Tang Yuankai
Hu Yilong, très apprécié des enfants de sa génération
People's Literature, le premier magazine littéraire depuis la fondation de la Chine nouvelle, créé au mois d'octobre 1949, et surnommé le « berceau des écrivains chinois », a récemment lancé un concours littéraire ouvert à la génération post-1990. Si le palmarès ne sera dévoilé que le 14 avril prochain, certains candidats ont déjà attiré l'attention. C'est le cas de la jeune Jiang Fangzhou.
Née le 27 octobre 1989, Jiang Fangzhou publie sa première prose à l'âge de 9 ans. Deux ans plus tard, elle débute son premier roman. A 12 ans, elle avait déjà sa propre rubrique dans de nombreux journaux, et a par la suite obtenu un prix du People's Literature. En 2004, elle a remporté le premier prix de la Coupe des Ecrivains adolescents chinois. Et 2005, elle est devenue la première présidente de l'Association chinoise des écrivains adolescents. « Je suis née pour écrire », a-t-elle déclaré.
A l'heure actuelle, les jeunes écrivains comme elle sont de plus en plus nombreux. Des lycéens, et même des écoliers publient, et certains se vendent même très bien : 10 % du marché national, selon une enquête de l'institut Beijing Kaijuan !
« J'ai reçu une grande quantité de manuscrits écrits par de petites mains », a révélé Wu Meizhen, professeur du Centre de création littéraire des enfants relevant de l'université de l'Anhui, qui anime une rubrique dans un magazine pour enfants. En 2009, elle a été chargée de sélectionner des ouvrages de lycéens et d'écoliers. « Au début, la maison d'édition a beaucoup hésité, ne pouvant estimer les chiffres de vente de ce type de livres. Mais un an plus tard, le tirage de la première série avoisinait le million d'exemplaires. Avec les autres produits du même type, le volume de vente a atteint 1,2 million de livres », a-t-elle expliqué.
Grandir et mûrir
A 12 ans, Jiang Fangzhou a commis son second roman, « En développement », une description symbolique de l'évolution de la nouvelle génération.
Et à la lecture de ce nouvel opus, le lecteur sera sans doute étonné : amour de jeunesse, relation extraconjugale, homosexualité, etc… La jeune romancière ose parler de tout ! Conséquence logique : Jiang Fangzhou s'est attiré les foudres de nombreuses personnes. Fort heureusement, la majorité des lecteurs ont apprécié son imagination et son avant-gardisme. « Nous ne pouvons pas analyser la nouvelle génération au regard de notre propre enfance. Sans les ouvrages de ces jeunes, nous n'aurions pas pris conscience de la maturité de cette nouvelle génération », a commenté un lecteur.
« Ne sous-estimez pas les enfants d'aujourd'hui, ils sont mâtures, a averti Chen Cun, célèbre écrivain. Il vaut mieux les laisser dépeindre leur propre monde, que de se faire passer pour eux et d'écrire à leur place ».
Née en septembre 1993, Meng Xiangning, qui étudie dans un lycée de Shijiazhuang (chef-lieu de la province du Hebei), a publié récemment son roman semi-autobiographique intitulé Grandir comme un tournesol. « Beaucoup de romans décrivant la vie des adolescents enlaidissent l'image de la génération post-1990. Les adultes qui les écrivent ne nous comprennent pas. Ils n'ont aucune idée de ce que nous pensons, et n'écrivent que pour leur plaisir », a-t-elle estimé.
Cependant, dans cette Chine où des centaines millions de personnes vivent dans la pauvreté, le « phénomène post-1990 » ne concerne que les familles urbaines de la classe moyenne. Comparée à la génération post-1970, qui a grandi après avoir connu la Révolution culturelle (1966-1976), et à la génération post-1980, qui bénéficie de l'essor économique suite à la réforme et l'ouverture, la génération post-1990 possède un état d'esprit bien particulier, profitant des opportunités et possibilités offertes par l'époque, mais également confrontée à une concurrence acharnée.
« Nous portons sur nos épaules les ambitions de nos familles et de la société. Mais pensent-elles parfois à nos propres aspirations ? », s'interroge Tangchao, qui est né en août 1993. A 15 ans, il a publié son second roman Rendez-moi mon rêve, qui s'est rapidement hissé au top des ventes.
Cependant, les jeunes écrivains provoquent également des polémiques liées au système scolaire. Par exemple, l'entrée de Jiang Fangzhou à l'université Qinghua a suscité un débat, car ses notes étaient inférieures de 60 points au niveau requis, et insuffisantes en langue et littérature.
Dorlotés dès l'enfance
En 1999, à l'âge de 16 ans, Han Han a participé à la première session du Concours de compositions Nouveau Concept organisé par Embryon, un mensuel shanghaïen. Il s'est distingué parmi des milliers de candidats et a obtenu le premier prix.
Aujourd'hui, ce concours, considéré comme les « Jeux Olympiques de langue et de littérature pour les lycéens », existe toujours. Sa popularité permet d'éveiller le goût des jeunes pour l'écriture, et fournit une bonne plate-forme pour les jeunes talents qui souhaitent accéder au monde fermé de la littérature.
« Ils racontent les espoirs et les douleurs d'une génération, a indiqué le célèbre Mo Yan. Tout en désirant être choyés et considérés, ces jeunes doivent apprendre à s'occuper d'eux et à poursuivre leurs rêves ».
« L'écriture est en fait une passion partagée par les enfants, qui ont besoin de s'exprimer et de révéler leur vie », a montré Yang Peng, le premier et le seul Asiatique autorisé par Disney à écrire des histoires de Mickey Mouse. Les enfants doivent pouvoir exprimer leurs idées intimes. Fort heureusement, la société désire les lire.
Aux yeux de Tan Xudong, professeur de littérature jeunesse au département de chinois de l'université normale de Beijing, la motivation des enfants pour l'écriture réside dans leur amour de la vie et la confiance qu'ils ont dans le monde des adultes. « Les enfants veulent montrer leur intelligence. Ceci nécessite l'aide des enseignants et des écrivains », a-t-il dit.
S'agissant des enfants atteints du syndrome de la page blanche, Yang Hong, directeur de recherche pédagogique à l'Ecole primaire expérimentale Nº2 de l'arrondissement Haidian de Beijing, estime que leur panne d'écriture résulte d'un manque d'observation de la vie.
« L'écriture est un excellent moyen d'expression pour les enfants, qui favorise l'amélioration de leur mode de vie et augmente leur capacité d'innovation. L'écriture est bonne pour la santé physique et psychologique de l'enfant, a montré Wu Meizhen, professeur à l'université de l'Anhui. Traditionnellement, on a tendance à penser qu'un enfant fait des fautes d'orthographe et de syntaxe. Mais il ne faut plus penser comme ça. Leurs écrits permettent de saisir les sentiments de l'enfance, c'est comme boire la rosée du matin ».
« Aujourd'hui, les enfants ont une base beaucoup plus solide, ils sont pétris d'informations et de connaissances. Mais l'enthousiasme seul ne suffit pas, ils ont besoin d'être guidés. En outre, les maisons d'édition doivent dorloter ces petites plumes », a exhorté Yu Lei, directeur de l'institut de recherche sur la littérature ethnique et la littérature d'enfant relevant de l'Académie de Kunming, chef-lieu du Yunnan.
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