La coordination régionale crée une situation gagnant-gagnant pour les acteurs nationaux et internationaux.

Caractéristique notable de la croissance de la Chine depuis la fin des années 1970, certaines régions clés prennent souvent l’initiative d’ouvrir une nouvelle voie de développement au niveau local que d’autres peuvent ensuite utiliser pour s’inspirer, l’objectif final étant celui d’une croissance synchronisée. Au cours des quatre dernières décennies, le pays est passé par trois étapes. De 1978 à 1998, les disparités régionales étaient encore importantes. De 1999 à 2016, des initiatives ont été lancées pour soutenir les régions sous-développées. Depuis 2017, la notion de développement coordonné est la norme. La province du Guangdong, fer de lance des réformes dans les années 1980, ainsi que la Nouvelle zone de Pudong à Shanghai, pionnière du progrès dans les années 1990, sont des exemples de ce modèle.

Réajustement des modèles

Des bateaux circulent dans les eaux du port de Yangluo à Wuhan, au Hubei (centre), le 13 août 2018. (XINHUA)

À ce jour, la Chine a fait des progrès constants dans la mise en œuvre de sa stratégie de développement régional coordonné. Par exemple, la région de Beijing-Tianjin-Hebei constitue actuellement une agglomération de villes de classe mondiale, avec la capitale de Beijing en son centre. Le delta du fleuve Yangtsé se tourne vers le marché de l’Asie-Pacifique. La Ceinture économique du fleuve Yangtsé met l’accent le développement durable et la protection de l’environnement. La région de la Grande Baie Guangdong-Hong Kong-Macao (GBA) semble prête à mettre Hong Kong et Macao au centre de l’initiative « la Ceinture et la Route ». Le nouveau modèle de développement de la Chine en matière de double circulation, avec le marché intérieur comme pilier, permet aux marchés intérieur et étranger de se renforcer mutuellement. Le nouveau paradigme appelle à la création de nouveaux pôles de croissance ainsi qu’à l’intégration des chaînes industrielles et d’approvisionnement. Dans le passé, la priorité était généralement accordée aux zones côtières en raison de la poursuite par le pays d’une économie orientée vers l’exportation. Pourtant, le ralentissement économique mondial lié à la pandémie de COVID-19, associé à l’escalade des pressions protectionnistes sur la scène du commerce international, a provoqué l’essoufflement de la sainte trinité de la croissance économique, à savoir l’investissement, l’exportation et la consommation. La Chine a la possibilité de traverser la tempête grâce à un développement régional coordonné et à une politique qui pourrait éventuellement donner libre cours à de nouvelles opportunités de croissance.

Une nouvelle perspective

Un train part de la gare de Xiongan à destination de Beijing, le 27 décembre 2020. (XINHUA)

Pour stimuler la demande intérieure, les différentes régions doivent renforcer la collaboration mutuelle, développer l’économie numérique et dégager la nouvelle route de tous les obstacles qui bloquent la circulation du personnel, des capitaux et des informations. Recourant à ses secteurs financiers et de haute technologie de pointe, la GBA est devenue la version chinoise de la Silicon Valley. Et à terme, elle deviendra leader dans l’économie numérique mondiale. En effet, cette région métropolitaine développera des usines numérisées où des robots industriels seront mis en service pour une automatisation complète. Une deuxième option sera l’introduction étendue des secteurs émergents, tels que les circuits intégrés, les véhicules à énergie renouvelable, la santé et les nouveaux matériaux. Une fois que toutes les options seront entrées dans l’équation, leurs forces associées permettront la création d’un pôle industriel pour la fabrication intelligente, ce qui stimulera l’innovation technologique dans d’autres domaines.

La formation d’agglomérations urbaines ou de zones métropolitaines peut améliorer la capacité d’une métropole à donner du pouvoir aux villes et aux zones rurales qui l’entourent. À titre d’exemple, Beijing prendra l’initiative d’améliorer les transports en accélérant la construction de chemins de fer afin de créer un réseau plus étendu et de renforcer sa position de plaque tournante de premier plan dans le domaine des transports. Au cours des dernières années, Beijing s’est engagée à se décharger de toutes les fonctions non essentielles à son rôle vital de capitale chinoise. Certaines structures industrielles ont été délocalisées du centre-ville vers ses banlieues et les villes environnantes. Le nouveau chemin de fer interurbain qui relie Beijing à la nouvelle zone de Xiongan, au Hebei, ainsi que le projet de relier Xiongan à l’aéroport international de Beijing Daxing par une ligne de métro, accélèrent cette intégration nécessaire dans la région.

La stratégie de double circulation vise à reconfigurer diverses ressources dans le cadre d’une économie numérique. Des efforts incessants doivent être déployés pour optimiser au maximum la chaîne industrielle régionale. Et la clé du succès réside dans la rationalisation de la structure industrielle ainsi que dans la promotion de l’intégration des services modernes, de l’industrie manufacturière et de l’agriculture. Le delta du Yangtsé est une région où le secteur privé est prospère. Cette zone en particulier devrait se concentrer sur le développement des industries de conception, de fabrication et de vente haut de gamme, ainsi que sur le soutien à l’agriculture, au tourisme et aux autres industries de services couvrant les zones rurales au Jiangsu, Zhejiang et Anhui.

L’ouverture comme mot d’ordre

Le protectionnisme commercial et l’anti-mondialisation sont en hausse au niveau international. Pourtant, les tendances à l’ouverture et à la coopération ont réussi à rester largement à l’écart de ces orientations politiques. Dans le nouveau modèle de développement de la Chine, les différentes régions doivent s’ouvrir de manière générale, des zones côtières aux régions intérieures, d’est en ouest. Les gouvernements locaux sont censés fournir un environnement juridique et opérationnel bien équilibré aux entreprises afin d’attirer les investissements étrangers. En outre, ils doivent établir des partenariats avec les pays et régions voisins afin de promouvoir la facilitation des échanges. Ces mesures ont pour but de parvenir à une interaction de collaboration entre les ressources et les marchés, tant au niveau national qu’international. Le développement régional coordonné de la Chine est devenu une stratégie économique tournée vers l’avenir et vers l’international, donnant accès à un énorme marché tout en offrant de nombreuses incitations aux entreprises chinoises pour qu’elles se positionnent sur la plateforme mondiale.

Pour vos commentaires : liuwei@chinafrica.cn

(Lu Yue est professeur à l’École de commerce international et d’économie, l’Université du commerce international et de l’économie (UIBE). Tian Jilin est candidat au doctorat à l’Institut chinois d’études sur l’OMC de l’UIBE.)