Chine-USA: respect, confiance et engagement |
Tenir compte des intérêts cruciaux de l'autre constitue la base des relations militaires entre la Chine et les Etats-Unis Liu Xuecheng, chercheur à l'Institut d'études internationales de Chine Suite au naufrage du Cheonan, les Etats-Unis et la RDC ont envisagé d'organiser un exercice militaire en mer Jaune, juste devant la porte maritime de la Chine. Le 8 juillet, la Chine a réaffirmé son ferme opposition à l'entrée de tout navire de guerre ou avion étranger susceptible d'attenter tant à sa sécurité qu'à ses intérêts en mer Jaune, ainsi que dans les eaux proches. Depuis le début de cette année, les relations sino-américaines ont connu des fluctuations dramatiques. Il en a été de même pour leurs rapports militaires. En janvier, l'administration Obama a annoncé la vente à Taiwan, d'une série d'armes et d'équipements sophistiqués, dont des missiles Patriot, pour un montant global de 6,5 milliards de dollars. Cette action, qui a porté atteinte aux intérêts cruciaux de la Chine, a eu pour conséquence une nouvelle suspension des échanges militaires entre Beijing et Washington, lesquels venaient tout juste d'être rétablis. Pour la Chine, les ventes d'armes à Taiwan sont l'un des obstacles principaux au développement des relations militaires entre les deux pays. Et ce sont les Etats-Unis qui ont érigé cette barrière, pas la Chine. Une promesse violée Rétrospectivement, les Etats-Unis ont été responsables d'une série de suspensions des échanges militaires sino-américains depuis la fin de la guerre froide. Par exemple, au milieu des années 1990, en dépit de l'opposition de Beijing, Washington a tenu à inviter Lee Teng-hui, ancien leader pro-indépendance de Taiwan, à faire une visite, ce qui a provoqué des tensions entre les deux rives du détroit de Taiwan. En 1999, les forces de l'OTAN, dirigées par les Etats-Unis, ont bombardé l'ambassade de Chine à Belgrade. Deux ans après, un avion militaire américain a heurté un avion de chasse chinois, en effectuant un vol espion au-dessus d'une zone économique exclusive chinoise près de l'île Hainan, dans le sud de la Chine. Peu avant la fin de son mandat, l'ex-président américain George W. Bush a annoncé une vente d'armes à Taiwan en 2008, ce qui fut à l'origine d'une autre suspension des échanges militaires entre Beijing et Washington. Les échanges ont repris quand Xu Caihou, vice-président de la Commission militaire centrale de Chine, a fait une visite aux Etats-Unis. Cependant, les relations militaires entre les deux pays ont de nouveau été interrompues après l'annonce de la vente d'armes à Taiwan par l'administration Obama en janvier dernier. De plus, les Etats-Unis et leurs alliés ont imposé depuis longtemps un embargo sur les armes et équipements à double usage (militaire et civil) à destination de la Chine. Mao Xiaotian, chef ajoint de l'Etat-major général de l'Armée populaire de Libération (APL) de Chine, a dit que la stagnation des relations militaires bilatérales était imputable aux Etats-Unis. Lors de la Conférence asiatique sur la sécurité tenue à Singapour en juin dernier, il a précisé que la partie américaine avait dressé trois barrières. La première fut de vendre à Taiwan des armes de haute qualité en quantité croissante, à l'encontre de la souveraineté nationale et de l'intégrité territoriale de la Chine ; la deuxième d'envoyer des bateaux et avions en mer de Chine orientale et en mer de Chine méridionale à des fins de renseignement et de surveillance ; et la troisième d'imposer, par la législation, des limites aux échanges militaires sino-américains dans douze secteurs. Les Etats-Unis avaient promis de réduire leurs ventes d'armes à Taiwan dans trois communiqués conjoints sino-américains, notamment dans celui qui fut signé le 17 août 1982, trois ans après l'établissement des relations diplomatiques entre les deux pays. Dans le communiqué, le gouvernement américain avait déclaré que « ses ventes d'armes à Taiwan ne dépasseraient pas, tant du point de vue qualitatif que quantitatif, le niveau de celles effectuées ces dernières années, depuis l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et les Etats-Unis, et qu'il avait l'intention de réduire graduellement ses ventes d'armes à Taiwan, pour aboutir, dans un certain temps, à une solution finale ». Néanmoins, Washington n'a jamais honoré son engagement. Lors d'une audience du Sénat tenue le 17 juin, la sénatrice démocrate Dianne Feinstein a dit que les ventes d'armes américaines à Taiwan étaient un obstacle substantiel pour les relations entre Washington et Beijing, et qu'elles le seraient toujours à l'avenir. En réponse aux questions de la sénatrice, le secrétaire à la Défense Robert Gates a exprimé qu'il appartenait au Congrès et à la Maison blanche de décider s'il fallait changer ou non la manière de vendre. « Les décisions sur les ventes d'armes à Taiwan sont fondamentalement politiques », a-t-il ajouté. Tous ces exemples montrent qu'il ne faut pas attribuer à la Chine la responsabilité des barrières dans les relations militaires entre Beijing et Washington. Le gouvernement chinois n'a cessé de pousser les Etats-Unis à honorer leurs engagements. Face au gouvernement américain déguisé en défenseur de la morale mais qui ne tient pas ses promesses, la réaction de la Chine, c'est-à-dire protestation et suspension des échanges militaires, est tout à fait compréhensible. Querelles de transparence Avec les progrès de la Chine dans la modernisation de sa défense nationale, les Etats-Unis ont accordé une attention croissante à la puissance militaire chinoise. Leurs soupçons sur les intentions stratégiques de l'APL se sont également multipliés. Les fonctionnaires américains se sont plaints à diverses occasions du manque de transparence dans les affaires militaires chinoises, tout en exigeant du gouvernement chinois la divulgation de son budget militaire, de ses programmes de nouvelles armes, et de ses achats d'armements. A la différence des Etats-Unis qui sont toujours préoccupés par les détails de la capacité militaire, la Chine insiste sur la priorité aux stratégies de sécurité et aux intentions stratégiques en termes de transparence militaire. L'APL l'a d'ailleurs déjà clairement précisé par la publication de livres blancs et la tenue de conférences de presse. Selon Ma Xiaotian, la Chine a trois objectifs concernant la stratégie de sécurité dans l'Asie Pacifique, à savoir protéger la sécurité et le développement du pays, assurer une paix durable et une prospérité commune dans la région, ainsi que promouvoir l'harmonie régionale. La Chine a toujours préconisé que les décideurs chinois et américains traitent les relations militaires bilatérales dans une perspective stratégique. Autrement dit, les deux pays devraient renforcer les échanges et la coopération en matière militaire pour le maintien de la stabilité en l'Asie pacifique et dans le monde. Cependant, les Etats-Unis restent sceptiques. A cause d'idées préconçues sur la modernisation de l'armée chinoise, ils remettent en cause les motifs et les objectifs du développement des forces militaires chinoises, faisant souvent des remarques irresponsables sur la transparence militaire. En raison de l'absence de confiance mutuelle au niveau stratégique, la soi-disant transparence militaire continue à perturber les relations militaires entre la Chine et les Etats-Unis. Bien que les deux pays aient publié chacun un document sur leur propre défense (livre blanc sur la défense nationale de la Chine et QDR (Examen quadriennal de la défense) des Etats-Unis), ils n'ont pas le même but sur la transparence militaire. La Chine vise à augmenter la confiance mutuelle tout en dissipant des soupçons, alors que les Etats-Unis cherchent à intimider leurs adversaires en faisant parade de leurs forces militaires. Briser le cycle Depuis l'établissement des relations diplomatiques il y a plus de 30 ans, les relations militaires entre Beijing et Washington ont évolué au gré des suspensions. Les efforts visant à briser ce cycle vicieux n'ont abouti à aucun bon résultat. La Chine considère les rapports entre les deux armées comme une partie importante des relations sino-américaines, œuvrant à nouer et développer des liens militaires avec les Etats-Unis. Au cours des décennies passées, les forces armées des deux pays ont entamé des échanges et une coopération dans divers domaines, allant de l'échange de visites au niveau élevé à la consultation de la défense, en passant par le partage des connaissances professionnelles. De plus, leurs marines ont conjointement organisé des exercices de secours et de sauvetage, en plus de la mise en place d'un mécanisme de discussion sur la sécurité militaire en haute mer. Par ailleurs, une hotline a été établie entre le ministère chinois de la Défense nationale et le Pentagone. A vrai dire, un développement stable entre les deux armées correspond aux intérêts des deux nations et contribue à la paix et à la stabilité dans l'Asie pacifique et dans le monde entier. Alors que la Chine est déterminée à faire progresser ses relations avec les Etats-Unis, ceux-ci continuent à critiquer, d'un ton arrogant, la modernisation de la défense chinoise. Du fait que les relations sino-américaines sont maintenant dans une nouvelle ère, de nouvelles idées et mesures sont nécessaires pour garantir le développement stable et ininterrompu des rapports militaires entre les deux pays. A cet effet, les armées chinoise et américaine devraient conjointement consacrer des efforts à l'établissement d'une confiance mutuelle par le renforcement d'échanges. En travaillant main dans la main, elles devraient prendre en compte les intérêts vitaux de l'autre et aborder convenablement les questions sensibles dans les relations bilatérales. Beijing Information |