Les 3 et 4 septembre se sont déroulées les cérémonies d'ouverture du B20 et du G20 à Hangzhou où le président chinois a prononcé des allocutions pour y proposer les « remèdes chinois » tant attendus. Lü Ling, journaliste de Beijing Information, a interviewé Zhang Haibin, membre du Pangoal Institute et professeur de l'Académie des relations internationales de l'Université de Beijing, pour un décryptage des principales idées avancées par le président chinois et aborder les sujets concernant la gouvernance mondiale et le changement climatique.   

Beijing Information : En moins de deux jours, le président chinois Xi Jinping a prononcé deux allocutions. Quels en sont les principaux points ?  

Zhang Haibin : Pour résumer, Xi Jinping a pris le pouls des problèmes qui touchent l'économie mondiale. Il a proposé des solutions pour les résoudre et encourager une reprise forte et un développement sain. Ces solutions n'ont pas que des caractéristiques chinoises marquées, elles condensent aussi les points de vue des pays membres du G20 et des autres pays.  

Le discours de Xi Jinping lors de l'ouverture du B20 a été plus général et son contenu plus riche. Il a rappelé les réussites dans la construction économique de la Chine depuis la réforme et l'ouverture et raconté de manière objective les contributions de la Chine à l'économie mondiale par le biais du développement vert, de l'innovation, du partage équitable et de l'élargissement de l'ouverture sur l'extérieur. Son discours a tourné autour des thèmes du Sommet du G20, à savoir l'innovation, l'ouverture, l'interconnexion et l'inclusion de l'économie mondiale et appelé les membres du G20 à préserver un environnement international pacifique et stable, et établir ensemble des relations de partenariat mondial de coopération visant le résultat gagnant–gagnant ainsi qu'à améliorer ensemble la gouvernance de l'économie mondiale.   

Si l'on pouvait résumer d'un mot le discours de Xi Jinping pour l'ouverture du Sommet du G20, ce serait « pragmatique ». Il n'a pas abordé ces visions, mais a visé au cœur des problèmes : que devons–nous faire ? Il a formulé cinq propositions : 1) renforcer la coordination des politiques macroéconomiques, conjuguer les efforts pour encourager une croissance appropriée de l'économie mondiale et préserver la stabilité financière ; 2) innover dans le mode de développement et explorer les moteurs potentiels de la croissance ; 3) améliorer la gouvernance mondiale et garantir la solidité des mécanismes ; 4) construire une économie mondiale ouverte et continuer à encourager la libéralisation et la facilitation du commerce et de l'investissement et 5) mener à bien l' « Agenda 2030 » pour le développement durable et encourager le développement inclusif. Tels sont les remèdes que la Chine propose.  

Beijing Information : En tant qu'hôte du G20 cette année, quel est le rôle de la Chine et quels sont les changements par rapport aux précédentes éditions ?  

Zhang Haibin : La Chine est le pays hôte du Sommet du G20, et des réunions de niveau ministériel au discours de Xi Jinping, le pays prend une direction forte et positive dans la gouvernance économique mondiale. Depuis longtemps, il existe des différences entre les approches de la Chine et des grandes puissances occidentales dans l'influence sur l'économie mondiale. L'approche traditionnelle de la Chine était « Ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas qu'on te fasse », et donc le pays ne s'occupait que de son développement et regardait de temps à autre ce qui se passait à l'extérieur. Aujourd'hui, la Chine commence à vouloir montrer au monde son propre modèle de développement, partager son expérience et se faire l'écho des préoccupations du monde à l'égard de la Chine.  

L'économie chinoise se porte relativement bien et avec l'accroissement de son poids économique et de son influence, la Chine souhaite effectuer une contribution au monde dans le domaine économique. Des transformations positives se produisent actuellement en Chine mais les effets sont néanmoins différents par rapport aux pays occidentaux, notamment les Etats–Unis, qui ont l'habitude de faire accepter ce qu'ils considèrent comme bien, parfois par la contrainte. La Chine par contre ne force jamais les autres pays à suivre son modèle. C'est ce qui transparaît de cette édition du G20 : la Chine monte sur la scène mondiale avec un nouveau rôle crucial. Comment peut–elle y participer de manière plus profonde, c'est ce qu'elle explore. La Chine cherche la voie qui lui convient : une voie conforme à la fois aux circonstances nationales et aux intérêts mondiaux, mais qui avance aussi avec le temps. 

Beijing Information : La veille du Sommet du G20, la Chine et les Etats–Unis ont déposé ensemble aux Nations unies leurs instruments de ratification de l'Accord de Paris sur le climat. Quelle signification cela revêt–il ?  

Zhang Haibin : Le fait que la Chine et les Etats–Unis ont déposé ensemble les instruments de ratification ratifié l'Accord de Paris revêt une signification importante,  car cela survient alors que le monde entier a son regard tourné vers le Sommet du G20.  J'y vois quatre significations.  

Premièrement, cela montre une nouvelle fois le rôle essentiel que jouent la Chine et les Etats–Unis en termes de leadership sur la question du changement climatique. Il est de notoriété publique que les déclarations conjointes concernant le climat de la Chine et des Etats–Unis en 2014 et en 2015 ont jeté les bases de la réussite de la Conférence de Paris sur le climat, ont ravivé la conviction de la communauté internationale et permis de régler les problèmes épineux.  

Deuxièmement, dans un contexte récent d'accroissement de la concurrence et des différends entre les deux pays,  ils ont quand même choisi d'agir ensemble. Cela montre que la Chine et les Etats–Unis veulent coopérer dans les questions internationales importantes.  

Si la concurrence existe, il faut voir les deux faces de la médaille, ne pas être trop pessimiste, car il y a une composante de coopération et son potentiel doit être encore exploré. Ce geste récent ravive la confiance dans les relations sino–américaines, ce qui nous fait voir les relations bilatérales de manière plus équilibrée, plus objective et plus globale.  

Troisièmement, cela montre qu'en prenant une telle initiative avant le Sommet du G20, la Chine et les Etats–Unis veulent que l'Accord de Paris prenne effet et soit mis en œuvre le plus rapidement possible. Les deux pays représentent quelque 40 % des émissions de CO2 et le dépôt des instruments aura sans aucun doute un effet d'entraînement puissant.  

Quatrièmement, si l'on se place dans la cadre de la gouvernance internationale et de la mondialisation, alors que l'économie mondiale peine à se relever et que les risques géopolitiques sont élevés, l'opinion publique reste pessimiste et les incertitudes sont nombreuses. Cela montre que les gens ne doivent pas seulement voir les problèmes, mais aussi les perspectives de coopération. Cela donne confiance au monde : la Chine et les Etats–Unis, en tant que grandes puissances, sont désireuses et ont le pouvoir de faire avancer la gouvernance mondiale.