Deux soldats irakiens font un geste de victoire au centre de la ville de Falloujah le 17 Juin. Le même jour, le gouvernement irakien déclare la reprise de la ville occupée par l'EI 

Conflits politiques 

 En 2015, M. Abadi a proposé une réforme visant à réduire le personnel superflu du gouvernement, à lutter contre la corruption et à destituer les principaux ministres nommés en fonction de leur appartenance sectaire ou ethnique. Toutefois, ses tentatives de réforme ont été en grande partie contrecarrées par d'autres politiciens, qui sont davantage intéressés à maintenir le statu quo et à s'accrocher à leur propre pouvoir et à leur influence.

Malgré les compromis de M. Abadi dans le remaniement ministériel, le parlement refuse d'approuver son plan. De plus, il n'a pas réussi à obtenir le soutien des Sunnites et des Kurdes. D'un autre côté, les Chiites, dont M. Abadi fait partie, l'accusent de faire trop de concessions aux Sunnites et Kurdes. Ces principales factions considèrent le remaniement ministériel comme une tentative du premier ministre de concentrer le pouvoir. C'est ainsi que M. Abadi se trouve face à un dilemme.

Dans de telles circonstances, la lutte de pouvoir entre les groupes politiques en Irak s'est intensifiée. A court terme, un compromis est peut-être difficile à atteindre. Actuellement, la Coalition de l'Etat de droit, un bloc chiite dirigé par l'ancien Premier ministre M. Maliki, est le plus grand challenger du gouvernement. M. Maliki consent à un remaniement ministériel, mais souhaite également consolider sa position par la force politique. Il semble attendre l'occasion propice pour remplacer M. Abadi.

Une autre force politique majeure est la Liste nationale irakienne. C'est une coalition politique laïque composée de Chiites modérés et de Sunnites sous la direction de l'ancien vice-président Ayad Allawi. Les forces politiques représentant les Sunnites et les Kurdes acceptent également un remaniement ; cependant, comme MM. Maliki et Allawi, ils insistent sur le maintien de leurs postes au sein du cabinet.

Dirigée par le Chiite radical Moqtada Sadr, l'Alliance nationale irakienne a demandé à plusieurs reprises un remaniement ministériel complet pour contrebalancer l'influence de M. Maliki. La division entre les forces politiques est devenue trop forte pour la réconciliation. Résultat : parvenir à un consensus sur le rééquilibrage du pouvoir est très difficile, et la crise se poursuit.    

En Irak, de nombreuses tribus et minorités ethniques ont toujours été exclues de la gouvernance. Cette marginalisation politique et économique les pousse à recourir à des tactiques alternatives pour exprimer leur position. Par exemple, les milices chiites radicales jouent un rôle de plus en plus important dans les diverses manifestations contre le gouvernement.

L'EI a lancé une offensive d'ampleur en 2014, occupant une grande partie du territoire septentrional et occidental de l'Irak, y compris Mossoul, la deuxième plus grande ville du pays. La nation a presque été déchirée par l'EI. Avec le soutien international, les forces irakiennes bénéficiant de l'aide des milices chiites et des combattants kurdes ont réussi à reprendre le contrôle de certains territoires. Cependant, plusieurs attaques terroristes menées par l'EI ont porté un coup rude à la sécurité et rallumer les conflits sectaires.

Intervention étrangère 

La crise politique en Irak a suscité l'inquiétude des Etats-Unis. Le vice-président américain Joseph Biden et le secrétaire d'Etat John Kerry ont effectué des visites à Bagdad, essayant d'harmoniser les relations entre les factions politiques et exhortant ces dernières à se concentrer sur la lutte contre l'EI.

Par ailleurs, l'Iran semble jouer un rôle actif dans la situation. En tant que puissance chiite, ce pays essaie d'influencer la politique irakienne dans le but d'enrayer le conflit croissant entre les factions chiites.

Cependant, les forces étrangères ont des intérêts particuliers en participant à la résolution de l'impasse politique en Irak. Leur participation est susceptible d'ajouter de nouvelles incertitudes à la politique irakienne.

La résolution de l’impasse politique actuelle ne sera pas rapide. En 2003, après avoir renversé Saddam Hussein, l'administration Bush a promis de reconstruire l'Irak comme un modèle de démocratie au Moyen–Orient. Cependant, 13 années plus tard, l'Irak est encore loin de parvenir à un consensus national, de créer une société civile et d'instituer un système judiciaire sain et solide. Tributaire de l'aide étrangère, le pays a encore un long chemin à parcourir avant la résolution de ces problèmes.

(L'auteur est chercheur adjoint de l'Institut d'économie et de politique mondiales relevant de l'Académie chinoise des sciences sociales)

Beijing Information