Xu Bei
Menée par le Ministre du Commerce, Chen Deming, une délégation chinoise promouvant les investissements commerciaux est partie le 24 février à destination de l'Europe. Ce voyage couvrant quatre pays est considéré comme le prolongement du « voyage de confiance » en Europe du Premier ministre chinois Wen Jiabao au mois de janvier.
Arrivée le 25 février à Berlin, la délégation commerciale composée d'environ 200 hommes d'affaires chinois, a signé une série de contrats et de lettres d'intention de coopération avec des entreprises allemandes, dont le montant dépasse 10 milliards de dollars (7,87 milliards d'euros). Elle a poursuivi son voyage officiel en Suisse, signant des contrats d'achat avec des sociétés locales dont le montant atteint 300 millions de dollars (236,2 millions d'euros), ainsi qu'en Espagne et en Grande-Bretagne pour développer des discussions sur les investissements commerciaux et les activités d'achats.
Dans le contexte actuel de la crise financière globale, les contrats d'envergure signés par la Chine en Europe ont placé le pays sous une large couverture médiatique. Sur ce thème, Beijing Review a interviewé Liu Jiansheng, chercheur adjoint du Département des Affaires européennes, relevant de l'Institut de recherche des Affaires internationales contemporaines de Chine.
Beijing Review : Fidèlement à la promesse du Premier ministre Wen Jiabao lors de sa visite en Europe, la Chine a envoyé le 24 février une délégation commerciale dans quatre pays européens. D'après vous, par quelle réflexion la Chine décide de conclure cette série de commandes à l'heure actuelle ?
Liu Jiansheng : Touchée par la crise financière globale, l'économie européenne s'affaiblit visiblement, sans limite apparente. Les expériences historiques manifestent que le protectionnisme aura tendance à regagner du terrain à la suite de la crise économique. Cette fois-ci, les contrats d'envergure signés par la RPC en Europe visent à renforcer la confiance de l'Europe, partenaire commercial important de la Chine, de lutter contre la crise économique, de renforcer la coopération avec la Chine, et d'éviter le recours au protectionnisme commercial.
Les économies de la Chine et de l'Europe présentent une forte complémentarité, mais parallèlement le commerce bilatéral est déséquilibré depuis une longue période. A travers les achats d'envergure la Chine manifeste-t-elle avec sincérité une volonté de réduire le déséquilibre commercial sino-européen ?
Je trouve que le déséquilibre du commerce entre la Chine et l'Europe résulte de la différence de la division du travail au niveau mondial. Certes, la délégation commerciale envoyée par le gouvernement chinois favorisera le développement sain et équilibré du commerce bilatéral, mais il s'agit d'autre chose qu'une simple preuve de sincérité. En effet, l'objectif de la délégation commerciale en Europe vise non seulement à remporter des contrats, mais porte également sur les discussions et investissements destinés à consolider la coopération entre les deux entités géographiques et à lutter ensemble contre la crise financière. Pour cela, le montant des commandes n'est pas le seul facteur déterminant.
Vu le contexte économique mondial, les pays occidentaux réduiront-ils les limites d'exportation des produits de haute technologie à l'attention de la Chine ?
Je crois que l'on peut répondre par l'affirmative, sans compter le domaine militaire. Les limites imposées à l'exportation des produits de haute technologie vers la Chine seront réduites. Cependant, les Etats membres de l'UE n'ont pas encore une position unie, ainsi cette réduction pourrait dans une certaine mesure être restreinte, surtout pour des produits sensibles.
Certains soupçonnent la Chine de réaliser ses buts diplomatiques sous couvert de la signature de contrats, en tirant parti de sa forte réserve de devises étrangères. L'exemple le plus évident est l'exclusion de la France. Qu'en pensez-vous ?
La diplomatie sert l'économie, ainsi il n'est pas totalement erroné de considérer la signature de contrats en Europe par la Chine comme un moyen diplomatique. Cependant, il est inexact de qualifier ces activités de « diplomatie économique » ou d'affirmer que celles-ci reviennent à tirer profit de la réserve de devises pour effectuer la diplomatie politique. Sur les questions de principe, la Chine ne donne jamais l'argent en échange de la cession d'intérêts politiques clés par d'autres pays. Cela est tout sauf le style de la diplomatie chinoise. Quant au problème de l'exclusion de la France, j'estime que c'est le prix à payer par le président français Nicolas Sarkozy pour son attitude politique.
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