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M. Jean-François Sirinelli |
M. Jean-François Sirinelli, professeur des universités à l'institut d'études politiques de Paris et directeur du Centre d'histoire de Sciences Po, fut le deuxième intervenant. En une heure et demie, il a abordé « La République française face aux crises du XXe siècle ». Deux principes ont émergé de sa prestation : la complexité de la réalité historique et la diversité des interprétations d'un même phénomène. Depuis le début du XXe siècle jusqu'à aujourd'hui, la République française a réagi de façon différente à pas mal de crises et défis qui s'avéraient tous très complexes. Son emploi de nombreuses expressions imagées comme « écosystème » ou « métabolisme » a passionné ses collègues chinois, d'autant plus que le dernier terme était le titre de l'un de ses ouvrages « Aux marges de la République ; essai sur le métabolisme républicain ».
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M. Wei Aoyu et M. Robert Franc |
« Y a-t-il une politique étrangère propre à la République française ? » fut la troisième intervention, introduite par une série d'interrogations : « Y a-t-il une politique extérieure spécifiquement républicaine ? C'est-à-dire, est-ce que la politique des républiques françaises est en rupture ou au contraire en continuité avec les politiques antérieures, c'est à dire les politiques de la monarchie ? D'autre part, y a-t-il entre les cinq républiques une continuité, ou y a-t-il différentes politiques extérieures selon le contexte ? ». L'homme qui a tenté de répondre à ces questions est M. Robert Franc, professeur à l'Université de Paris I Panthéon-Sorbonne. Selon lui, « l'Histoire est complexe, il n'y a pas de réponse simple à ces questions. Il n'y a pas une continuité à 100 % par rapport à la monarchie, il n'y a pas non plus changement ou rupture à 100% par rapport à l'ancien régime monarchique ». Tout au long de son récit, le spécialiste de l'Europe et des relations internationales a retracé tout le parcours des politiques extérieures des différentes Républiques françaises depuis 1789, une illustration parfaite de tous les enjeux de la définition de la politique extérieure liée à la politique intérieure, avec son rôle défini dans différentes périodes face à différents défis internationaux. Au cœur de chaque crise politique se niche la question de la guerre et de la paix. S'y ajoutent, à l'heure actuelle, les enjeux de l'adaptation de la politique extérieure française à la mondialisation, à la construction européenne, et à l'émergence des nouveaux pays industriels.
« Il faut être masochiste pour parler de la République en Suisse. (…) La Suisse ne s'entend pas comme une République, mais comme une Confédération. Mais pour moi, ce n'est pas une Confédération. C'est un pays qui porte un faux nom parce qu'il devait s'appeler Fédération ». Les propos de Gilbert Casasus, professeur d'Etudes européennes et président du Département des sciences historiques à l'Université de Fribourg, ont choqué les jeunes chercheurs chinois. Dans sa leçon consacrée à « La notion de République en Suisse », il a indiqué que dans son pays, ce terme renvoyait directement à la France et à la révolution française. La République helvétique, imposée par les Français, fut éphémère et s'est soldée par un échec. Parler d'unité et d'indivisibilité de la République en Suisse est contre-nature. En conclusion, le conférencier a précisé que pour le même concept, les différents peuples pouvaient avoir différentes perceptions selon leur propre histoire. « Une république n'est pas forcément une démocratie... Et il y a beaucoup de démocraties qui ne sont pas des républiques ». Les citoyens suisses peuvent se reconnaître dans des idéaux comme la liberté, l'égalité et la fraternité, tout en refusant le principe de la pensée du républicanisme français. Par rapport à l' « universalité des valeurs républicaines dont la France a toujours voulu être l'apôtre », Gilbert Casasus a plutôt insisté sur « l'universalité des valeurs démocratiques ». « Mais là, c'est encore une longue marche… ».
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M. Olivier Pétré-Grenouilleau |
Les trois autres conférences sont les suivantes : « La République et ses provinces (1792-1900) » (Olivier Pétré-Grenouilleau, IGHG) ; « Se battre pour la France ou pour la République ? Les militaires français pendant la guerre d'Algérie (1958-1962) » (Jenny Raflik, Université de Cergy-Pontoise) ; « Echec ou modèle ? La Seconde République en France (1848-1852) » (Jacqueline Lalouette, Université de Lille III).
Comme chaque année, deux ateliers interactifs entre les auditeurs sinophones et les experts francophones ont prolongé les conférences dans une ambiance extrêmement chaleureuse. Très curieux, les étudiants ont multiplié les questions sur leurs travaux de recherches. Les professeurs ont donné leurs conseils à partir des quatres principes fondamentaux, à savoir la définition du sujet, l'utilisation des sources et des archives constituant les traces du passé, l'historiographie et la méthodologie.
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M. Claude Hauser et Mme Bao Zhong, ancienne boursière de la Confédération |
Une demi-journée d'études de l'Université d'automne a spécialement été dédiée à la Suisse et son Histoire, qu'il s'agisse de l'évolution de la relation entre la Suisse et l'Europe depuis 1945, de l'image de la Suisse dans le « miroir du monde » durant la même période, et des contacts académiques Suisse-Chine depuis 1950. Plusieurs personnalités suisses, françaises, et chinoises ont honoré cette réunion de leur présence, dont Mme Marielle de Dardel, chef du service des relations internationales à l'Université de Fribourg ; M. Claude Hauser, professeur d'Histoire contemporaine dans la même institution ; Mme Annie Bergeret-Curien, chercheur en littérature chinoise contemporaine au CNRS et directrice du Programme Chine de la Fondation Maison des sciences de l'Homme ; ainsi que M. Xu Tiebing, secrétaire général de la Section Suisse de l'Association des anciens étudiants chinois en Europe et en Amérique.
Beijing Information
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