Zhang Weiwei
La Chine se distingue des autres pays par sa configuration politique unique qui résulte de sa gigantesque population, de son vaste territoire, de sa longue histoire et de sa très riche culture. Dans l'Histoire, aucun gouvernement du pays ne put se dispenser du souci du bien-être de son peuple, d'événements pénibles et de défis spéciaux provenus de l'envergure démographique et territoriale, par crainte de perdre la légitimité du pouvoir. Au fil du temps, les Chinois commencent à avoir leurs propres valeurs politiques et culturelles, lesquelles insistent sur les visions lointaines et les effets complets. Depuis longtemps, prospérité, paix et stabilité sont au centre de la mentalité chinoise, et les dynasties glorieuses sont souvent liées à des pouvoirs forts et éclairés.
Dire que seul le pluripartisme est légitime est un concept politique extrêmement superficiel. Aujourd'hui, le parti au pouvoir en Chine est différent de ceux de l'Occident, il est en fait une prolongation de la tradition confucéenne du mandarinat, et non une organisation qui représente des groupes d'intérêts différents qui cherchent à conquérir et à exercer le pouvoir. Si la Chine introduisait le pluripartisme à l'occidentale, elle risquerait de se trouver en pleine division. Le chaos de la guerre qui balaya le pays après la révolution de 1911 en est un exemple pertinent.
En regardant l'Histoire, on se rend compte que la légitimité commune est la légitimité d'ordre historique. Celle du pouvoir chinois est caractérisée par l'élitisme et la priorité à l'aspiration commune du peuple. C'est pour cela que la Chine a largement devancé les autres pays du monde pendant une longue période dans son Histoire cinq fois millénaire. Ces deux concepts constituent la cristallisation de la sagesse politique de la nation chinoise et l'un des principaux aspects de la compétitivité du modèle chinois.
Le sonderfall politique chinois se traduit aussi par la magnanimité. Force est de constater l'existence du système d'Etats vassaux et du système de préfectures et comtés dans le passé et l'application du principe d'« un pays, deux systèmes » et du système d'autonomie régionale à l'heure actuelle. Maintenant, la partie continentale de la Chine a des relations économiques plus étroites avec Hongkong et Macao, faisant entrer en vigueur son accord-cadre de coopération économique avec Taiwan. Tout au long de l'application de la réforme et de l'ouverture depuis une trentaine d'années, la Chine a permis à des régions de s'enrichir en premier afin qu'elles jouent un rôle d'exemple pour les autres régions. Ce concept inimaginable pour les autres pays ne produit qu'un meilleur effet : en Chine, 1+1>2.
La culture politique chinoise compte des valeurs telles que « tenir compte de l'ensemble du pays » et « quand un endroit se trouve dans une situation difficile, l'aide lui parviendra de partout ». En apparence, ces concepts traduisent le centralisme, mais toutes les réformes lancées en Chine le sont à titre expérimental, puis s'étendent progressivement conformément aux conditions spécifiques régionales et se concurrencent tout en se complémentant. Tous situés sur le delta du fleuve Yangtsé, Shanghai, le Jiangsu et le Zhejiang se distinguent les uns des autres par leurs modèles de développement : les trois facteurs composant l'économie de marché (gouvernement, marché et société) jouent un rôle qui varie d'une région à l'autre, à quoi il faut ajouter leurs structures économiques diversifiées. A vrai dire, il en est de même pour toute la Chine, dont les différentes régions rivalisent tout en travaillant en collaboration pour créer des miracles.
En somme, la Chine apprend de l'Occident la mise en place d'un système gouvernemental puissant, conformément au bon usage de ses ressources politiques et culturelles uniques. Ce « mariage mixte » permettra de surmonter plus facilement les difficultés qui rongent la démocratie occidentale comme le populisme, la myopie et le légalisme. Je suis persuadé que tout le monde se rendra compte du rôle positif de la sagesse politique chinoise pour l'avenir de l'humanité.
(L'auteur est professeur invité à l'Université Fudan, chercheur supérieur à l'Institut du Printemps et de l'Automne et au Centre de recherche sur l'Asie moderne de l'Université de Genève)
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