L’émergence des sports de niche parmi les jeunes urbains chinois en quête de sensations fortes.

La plage de Hainan ne désemplit pas avec l’arrivée de touristes curieux de découvrir le surf. (CNSPHOTO)

Allongé tranquillement sur sa planche de surf, Xia Dongyang, 20 ans, adorait admirer le coucher du soleil enflammant le ciel de l’île de Hainan. Au loin, des vaguelettes se dessinaient et s’approchaient en cadence. Le soleil couchant dorait de ses splendides rayons la surface scintillante de la mer en diffusant des flots de lumière pourpre. L’expérience lui a tellement plu qu’il se serait cru au paradis. C’est par le plus grand des hasards qu’il est tombé sur des vidéos de surf il y a à peine six mois, autant d’images impressionnantes filmées par un fan de glisse et publiées sur son vlog. Il n’avait qu’une hâte, celle de partir dompter les vagues à son tour.

À l’instar du surf, certaines activités sportives de niche comme le skateboard et l’escalade ont émergé ces dernières années en Chine. Leur entrée au programme des Jeux olympiques de Tokyo a également entraîné une hausse de la pratique locale. Ces sports 100 % adrénaline comptent de plus en plus d’adeptes parmi les jeunes urbains chinois, amateurs de sensations fortes.

Selon un rapport dans le Grand Journal de CCTV, le nombre d’établissements de formation de skateboard a augmenté de 1 000 en Chine au premier semestre, soit une croissance de 117,7 % par rapport à janvier. Plus de 190 000 messages liés au skateboard et quelque 50 000 messages liés à l’escalade ont été publiés sur Xiaohongshu, plateforme populaire traitant de voyage et de style de vie. On peut également constater un nouvel engouement pour les activités nautiques à l’image de M. Xia. Chaque année, les petites écoles de surf voient leur clientèle augmenter sur l’île de Hainan et les plages du sud-est du pays où les conditions pour la pratique du surf sont au rendez-vous. La tendance est surtout observée parmi la classe moyenne.

Évolution de la société

Pratique du skateboard au Shougang Extreme Park, à Beijing, le 8 août. (CNSPHOTO)

Les priorités des citoyens chinois ont bien évolué avec l’arrivée des générations Y et Z. Si l’objectif de tout un chacun était auparavant l’enrichissement et l’acquisition de biens, les générations d’enfants uniques désormais devenus adultes aspirent à un mode de vie détaché des contraintes sociales de leurs aînés. Dans ce contexte, les sports, et notamment les sports extrêmes, trouvent leur place. Si ceux-ci étaient autrefois réservés aux classes aisées – les seules à avoir les moyens financiers pour acheter l’équipement adéquat – la classe moyenne chinoise y a accès à son tour avec l’augmentation du pouvoir d’achat.

Li Feifei est femme au foyer et mère d’un garçon de trois ans et demi. Suivant l’intérêt et la personnalité de son fils, elle a décidé de l’inscrire à des cours de skateboard. Après avoir fait le tour du marché, elle a constaté que ces derniers coûtaient nettement plus cher que les sports de masse tels que natation et basketball. Un cours individuel et personnalisé peut coûter jusqu’à 600 yuans (94 dollars). À hauteur de deux ou trois cours par semaine, l’apprentissage annuel représente une dépense non négligeable pour cette famille de classe moyenne. Mais Mme Li a choisi de soutenir son fils dans le développement des compétences dans ce domaine malgré le prix élevé.

La montée des sports de niche aurait été inconcevable sans le développement d’infrastructures techniques pouvant accompagner les progrès des sportifs assidus. Selon les statistiques de l’agence de presse Xinhua, le nombre de salles d’escalade en Chine est passé à 400, générant environ 300 000 visiteurs tous niveaux confondus. Pour maintenir la fidélisation client, les gérants doivent régulièrement adapter les voies et les parois d’escalade. C’est précisément la présence de ces spots dans les zones urbaines qui apporte un flot constant de vitalité à cette pratique.

Shi Yilong, 28 ans, fait partie des premiers à être entré en contact avec le skateboard en Chine. « Au début, nous n’avions aucun endroit pour nous entraîner. Les parcs nous interdisaient de rouler dans leur enceinte, idem pour les résidences où nous habitions », se rappelle-t-il. Aujourd’hui, dans les mégapoles comme Beijing, Shanghai et Shenzhen, un nombre croissant de skateparks de classe mondiale sont accessibles aux skateurs. Effacée l’image des « gangs de rue » du passé : M. Shi jouit désormais d’une popularité grandissante auprès de 2 millions d’abonnés à ses vlogs sportifs.

Amateurs de sensations fortes

L’escalade en salle gagne en popularité auprès des adolescents chinois. (CNSPHOTO)

D’après de jeunes amateurs, ce qui les pousse à suivre la tendance des sports de niche, c’est leur disposition à repousser constamment les limites et ne jamais faire de compromis. Chen Lingxiao est en quatrième année à l’Université de Pékin. Dès son arrivée sur le campus, il a été fortement impressionné par l’habileté des membres d’un club d’escalade universitaire. Il ne s’est jamais lassé de ce sport complet, sollicitant aussi bien les mains et les bras que les jambes et le tronc, sans oublier le mental. Grâce à sa maîtrise de l’escalade acquise au bout de quatre années d’entraînement, il est aujourd’hui le président du club. « Je considère l’escalade comme une forme de communication permanente avec mon corps. Je peux sentir la force de chaque muscle pendant l’exercice, et parfois des changements subtils de force peuvent m’aider à performer sur des blocs et des voies difficiles », témoigne-t-il. « La quête de perfection physique m’a permis de ressentir un vrai accomplissement personnel. »

M. Xia a acquis une expérience similaire lors de la pratique du surf. Face à une vague déferlante, on s’attend à ce qu’un surfeur de niveau professionnel fasse démonstration de figures et de manœuvres. Mais l’entrée en vague n’est jamais chose facile pour un débutant. Faute de techniques adéquates, il ne savait pas du tout comment appréhender une grosse vague. Conséquence : il buvait constamment la tasse. Au lieu de céder au découragement, il s’est perfectionné à force d’entraînement assidu. « Le plus grand sentiment d’accomplissement s’est fait ressentir lorsque j’ai réalisé une première entrée réussie en vague. À elle seule, cette action a suffi pour me libérer de toute la frustration accumulée. »

En parallèle, les amateurs de sports de niche forment entre eux une communauté d’apprenants. Wu Yonglin est présidente d’un club de skateboard universitaire à Beijing. Elle se passionne aussi pour la plongée, le ski, le street dance, l’escalade et bien d’autres sports. Pour cette amatrice de sensations fortes, l’enjeu des sports ne consiste pas uniquement à mener une vie saine, mais surtout à découvrir les plaisirs de la vie avec ses amis. « Le réseau de convivialité, c’est vraiment ce qu’il y a de plus excitant », s’exclame Mme Wu. Grâce au skateboard, elle s’est constitué un cercle d’amis très proches.

M. Xia voit les choses en grand. Il espère désormais se positionner aux côtés de surfeurs expérimentés, tant pour perfectionner ses performances que pour continuer à explorer ce sport extrême.

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