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Le futur en partage

Fu Jun  ·  2018-01-18  ·   Source: Beijing Information
Mots-clés: croissance inclusive; Chine; monde; futur

 

L'autoroute Taizhou-Zhenjiang, dans la province du Jiangsu

Nous vivons dans un monde où tout va très vite et qui est de plus ne plus connecté. La mondialisation a atteint de nouveaux sommets au XXIe siècle. Avec les nouvelles technologies, si beaucoup ont bénéficié de cette mondialisation, la répartition est loin d’être équitable, engendrant du mécontentement, et expliquant les récentes secousses que subit le processus de la globalisation.

Quand près de la moitié de la richesse mondiale est aux mains de 5 % de la population, les problèmes surviennent. Les principes économiques veulent que l’offre et la demande soient équilibrées pour que la croissance persiste.

Les questions mondiales urgentes doivent être traitées par des efforts conjoints. Que peut faire la Chine pour promouvoir la croissance inclusive ?

De nouvelles initiatives dans l’éducation

L’éducation joue un rôle crucial pour résoudre le problème du développement déséquilibré. La Chine a bénéficié de cette maxime et peut maintenant en faire profiter les autres. Quand le pays a entamé la politique de réforme et d’ouverture à la fin des années 1970, Deng Xiaoping, l’architecte de la modernisation chinoise, a envoyé de très nombreux Chinois faire leurs études à l’étranger. Il est actuellement de plus en plus admis que la croissance est davantage stimulée par le développement des talents que par l’offre du capital physique. Là où des investissements substantiels ont été réalisés dans l’éducation et les ressources humaines, les avancées technologiques, qui sont le résultat d’idées humaines sophistiquées, ont joué un rôle majeur dans la croissance économique et le rattrapage industriel.

C’est en faisant ce constat que la Chine a établi des programmes de formation et des stages diplômants dans ses établissements d’enseignement supérieur pour que les étudiants, les universitaires et les fonctionnaires des pays en développement puissent partager l’expérience chinoise en matière de croissance. Un exemple est l’Institut pour la coopération et le développement sud-sud, créé à l’Université de Beijing en 2016 avec son premier lot de 50 étudiants de pays en développement d’Amérique latine, d’Asie et d’Afrique. Cette initiative symbolise un changement dans les transferts de technologie de la Chine vers ces pays. Si la Chine avait joué un rôle de fournisseur de matériel, elle offre maintenant les logiciels, à savoir les connaissances et les idées.

Les cours et les stages impliquent souvent des voyages d’études dans des endroits qui sont représentatifs des différents types de développement, des zones rurales aux zones économiques spéciales, des villes côtières aux régions de l’intérieur. Les stagiaires peuvent ainsi constater de visu l’importance qu’il y a d’apprendre par la pratique, et de passer de l’exploitation des avantages comparatifs au développement des avantages concurrentiels par l’innovation. En d’autres termes, ils peuvent voir comment les économies passent de modèles à forte intensité de main-d’œuvre et de ressources à un modèle à forte intensité capitalistique, pour développer ensuite une supériorité avec un modèle à forte intensité de savoir au sein de la chaîne de valeur mondiale.

« Tant que nous nous en tenons à l’objectif de bâtir une communauté de destin pour l’humanité, en travaillant ensemble pour remplir nos responsabilités et en surmontant les difficultés, nous serons capable de créer un monde meilleur et d’offrir à nos populations une vie meilleure », avait déclaré le président chinois Xi Jinping lors du Forum économique mondial de Davos en janvier 2017. Ces propos représentent l’engagement de la Chine pour un développement équitable, inclusif et durable dans le monde.

La proposition de M. Xi sur la construction d’« une communauté de destin pour l’humanité » vise à renforcer le multilatéralisme pour répondre aux déséquilibres régionaux et mondiaux. On estime que le développement à une plus grande échelle peut générer une nouvelle dynamique pour la croissance mondiale inclusive. D’après la Carte mondiale sur la croissance économique établie par le Centre pour le développement international de l’Université d’Harvard, les pays qui disposent du potentiel de croissance le plus important dans la décennie à venir se trouvent principalement en Asie du Sud et en Afrique de l’Est. D’autres au Moyen-Orient et en Amérique du Sud devraient aussi décoller. Par ailleurs, la croissance va ralentir dans les économies développées. Les Etats-Unis devraient connaître une croissance de 2,58 % et la Grande-Bretagne de 3,32 %, alors que l’Allemagne, l’une des principales économies d’Europe, devrait afficher une progression de 0,35 % seulement.

Dans ce contexte, et alors que la Chine est maintenant la seconde économie mondiale qui affiche un taux de croissance trois fois plus rapide que celui des Etats-Unis, la Chine peut jouer un rôle en rapprochant un peu plus les pays développés et les pays en développement et en réduisant le fossé entre les riches et les pauvres.

L’amélioration des infrastructures

Une des manifestations du leadership de la Chine est l’initiative des Nouvelles Routes de la Soie que la Chine a proposée. Lancée en 2013, elle vise à établir des partenariats ou des sociétés à capitaux mixtes le long de l’ancienne Route de la Soie pour améliorer les connexions en Asie et au-delà avec des projets d’infrastructure comme des routes, des ponts, des ports, des gazoducs, des réseaux électriques et des câbles de fibre optique. Pour faciliter la croissance inclusive, il est essentiel non seulement de déployer des moyens de production, mais aussi des moyens de livraison et d’accès à l’information. Et l’on peut envisager que certains pays à revenu faible actuellement, qui ont compris, selon l’adage populaire, qu’il fallait « construire des routes pour s’enrichir », pourront un jour dire qu’en faisant comme la Chine, la croissance a été au rendez-vous.

Cette sagesse apparemment toute simple – à savoir que les routes précèdent la richesse – correspond au rôle crucial que les gouvernements doivent jouer en fournissant des biens publics, notamment des infrastructures physiques à long terme et à risque, pour que les pays sortent de la pauvreté. Par exemple, au cours de ces trois dernières années, le gouvernement chinois a investi plus de 182 milliards de dollars pour accroître et améliorer le réseau de fibre optique de la Chine. Entre 1996 et 2016, la Chine a construit 4,2 millions de kilomètres de routes, reliant 95 % des villages du pays, et des entreprises privées ont surgi le long de ces voies. Même à Shenzhen, la zone économique spéciale de premier plan, les premières infrastructures ont été construites par une armée d’ingénieurs avant que les investissements privés ne suivent.

La promotion du rôle des institutions

C’est sur cette logique que s’aligne la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII). En tant que banque de développement multilatérale proposée par la Chine en 2013 et lancée en 2015, la BAII vise à rassembler les Etats pour remédier aux pénuries dans les infrastructures en Asie et au-delà.

L’Asie doit investir à elle seule 1 700 milliards de dollars dans les infrastructures par an jusqu’en 2030 pour maintenir un élan de croissance résilient au climat, d’après la Banque asiatique de développement. La BAII complémente les institutions financières internationales sans s’y substituer, et elle a déjà approuvé l’adhésion de 84 pays (une liste qui croît sans cesse) de tous les continents, ce qui en fait une des plus grandes banques de développement multilatérales.

Tous les membres de la BAII ont signé l’accord de Paris sur le climat, et la banque propose une stratégie qui privilégie les investissements dans les énergies renouvelables et une efficacité énergétique accrue. S’engageant à investir dans « l’efficace, le propre et le vert », et avec des projets ouverts aux investissements privés, la BAII possède un grand potentiel dans le domaine de l’accroissement des financements pour un développement inclusif et durable dans les régions qui connaissent la croissance la plus forte dans le monde.

Un autre exemple d’établissement d’institutions et d’engagement pour un développement vert est le programme national de transactions sur le carbone qui fait de la Chine le plus grand marché dans ce domaine au monde.

Le partage des expériences

Déjà 40 ans que les réformes centrées sur le marché ont débuté en Chine. La croissance économique du pays a été impressionnante, tirant quelque 700 millions de personnes de la pauvreté. Le PIB par habitant était de 150 dollars en 1979, contre 9 mille dollars aujourd’hui, et il devrait atteindre 12 700 dollars vers 2025, un seuil qui fera entrer la Chine dans la catégorie des pays à revenu élevé. La Chine est la seconde économie mondiale, dépassant le Japon en 2009, et est devenue la première puissance commerciale en 2013.

Les pays en développement peuvent tirer des leçons de l’émergence rapide de la Chine - qui de pays reculé agricole au XXe siècle, a pu accéder au statut de puissance mondiale au XXIe siècle - car beaucoup se trouvent encore à la même étape de développement que la Chine il y a 50 ans.

Pour maintenir la croissance, le rôle de l’Etat et du marché est important, ni l’un ni l’autre ne devant prendre l’ascendant de manière extrême. Le marché et l’état de droit doivent aller de pair, mais tous deux ont besoin de temps pour grandir et se développer. Une stratégie réussie de réforme est donc une question délicate de séquençage et d’équilibrage. Dans le cas contraire, cela étouffe le progrès, comme ont largement montré les expériences, les succès et les échecs de nombreuses économies en transition.

Tout comme la Chine a beaucoup appris et a connu beaucoup de succès au cours de la mondialisation pendant ces 40 dernières années sans simplement reproduire des modèles et des systèmes du reste du monde, l’intention de la Chine n’est pas que les autres pays en développement copient directement les structures qui ont contribué à son succès.

Si l’on veut que les stratégies de la croissance économique réussissent, elles doivent, avec une vision claire et un pragmatisme de principe, refléter aussi les conditions locales et doivent être ajustées aux différentes étapes de développement des différents pays et régions.

(L’auteur est responsable des études à l’Institut pour la coopération et le développement sud-sud de l’Université de Beijing et membre du Future Agenda Council on Economic Progress du Forum économique mondial.)

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