Commentateur spécial du «Renmin Ribao»
Du 18 au 22 décembre 1978 a eu lieu la 3e session plénière du Comité central issu du 11e congrès du Parti communiste chinois. Un aspect de sa portée historique était de renouer avec la tradition démocratique.
Dans le passé, le mouvement de rectification du style de travail en 1942 et la conférence de travail élargie du Comité central en 1962 furent des exemples de vie démocratique dans le Parti, qui assurèrent les succès de la révolution et de l'édification socialistes.
Pourquoi le grand Parti communiste chinois a-t-il pu tolérer pendant dix ans les agissements tyranniques de Lin Biao et des Quatre? La raison fondamentale en a été l'absence de démocratie en son sein.
POUR s'emparer du pouvoir, Lin Biao et les Quatre ont bafoué la démocratie, sapé la légalité et exercé «une implacable dictature fasciste dans tous les domaines» pendant dix ans, de sorte que les activités politiques ont été perturbées à l'intérieur comme à l'extérieur du Parti. Pour mettre fin au désordre et réaliser rapidement les quatre modernisations, il est urgent, sur le plan politique, d'assurer la vie démocratique du Parti et de développer le mieux possible la démocratie socialiste.
Rôle décisif du Comité central du. Parti
Le Parti communiste chinois, parti au pouvoir, assure la direction dans tous les domaines. Si ses cadres ne comprennent pas ce qu'est le centralisme démocratique et que sa vie démocratique est perturbée, la démocratie et la légalité dans les activités de l'Etat ne pourront exister que de nom. En effet, la discipline du Parti est la suivante: l'échelon inférieur se soumet à l'échelon supérieur et l'ensemble du Parti au Comité central. S'il n'y a pas de démocratie dans les organisations de l'échelon inférieur, on peut y remédier à condition que l'organisation de l'échelon supérieur suive une ligne correcte. Mais si on est privé de démocratie à l'échelon supérieur et surtout au Comité central du Parti, cela aura de graves répercussions sur l'ensemble, et il sera difficile d'y remédier. C'est pourquoi la vie démocratique du Comité central est un facteur décisif, c'est même la clé du problèàme.
C'est ce qui a été prouvé par l'expérience historique du Parti. Quand son comité central pratique la démocratie en son sein, la juste ligne s'applique sans heurt, la révolution va bon train, et le Parti gagne en force et en prestige. En revanche, quand la vie politique n'est pas normale au Comité central et que des contre-révolutionnaires comme Lin Biao et les Quatre sabotent sans scrupule le centralisme démocratique, la révolution subit de graves revers.
Pendant la période de la révolution démocratique, la ligne opportuniste «de gauche» de Wang Ming prédomina très longtemps au Comité central et causa de lourdes pertes au Parti. Pour pratiquer leur ligne erronée sur les plans politique, militaire et idéologique, Wang Ming et consorts employèrent des méthodes antidémocratiques dans la lutte au sein du Parti et appliquèrent une politique sectaire à l'égard des cadres. «La résolution sur certains problèmes historiques» adoptée en 1945 lors de la 7e session plénière du Comité central issu du 6e congrès fit une analyse correcte de la situation d'alors.
«En vue d'atteindre leur objectif, les représentants de la troisième ligne déviationniste «de gauche» utilisèrent des étiquettes comme «opportunistes de droite», «partisans de la ligne des paysans riches», «partisans de la ligne de Luo Ming» [1], «conciliateurs», «hypocrites», etc. pour mener une «lutte farouche» contre tous ceux qui, en raison de l'absurdité pratique de la ligne erronnée «de gauche», en doutaient, ou la désapprouvaient, ou en étaient mécontents, ou ne la soutenaient pas de façon active, ou l'appliquaient d'une manière insuffisamment résolue. Ils leur portaient des «coups impitoyables» et recouraient, même dans cette «lutte à l'intérieur du Parti», à des procédés qu'on ne peut employer qu'à l'égard de criminels et d'ennemis, Le recours à cette lutte erronée à l'intérieur du Parti devint pour les membres du Parti qui dirigeaient ou appliquaient la ligne déviationniste «de gauche» une méthode constante servant à rehausser leur propre prestige, à réaliser leurs exigences et à intimider les membres de la base et les cadrs du Parti. Cette lutte sapait les principes fondamentaux du centralisme démocratique à l'intérieur du Parti, étouffait l'esprit démocratique de critique et d'autocritique dans le Parti, transformait la discipline du Parti en une discipline mécanique, développait dans le Parti la tendance à l'obéissance et à l'approbation aveugles et, de cette manière, portait un coup au développement, dans le Parti, d'un marxisme vivant, créateur, et freinait son développement. Les méthodes incorrectes de lutte à l'intérieur du Parti se combinaient à une politique sectaire à l'égard des cadres. Les sectaires ne considéraient pas les vieux cadres comme le fonds d'or du Parti; aussi bien au sommet que dans les organisations locales, ils frappaient, sanctionnaient, déplaçaient sans discrimination tous les vieux cadres expérimentés, liés aux masses, qui ne leur plaisaient pas ou qui refusaient de leur obéir et de les approuver aveuglément. Ils ne donnaient pas une éducation correcte aux jeunes cadres. Au lieu de se consacrer sérieusement à la promotion de nouveaux cadres (en particulier parmi les ouvriers), ils mettaient inconsidérément à la place des vieux cadres, au sommet comme dans les organisations locales, des nouveaux militants pris sur place ou des militants venus d'ailleurs qui leur plaisaient, qui leur obéissaient ou qui les approuvaient aveuglément, bien que ces militants n'aient aucune expérience du travail et ne soient pas liés aux masses. De cette manière, simultanément, ils frappaient les cadres anciens et nuisaient aux nouveaux. Qui plus est, dans de nombreuses régions, la politique erronée relative à l'élimination des éléments contre-révolutionnaires se combinait à une politique sectaire à l'égard des cadres; bon nombre de nos meilleurs camarades furent ainsi injustement sanctionnés et persécutés.
Le résultat, c'est que le Parti a subi des pertes déplorables. Ces erreurs sectaires engendrèrent dans le Parti une rupture entre échelon supérieur et échelon inférieur et toutes sortes d'autres phénomènes anormaux qui affaiblirent à l'extrême le Parti.» (Voir Œuvres choisies de Mao Zedong, édition chinoise, tome III).
Exemple de démocratie au sein du Parti
A la conférence de Zunyi en 1935, le Parti adopta la juste ligne du camarade Mao Zedong. Pour éliminer l'influence de la ligne de Wang Ming, le Comité central dirigé par le camarade Mao Zedong poursuivit durant des années d'importants travaux préparatoires Le Parti lança en 1942 le mouvement de rectification du style de travail, s'opposant au subjectivisme, au sectarisme et au style stéréotypé. En même temps, de 1942 à 1944, les membres du Bureau politique, puis les cadres supérieurs se réunirent pour discuter de l'histoire du Parti, en particulier pour la période du début de 1931 à la fin de 1934, quand prédominait la ligne de Wang Ming. Lors des discussions, on développait la démocratie et on pratiquait sérieusement la critique et l'autocritique. Quant à la ligne erronée, on analysa particulièrement ses circonstances, son contenu, et ses origines sociales, historiques et idéologiques, sans mettre directement en cause tel ou tel camarade. Selon la méthode marxiste, on passait les problèmes au crible, en se gardant de tout approuver ou de tout rejeter. On cherchait la vérité à partir des faits. Après avoir recueilli les divers avis sur la base d'une ample démocratie, on faisait un bilan scientifique des problèmes apparus durant la période où sévissait la ligne de Wang Ming. Cela permettait d'aboutir à une vision commune et d'élever le niveau de conscience marxiste de tous. Ce fut le premier grand mouvement démocratique. Il servit de modèle pour engager correctement la lutte, l'éducation et l'activité politique au sein du Parti. L'unité du Parti, réalisée ainsi sur les plans idéologique et politique, nous permit de gagner en quelques années la guerre de résistance contre le Japon et la guerre de libération, et de remporter rapidement, après 1949, d'importants succès dans la révolution et l'édification socialistes.
Mais, de 1958 à 1962, nous avons subi de grands revers et rencontré de grandes difficultés dans l'économie nationale. Pourquoi cela? Il y a eu des facteurs subjectifs et objectifs, mais l'important fut que la vie démocratique du Parti était perturbée, et que le centralisme démocratique se trouvait gravement saboté. Rejetant le style d'enquête, d'étude et de recherche de la vérité à partir des faits, certains cadres dirigeants donnaient des ordres arbitraires. Ils refusaient les critiques et les opinions différentes des leurs. Ils accusaient les gens en leur collant des étiquettes. Ainsi, certaines erreurs dans le travail, faciles à corriger, au lieu d'être éliminées, se sont aggravées jour après jour.
En 1962 eut lieu une conférence de travail élargie du Comité central, avec la participation de 7 000 secrétaires de district et cadres des échelons supérieurs au district. Le Comité central y affirma «trois garanties»: ne pas exploiter les insuffisances d'autrui, ni coller d'étiquettes politiques, ni brandir de bâtons; ainsi, les participants pourraient exprimer librement leurs opinions. Le camarade Mao Zedong prononça un important discours sur le problème du centralisme démocratique. Il expliqua longuement l'importance du principe: sans démocratie, impossible de parvenir à un centralisme correct. Il se déclara responsable des activités menées jusqu'alors, donnant ainsi l'exemple à tous. Il évoqua les rapports dialectiques entre liberté et nécessité, pour affirmer que notre connaissance des lois régissant l'édification socialiste était insuffisante et que dans une large mesure nous travaillions à l'aveuglette. Il demanda à tous les camarades du Parti d'aller parmi les masses, de procéder à des enquêtes et à des recherches minutieuses, afin de dégager les lois de développement de la réalité.
Une fois de plus, le Comité central du Parti avait donné libre cours à la démocratie durant la conférence, et les cadres de tous les échelons ont alors popularisé dans l'ensemble du Parti le style de démocratie qu'ils avaient pratiqué à la conférence. Du Comité central, la démocratie a passé à l'ensemble du Parti, et de là à toute la société. Ce dynamisme nous a permis de surmonter rapidement les difficultés d'alors et de relancer la construction socialiste.
Pourquoi Lin Biao et les Quatre ont-ils pu imposer leur loi pendant dix ans?
S'étant emparés d'une partie de la direction du Parti et de la Grande Révolution culturelle, Lin Biao et les Quatre s'en sont pris à la démocratie existant depuis cette conférence, à l'intérieur comme à l'extérieur du Parti. Inversant les rôles dans les rapports entre l'ennemi et nous, ils ont exagéré démesurément les erreurs commises par de vieux cadres et de bons camarades. Ils les ont incriminés, ont établi des juridictions irrégulières et persécuté les membres de leurs familles et leurs proches. Ainsi, des dizaines de millions de personnes ont subi des injustices.
Faisant fi du sens du Parti, ils ont encouragé les activités fractionnelles et incité une partie des masses à lutter contre une autre. Pendant une certaine période, ils ont interrompu les activités du Parti, mis le chaos dans le pays et fait régner une terreur blanche.
Partisans du pragmatisme, ils ont traité la pensée-maozedong et les paroles du camarade Mao Zedong comme des tabous et établi des «zones interdites», de manière à museler les communistes comme les non communistes, les plus hauts dirigeants comme les masses. Si l'on ne pratique pas la démocratie au sein du peuple et du Parti, «la dictature du prolétariat se transformera en dictature bourgeoise, et ce sera même une dictature réactionnaire de type fasciste». Ce pronostic du camarade Mao Zedong lors de la conférence des 7 000 cadres est devenue réalité entre les mains de Lin Biao et des Quatre.
Plus on avance dans la critique de Lin Biao et des Quatre, plus on se pose cette question: pourquoi leurs agissements tyranniques au sein de notre grand parti ont-ils pu durer dix ans? Il existe des dizaines de millions de membres du Parti communiste, dont bon nombre de vieux cadres vétérans. Ils ont su affronter les réactionnaires du Guomindang et l'impérialisme. Comment se fait-il qu'ils aient été réduits à l'impuissance par des clowns comme Lin Biao et les Quatre? Quelle leçon faut-il en tirer? Il n'y a qu'une réponse: depuis de longues années, la vie politique du Parti se trouvait faussée, l'absence de démocratie au sein du Parti s'était répercutée dans la société. C'est pourquoi nous devons maintenant nous inspirer de cette expérience fondamentale et assurer la vie démocratique du Parti.
Portée historique de la 3e session pléniére
Après la chute des Quatre, le Comité central du Parti a pris une série de mesures importantes pour liquider l'influence néfaste de Lin Biao et des Quatre. La ligne, les principes et les mesures politiques marxistes ayant été définis lors du 11e congrès du Parti et de la 5e Assemblée populaire nationale, l'économie s'est rapidement développée et une bonne situation est apparue, marquée par la stabilité et l'unité. Le Comité central a demandé qu'on reprenne la ligne de masse et la recherche de la vérité à partir des faits. Il a demandé qu'on saisisse et applique intégralement et exactement la pensée-maozedong et qu'on corrige les erreurs. Il a progressivement annulé les accusations injustes lancées par Lin Biao et les Quatre. Tout cela est très important pour assurer la démocratie et favoriser la vie politique du Parti. En particulier, les discussions menées ces six derniers mois sur l'affirmation que la pratique constitue le seul critère de la vérité ont joué un rôle positif dans la libération idéologique et l'élimination des tabous. Mais jusqu'à présent, ce n'est qu'un petit nombre de personnes qui ont l'esprit libre, tandis que de nombreux cadres, en particulier certains cadres supérieurs, sont en proie à l'inquiétude, regardent à gauche et à droite, et ne défendent pas les principes ni la vérité. Sans libération idéologique ni démocratie, le bureaucratisme entravera la réalisation des quatre modernisations.
C'est justement dans cette conjoncture qu'ont eu lieu la conférence de travail et la 3e session pléniére du Comité central du Parti. Reprenant la bonne tradition de Yan'an, cette dernière s'est déroulée dans une atmosphère dynamique où les participants ont librement exprimé leurs opinions. Les cadres supérieurs du Parti ont été les premiers à adopter cette position de principe: défendre la vérité et corriger les erreurs. Cela a délié la langue de ceux qui n'osaient pas parler. Les problèmes jugés impossibles à résoudre ont été réglés ou du moins posés. Avec un esprit libre, les participants ont réfléchi et formulé des méthodes et des suggestions pour améliorer notre travail et réaliser rapidement les quatre modernisations C'est précisément sur la base d'une telle démocratie que la session a adopté de nombreuses résolutions importantes. Elle a décidé de développer ce type de démocratie dans l'ensemble du Parti et de l'armée, ainsi qu'au sein du peuple. Cette décision doit être appliquée.
Cette session revêt une portée profonde et durable dans l'histoire de notre Parti. Une résolution historique y a été adoptée: centrer les activités du Parti sur la réalisation des quatre modernisations, avec des garanties sûres, en développant la démocratie au sein du Parti, et surtout en assurant la vie démocratique du Comité central.
Il y a 40 ans, le camarade Mao Zedong disait: «Dans notre pays prédomine le système patriarcal propre à la petite production et, de plus, il n'y existe pas encore de vie démocratique à l'échelle nationale. Cela se reflète dans notre parti sous forme d'une vie démocratique insuffisante, qui l'empêche de déployer pleinement son initiative et qui entraîne également une démocratie insuffisante au sein du front uni et dans les mouvements de masse.» («Le rôle du Parti communiste chinois dans la guerre nationale») Depuis lors, nous avons rencontré pas mal de questions à ce sujet. Même aujourd'hui, le problème n'a pas été complètement résolu. La réalité nous oblige maintenant à le régler à fond. Le Comité central du Parti vient de donner l'exemple. Tout le Parti doit le suivre, en pratiquant la démocratie et en développant sa vie politique. Si cela se fait, notre parti aura un bel avenir et les quatre modernisations seront réalisées.
(Article du «Renmin Ribao» en date du 11 janvier, avec un résumé en tête et des intertitres de «B. I.»)