La culture des Qiang – une ethnie minoritaire du sud-ouest de la Chine – était à l’honneur le 12 mai 2018, lors de la diffusion en Chine et en France du documentaire Le peuple au-dessus des nuages. 

Cette date n’est pas anodine : il y a 10 ans jour pour jour, soit le 12 mai 2008, un séisme de magnitude 8 a frappé la province du Sichuan (sud-ouest), faisant plus de 80 000 morts et disparus. La préfecture autonome tibétaine et Qiang d’Aba, au Sichuan, a été parmi les zones les plus lourdement frappées par le tremblement de terre. Bon nombre d’habitations des Qiang ont été détruites, et plusieurs héritiers de cette culture minoritaire ont péri...    

Alors que le district de Wenchuan se relevait des décombres et commençait à reconstruire, il reste à savoir comment mieux protéger et transmettre la culture des Qiang aux générations futures.   

« Réveiller » le Nouvel An  

Le documentaire Le peuple au-dessus des nuages a été principalement tourné dans le village de Yueli, situé dans le canton de Yanmen de la préfecture d’Aba. Lorsque le séisme de Wenchuan a frappé, ce sont plus de 90 % des habitations de ce village qui ont été détruites. 

Zhao Jiankang est né à Yueli, où il était lycéen lors du séisme. Après avoir obtenu son diplôme universitaire, il a renoncé à un bon travail en ville, choisissant plutôt de revenir dans son village natal. 

« Quand je pense que la culture des Qiang, qui a survécu pendant des millénaires, pourrait disparaître dans 10 ou 20 ans, je me suis dit qu’en tant que Qiang, il fallait que je fasse quelque chose », a dit le jeune homme de 29 ans à CHINAFRIQUE. 

De retour dans son village, Jiankang n’a pas perdu de temps : il a créé une entreprise pour sauver et protéger la culture des Qiang. Le premier projet qui l’a occupé a été de faire « renaître » le Nouvel An des Qiang. Cette importante fête, qui a lieu le premier jour du dixième mois dans le calendrier lunaire, était presque tombée dans l’oubli au cours des dernières années. 

« La dernière fois que ce festival avait été organisé, c’était en 1992 », se rappelle Jiankang. Il espère maintenant revitaliser la culture de cette ethnie minoritaire à l’aide de ce festival, qu’il décrit comme une « véritable synthèse de l’histoire et des traditions des Qiang ». 

Cette « renaissance » n’a pas été facile, car la culture des Qiang n’a jamais été fixée par écrit, préférant toujours la transmission orale. Pour ce faire, Jiankang a visité beaucoup de villages des Qiang, utilisant son enregistreur et sa caméra pour recueillir des informations. 

Après un an de préparation, et plusieurs activités pour rafraîchir la mémoire des villageois, le Nouvel An des Qiang a enfin été lancé en grandes pompes le 11 novembre 2015. Les festivités ont connu un succès inattendu, durant jusqu’au lendemain matin. « Notre village a été le premier à présenter la culture des Qiang dans le cadre d’un vrai festival, et non par de simples spectacles comme ces dernières années », s’est-il réjoui. 

Les réactions n’ont pas tardé. Rapidement, la Télévision centrale de Chine, l’Université centrale des ethnies, le Conservatoire de musique de Shanghai et plusieurs universités de Chengdu ont cherché à coopérer avec son village. « De nombreuses universités ont choisi notre village comme terrain d’études sur la culture ethnique, et beaucoup de mémoires ont été écrits sur notre village », dit Jiankang. 

En 2016, la société de production française Étoile noire et la chaîne chinoise CGTN-Français ont choisi le village de Yueli pour tourner un documentaire. Deux ans plus tard, Le peuple au-dessus des nuages a enfin vu le jour.