de son pays d'accueil.
Jusqu'à présent, le label s'est associé avec certains interprètes et a placé 14 opus sur le marché, la plupart gratifiés de quatre ou cinq étoiles par les internautes sur divers sites. Zhang Weiwei, musicien folk sous la houlette du label, mit au monde l'un des 10s albums indépendants les plus appréciés par les utilisateurs de Douban.com, l'une des plus importantes communautés en ligne de critique littéraire, musicale et cinématographique.
Le flux total généré par la maison de disques s'est élevé à plus de 250 000 visites, six mois à peine après son lancement, et celui-ci continue de progresser de 40 % par an, a précisé M.Johnson Hill.
« Tous les artistes que nous avons aidé à lancer leurs œuvres m'ont fait part du caractère fructueux de notre coopération. Si vous me permettez l'image, la contribution de ces artistes à mon entreprise en tant que porteurs de titres se fait de manière musicale, nous leur versons leurs dividendes en fonction de la popularité de leur musique », révéla M.Shi, qui refusa de s'étendre en détail sur les sommes d'argent incombant aux chanteurs.
Zhao Guang, premier artiste folk à être soutenu par MicroMu pour la sortie de son œuvre, certifia qu'il avait reçu un versement de la part du label. « Il est vrai que je ne compte pas faire ma vie avec cette somme », a déclaré le concertiste.
« Je ne peux que vous révéler que par rapport aux contrats émis par d'autres maisons de disque, les nôtres sont plus avantageux pour les artistes », fit remarquer le patron du label indépendant.
Certains acteurs du secteur restent mitigés quant aux opérations du label, qui restent à leurs yeux inhabituelles. « Ce concept a beau être innovant, son efficacité reste limitée », a jugé un directeur artistique sur le portail de partage de musique Xiami.com et qui souhaitait garder l'anonymat.
« J'apprécie le fait que ce label se consacre à la découverte d'une musique originale et de qualité, cependant j'estime que sur le plan commercial, celui-ci doit être placé à l'épreuve du temps », estime pour sa part Liu Hao, directeur du Bureau de la commercialisation musicale de Neocha.com, l'un des premiers portails en ligne pour la découverte de musique, d'art, d'évènements et biens originaux parmi les communautés créatives chinoises.
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