Lan Xinzhen
En favorisant le changement du mode de développement économique et la construction d'une société d'économie d'énergie et protectrice de l'environnement, ce nouveau plan quinquennal chinois offre également d'énormes opportunités aux entreprises chinoises et étrangères.
Tianjin Teda Veolia, fondée en juillet 2007
Le 12 août, la société américaine Eaton a lancé son objectif ambitieux de réaliser un chiffre d'affaires de 2 milliards de dollars sur le marché chinois en 2015, soit le double de 2010. Cet objectif, qui coïncide avec l'engagement chinois de développer ses industries d'économie d'énergie et de protection environnementale, semble bien accessible.
Après trois cycles de consultations, le « XIIe plan quinquennal du développement des industries d'économie d'énergie et de protection environnementale » rédigé par le département de l'environnement et des ressources de la Commission nationale pour le développement et la réforme (CNDR) a été déposé au Conseil des Affaires d'Etats, et va bientôt être publié.
Selon le plan, les industries concernées seront divisées en trois catégories dont l'économie d'énergie, la protection environnementale et l'utilisation polyvalente des ressources, et bénéficieront d'un soutien politique. Six domaines seront impliqués : technologies et équipements à rendement élevé en matière d'économie d'énergie, produits énergétiquement efficaces, services d'économie d'énergie, techniques et équipements avancés en matière de protection environnementale, produits de protection environnementale ainsi que services de protection de l'environnement.
Une concurrence plus acharnée
Pour Alexander M. Cutler, président et CEO de Eaton, la Chine constitue la clé du développement de sa société.
Leader technologique global en systèmes de motopropulseurs, de transmissions, de gestion de l'air et de contrôle spécial favorisant l'efficacité énergétique, la sureté et les économies de carburant, la société Eaton combine ses atouts avec le programme chinois du développement des industries vertes.
Actuellement, Eaton a établi un partenariat avec Shanghai Aircraft Manufacturing Co Ltd (SAMC), filiale de la Commercial Aircraft Corp of China Ltd (COMAC), en créant une co-entreprise impliquée dans le projet de gros avion chinois. La société fournit également divers produits d'économie d'énergie à certaines grandes entreprises chinoises, ainsi qu'une solution de contrôle de distribution d'énergie électrique sûre et efficace aux réseaux de métro de Beijing et de Guangzhou.
A l'instar de la société Eaton, d'autres entreprises nationales et internationales dont le groupe Haier, la Beijing Capital Co., LTD et Siemens visent le marché des industries vertes en Chine. La concurrence fait rage.
Selon les premières statistiques de l'Association chinoise de l'industrie de la protection environnementale, le secteur maintiendra une croissance rapide supérieure à 15 % au cours du XIIe plan quinquennal. En 2015, la valeur de la production du secteur approchera les 2 200 milliards de yuans. L'Institut de la programmation environnementale du ministère de la Protection de l'Environnement a estimé que la demande d'investissement du secteur culminera à 3,1 billions de yuans durant les cinq prochaines années, soit une hausse de 121 % par rapport à la période du XIe plan quinquennal, durant laquelle ce chiffre n'a été que de 1 540 milliards de yuans. Ce marché gigantesque éveille l'appétit des entreprises concernées.
« Les cinq années à venir constituent l'âge d'or des industries vertes en Chine », a constaté Mme Chen Shangqin, vice-présidente de l'Association chinoise de l'industrie de la protection environnementale.
Selon les « Avis sur la bonne utilisation des investissements étrangers » promulgués par le Conseil des affaires d'Etat en avril 2010, les investissements étrangers sont les bienvenus dans les industries d'économie d'énergie et de protection environnementale, tout comme dans l'industrie manufacturière de haut-de-gamme, l'industrie des hautes et nouvelles technologies, le secteur des services modernes et l'industrie des énergies nouvelles. Les projets d'investissements étrangers encouragés par l'Etat sont prioritaires dans l'affectation des terrains.
Parmi les actuels investisseurs étrangers sur le marché vert en Chine, on compte le groupe Veolia (français), le groupe Suez (français) et la société Thames Water (anglaise), trois entreprises dans le domaine de l'eau qui figurent sur la liste des 500 premières entreprises mondiales ; la société Onyx (française), la société SembCorp (singapourienne) et la société Asia Pacific Environmental (hongkongaise) dans le domaine des déchets et ordures.
Dans la concurrence avec ces multinationales, les entreprises chinoises s'avèrent désavantagées. Si les revenus annuels des plus grands opérateurs environnementaux mondiaux comme Veolia et Suez dépassent les 100 milliards de yuans, ceux des plus grands opérateurs nationaux ne sont que 2 ou 3 milliards.
D'après Hou Yuxuan, chercheur en industrie de l'environnement chez CIConsulting, les entreprises environnementales nationales, à l'envergure limitée et au niveau de concentration faible, ne sont pas en phase avec le rythme de développement du marché. Afin de renforcer la compétitivité nationale, des fusions et regroupements du secteur deviennent nécessaires. Et la clé de cette restructuration, c'est de trouver le bon partenaire.
Pour Zhang Yanlin, CRO de la CIConsulting, les technologies et le droit de la propriété intellectuelle constituent une entrave au développement des industries d'économie d'énergie et de protection environnementale du pays. L'introduction des techniques restant chère, les entreprises se tournent vers la coopération afin de contrôler le coût de revient. Les projets d'économie d'énergie et de protection environnementale concernant l'industrie majeure sont souvent initiés par des entreprises du secteur. L'équilibre de la concurrence est alors affaibli.
Face à ces problèmes, le nouveau plan quinquennal prévoit la formation de grandes entreprises environnementales dont les revenus annuels varieront entre 5 et 10 milliards de yuans.
Le contexte du nouveau plan
Développer vigoureusement les industries d'économie d'énergie et de protection environnementale revêt une signification importante pour le changement de mode de croissance économique et la construction d'une société d'économie d'énergie et protectrice de l'environnement.
La Chine a une population nombreuse, des ressources par habitant restreintes et un écosystème fragile. Avec le processus d'industrialisation et d'urbanisation rapides, le pays est pourtant confronté à une restriction environnementale et énergétique de plus en plus grave. Ainsi, on appelle à renforcer la conscience de crise, à forger le concept de développement vert et bas carbone, et à accélérer l'établissement d'un mode de production et de consommation d'économie des ressources et protectrice de l'environnement à travers les économies d'énergie, la réduction des émissions et le perfectionnement des mécanismes d'encouragement et de contrôle, afin de renforcer la capacité de développement durable.
« La Chine a fixé sept industries émergentes stratégiques dont les industries d'économie d'énergie et de protection environnementale, qui constituent de nouveaux facteurs de croissance économique et créeront davantage d'emplois », a affirmé Li Bumin, directeur du Bureau de recherche politique de la CNDR.
Développer les industries vertes permet au pays de participer à la concurrence internationale et d'en être l'initiateur. L'échiquier mondial de la concurrence économique connaît un changement profond. De nouvelles percées scientifiques et technologiques sont faites. Les industries émergentes stratégiques deviennent de nouveaux champs de bataille sur lesquels les principaux pays du monde se disputent la domination. Afin de se placer avantageusement dans la concurrence internationale de demain, la Chine doit élargir l'horizon, saisir les opportunités et accélérer le développement des nouvelles industries dont les industries vertes, tout en maitrisant les technologies clés et les droits de propriété intellectuelle concernés, renforçant la capacité d'auto-développement et élevant le niveau technique et la compétitivité de ses industries.
Les industries vertes en plein essor, les pays du monde ne se distinguent pas encore dans ce domaine où la Chine pourrait créer de nouveaux avantages compétitifs.
En ce qui concerne le plan de développement, la CNDR fixe des projets clés en tenant compte des réalités nationales et des conditions industrielles.
Briser les goulots d'étranglement
Les industries vertes se trouvent dans une situation embarrassante caractérisée par la faiblesse et la dispersion. Précisément, les mécanismes d'encouragement et de contrôle restent à perfectionner. Le système d'innovation indépendante des entreprises se développe lentement. Les canaux de promotion de nouvelles technologies sont bloqués. Le service environnemental est relativement en retard.
« Le marché ne doute pas de la prochaine mise en place d'une politique d'assistance financière, mais les opinions divergent sur le niveau de cette assistance », a révélé Yu Hai, analyste chez Shenyin & Wanguo Securities.
Toujours d'après Yu Hai, le gouvernement donnera son aval aux industries vertes en établissant des systèmes de responsabilité et de contrôle en matière de réduction des émissions polluantes, et en créant des leviers économiques tels que les crédits verts, la taxe environnementale et le réseau du commerce vert. Néanmoins, parmi les chiffres budgétaires déjà rendus public, le financement direct des industries vertes n'est que de 22 milliards de yuans. En ce qui concerne les soutiens financiers sur le marketing et l'industrialisation, un forum a été tenu entre le ministère des Finances, le ministère de la Protection de l'Environnement et l'Association de l'industrie de la protection environnementale, qui n'étaient pas d'accord sur le mode et l'objet de ces soutiens.
Selon le « Rapport de recherche sur l'industrie de la protection de l'environnement en Chine » rédigé par CCID Consulting, les grandes entreprises ne représentent que 5 % du secteur tandis que la proportion des entreprises dont l'actif immobilisé est inférieur à 15 millions de yuans dépasse 85 %. Mais les crédits étant difficiles à obtenir en période de politique monétaire stricte, et faute de soutien gouvernemental, ces petites et moyennes entreprises s'enfoncent dans des difficultés financières et ne parviennent pas à innover.
Outre le problème financier, la rentabilité est loin d'être optimale. Il est évident qu'un soutien à la production devient nécessaire. Prenant l'exemple du traitement des eaux usées, les installations pourraient bénéficier d'un tarif préférentiel pour l'électricité. Et quand le niveau de développement économique le permettra, et en calculant le prix de revient, il conviendra d'augmenter les frais de traitement des eaux usées. Ces mesures s'adaptent également au traitement des ordures et des déchets dangereux.
L'Association chinoise de l'industrie de la protection environnementale propose d'établir un fond spécial pour soutenir la mise sur le marché des fruits de nouvelles technologies, afin d'accélérer la nationalisation, la standardisation et la modernisation du secteur, et d'encourager les entreprises à s'appuyer sur les recherches et innovations indépendantes, et à participer de façon active à l'élaboration des standards des produits et des normes des travaux et des techniques.
« Une alliance d'innovation au sein du secteur dirigée par les entreprises pilotes et orientée par le marché permettrait de modifier la physionomie de l'industrie de la protection environnementale en Chine », a avancé Mme Chen Shangqin.
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