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Publié le 02/09/2011
Ici la Chine !

Ali Ali

Au cours des dix dernières années, la présence africaine en Chine a connu une véritable métamorphose, passant d'un petit groupe d'étudiants internationaux à une florissante communauté de commerçants et d'entrepreneurs, dont l'activité consiste essentiellement à envoyer sur le continent les marchandises de l'Empire du Milieu. Ce que l'on sait moins, c'est que la communauté africaine en Chine compte aussi des restaurateurs, dont les petits plats ensoleillés ont réussi à piquer la curiosité gustative des gourmets chinois.

Rose Lin Zamoa fait partie de ceux-là. Ayant commencé à étudier le chinois à Londres, elle est aujourd'hui à la tête de plusieurs affaires prospères dans la capitale chinoise. 

La Chine en tête

Zamoa, 31 ans, est née dans la région de Brong-Ahafo au Ghana, en Afrique de l'Ouest. Elle s'est installée à Londres avec sa famille à l'âge de 14 ans. Passionnée par la cuisine, elle en fit sa profession après une formation de deux ans et demi à l'École culinaire du Barking College, dans l'est de la capitale britannique.

« À cette époque, je me suis inscrite à un programme d'enrichissement, qui offrait l'opportunité d'apprendre une nouvelle langue. J'avais toujours été intriguée par les caractères chinois, bien avant d'avoir entendu parler de ce programme. Or il se trouve que le chinois figurait parmi les choix possibles, j'ai donc voulu essayer. Je suis allée au cours et je me suis retrouvée toute seule. Ma professeure était une Anglaise et je me suis dit "si elle y est arrivée, pourquoi pas moi !" Cela m'a donné du courage », se souvient Zamoa.

En avril 2007, elle a décidé d'examiner les opportunités offertes par la Chine en visitant le pays. à Guangzhou, elle prit contact avec l'énergique communauté africaine, dont les membres lui conseillèrent de parfaire son chinois en visitant Beijing. En septembre de la même année, c'est exactement ce qu'elle fit et s'inscrivit à des cours de chinois au sein de la Beijing International Studies University (anciennement connue sous le nom de Beijing Second Foreign Languages Institute). Ayant obtenu de très bons résultats, elle bénéficia d'une bourse d'études d'un an, afin d'approfondir ses études de langue.

Venue en Chine avec quantité d'épices exotiques, Zamoa commença à cuisiner des plats afro-caribéens pour ses camarades de classe. Son « poulet jerk » devint tellement populaire, que pour plaisanter, elle informa ses camarades qu'ils allaient désormais devoir payer !

 

 Une table joliment décorée de la cuisine privée de Rose

Les débuts

Poussée par les encouragements de sa clientèle grossissante, Zamoa commença à réaliser qu'il y avait effectivement un marché pour sa cuisine. « Il y avait déjà quelques restaurants africains à Beijing, mais aucun ne combinait cuisine africaine et des Caraïbes. Ma cuisine africaine s'adresse davantage aux communautés ghanéennes et nigérianes de Beijing, tandis que les plats des Caraïbes intéressent plus la communauté de l'espace caraïbe. La combinaison des deux s'est révélée populaire auprès des clients chinois », explique Zamoa.

Dès lors, Zamoa se mit à cuisiner très tôt le matin pour préparer quelques plats et les livrer à des clients dans son université. Comme elle commençait à avoir beaucoup de travail, elle recruta quelqu'un pour l'aider à préparer les commandes. Après quatre mois, ses affaires s'étaient développées dans plusieurs autres universités et Zamoa se mit à réfléchir à d'autres moyens pour trouver des fonds et développer sa petite entreprise.

Elle investit par la suite 50 000 yuans (7 700 dollars) de ses économies pour ouvrir sa propre école maternelle de langue anglaise. Elle loua un appartement de cinq chambres près de son université, elle recruta plusieurs de ses camarades comme enseignants et rapidement, la petite école accueillit 16 élèves. Ne s'arrêtant pas en si bon chemin, elle ouvrit même son propre club de sport. Zamoa jonglait ainsi désormais entre son activité d'enseignante, son entreprise de traiteur, ses études et son club de sport, ce qui se révéla être trop pour elle.

L'activité de traiteur étant à ses yeux prioritaire, elle confia la gestion de l'école maternelle à une de ses connaissances et trouva un emploi dans un restaurant de l'arrondissement de Shijingshan, dans l'ouest de Beijing. Elle devait néanmoins continuer à assister à ses cours de chinois et le trajet quotidien de deux heures entre les deux fut bientôt trop fatigant.

« C'est alors que j'ai décidé d'ouvrir ma propre cuisine privée. Les cuisines privées sont déjà très populaires à Hong Kong. C'est un concept très intéressant, car cela permet aux clients de faire un repas privé », explique Zamoa.

 Les « patties », de petits chaussons à la viande, spécialité africaine

Private Kitchen

La cuisine privée de Zamoa, tout simplement baptisée « Private Kitchen » est située près du pittoresque parc Chaoyang, dans l'est de Beijing. Ouverte en 2009, elle compte aujourd'hui cinq employés à temps plein et prépare des repas pour des fêtes privées et des repas d'affaires, sept jours sur sept. Zamoa reste fidèle à ses principes de départ en ce qui concerne la gestion de son affaire et effectue des livraisons dans de nombreux arrondissements de Beijing.

« Je me lève tous les jours comme avant et je cuisine des quantités précises. J'avais l'habitude de faire les livraisons moi-même, mais j'ai désormais quatre employés qui m'aident à gérer les commandes », explique Zamoa, tout en préparant un festin fusion de cuisine afro-caribéenne pour CHINAFRIQUE.

L'agréable sensation d'un repas « comme à la maison » que l'on éprouve à Private Kitchen en a fait une alternative populaire aux quartiers bruyants où sont généralement situés les restaurants africains de Beijing. Petite enclave de cuisine et d'art africains juxtaposée sur un environnement chinois, Private Kitchen donne l'impression qu'un bout d'Afrique a été déposée en plein cœur de la capitale chinoise.

Zamoa est une véritable force de la nature dans son domaine. Cherchant toujours à élargir ses horizons, elle évoque ses multiples projets d'avenir.

« J'aimerais beaucoup transformer mon affaire en un restaurant », confie-t-elle. En attendant, elle est en train d'ouvrir une autre cuisine dans un centre commercial de meubles près de Gaobeidian. « Je pense qu'un quartier de hutong (vieilles petites rues de Beijing) serait un lieu plus approprié pour installer une cuisine privée, car cela amènerait plus de caractère. J'ai également monté une boulangerie-pâtisserie à Shunyi et j'ai l'intention de faire venir deux travailleurs du Ghana pour m'aider à gérer mes affaires », précise Zamoa.



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