La Commission de Régulation bancaire de Chine (CRBC) n'a jamais relâché son contrôle sur les opérations des banques. Contrairement à une idée répandue à l'étranger, le secteur bancaire chinois n'est pas dans la tourmente.
Lan Xinzhen
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La Banque populaire de Chine |
Le 21 juillet, l'agence de notation Fitch Ratings a annoncé une refonte de son système de classement sur la vitalité des établissements de crédit mondiaux. L'agence a averti que les 16 banques chinoises évaluées pourraient connaître une dégradation de leur note, en raison de risques pesant sur la qualité de leurs actifs, et du faible niveau de leurs capitaux.
Selon le communiqué de presse publié par Fitch, le nouveau classement mesurera plus minutieusement la capacité financière des banques, en élargissant son barème de notation à 20 catégories, soit de AAA à F.
Aucune des 16 banques chinoises n'a obtenu de A. Elles se classent toutes entre BB et B. A la vue de ces notes médiocres, les établissements d'investissements étrangers ont vendu en masse leurs actions des banques chinoises en juillet.
Le secteur bancaire chinois est-il réellement dans la tourmente ? La Banque populaire de Chine a publié un document pour dissiper ces doutes : « Le secteur est en bonne santé !».
Les actifs sont d'assez bonne qualité
Trois indicateurs permettent de mesurer la santé d'une banque : son actif, son taux de fonds propres, ainsi que sa proportion de mauvais prêts.
Selon les statistiques publiées par la CRBC le 25 juillet, jusqu'à juin 2011, l'actif total des établissements de crédit chinois a atteint les 104 140 milliards de yuans, en hausse de 19,4 % par rapport à la même période de l'année précédente, et le passif total, 97 810 milliards de yuans, soit +18,8 %.
Les données publiées en mai montrent que le taux de fonds propres des banques commerciales a été de 11,8 % au premier trimestre, plus haut que les niveaux de 11,5 et de 10,5 % requis par la CRBC à l'égard des banques dites d'« importance systémique » et de celles qui ne figurent pas dans la liste.
Toujours selon la CRBC, le taux de mauvais prêts des banques commerciales a été de 433,3 milliards de yuans au premier trimestre, en baisse de 300 millions de yuans par rapport à fin 2010. Le taux de mauvais prêts a été de 1,1%, équivalant à fin 2010, et loin en-dessous du seuil de risques international, qui est entre 5 % et 8 %.
Alors, pourquoi les agences de notation et les établissements d'investissement internationaux s'inquiètent-ils ?
Ce qui les angoisse, ce sont les risques de la qualité de l'actif à moyen terme. L'agence Fitch a maintes fois averti des risques à moyen terme de l'actif des banques chinoises à cause d'une croissance rapide des crédits depuis 2008. Une grande quantité de ces crédits a été versée aux gouvernements locaux et aux exploiteurs fonciers, dont la capacité de remboursement à moyen terme est douteuse. Il s'agit là du principal argument de l'agence Fitch.
Face à cette inquiétude, la Banque populaire de Chine a assuré que les risques des emprunts des gouvernements locaux sont tout à fait contrôlables. Les statistiques montrent que ces emprunts sont inférieurs à 30 % du solde de l'ensemble des emprunts locaux en RMB. D'après le Bureau national d'Audit de Chine, le volume total des dettes locales a été de 10 700 milliards de yuans à la fin de 2010, tandis que le PIB de 2010 a été d'environ 39 800 milliards de yuans. La proportion des dettes dans le PIB a été inférieure au standard international de 60 %.
La Banque populaire de Chine explique que ces dettes locales vont principalement vers les projets économiquement et socialement rentables, qui apportent des revenus constants et suffisants grâce à l'accélération des processus d'industrialisation et d'urbanisation. Certains projets créent aussi une rentabilité interrégionale et globale. Après tout, ces projets sont auto-remboursables. Il existe néanmoins un petit nombre de projets moins rentables, qui dépendent du support financier des gouvernements locaux.
Parmi les 16 banques chinoises notées par Fitch, la plupart sont déjà cotées en bourse, et les autres préparent leur introduction. Selon leur rapport financier publié régulièrement et révisé par l'agence comptable, la proportion de mauvais prêts demeure faible. En tant que banques commerciales, ces établissements accordent de grande importance à la qualité des prêts et au contrôle des risques.
Des problèmes qu'on ne peut nier
Le secteur bancaire chinois rencontre cependant des difficultés. D'après Zhou Xiaohe, chercheur à ET Net, outre les dettes locales, le projet « Bâle III » constitue une véritable question.
Suite à la crise financière, le monde a été traversé par une forte volonté de réforme du contrôle financier. Ainsi, le projet « Bâle III », qui concerne la réglementation des banques commerciales, a vu le jour, mettant sur les rails la réforme du secteur bancaire mondial. En mai 2011, la CRBC a publié les « Avis sur l'application de nouvelles normes au sein du secteur bancaire », considérés comme la version chinoise de « Bâle III ». Les « Avis » ont souligné l'importance du renforcement des quatre limites : taux de fonds propres, effet de levier, fluidité des capitaux ainsi que réserves pour pertes sur prêts.
Les « Avis » conseillent à la CRBC de terminer la révision et la publication des réglementations concernées avant la fin d'année, afin d'assurer la mise en application des nouvelles normes bancaires au début de 2012. A la date fixée, les taux de fonds propres pour les banques d'importance systémiques et les banques non systémiques seront respectivement de 11,5 % et de 10 % au minimum, ce qui constitue une dure épreuve pour les banques chinoises.
Pour les banquiers, la pression sur les capitaux est réelle. Selon Zhou Kunping, directeur général adjoint du service de recherche sur le développement de la Banque des Communications, le crédit constitue le principal mode de financement des banques chinoises. Les banques commerciales s'engagent à se transformer au cours des cinq années prochaines, mais d'un pas prudent. L'actuelle consommation de fonds propres ne connaîtra pas de changement radical.
Afin de s'adapter aux nouvelles normes, les banques commerciales se mobiliseront pour amasser des fonds. Surtout pendant le premier semestre, le taux des réserves obligatoires des banques connaissait une augmentation mensuelle pour atteindre son plus haut niveau historique. Le marché financier s'est tendu davantage.
Selon les statistiques de Windinfo, la récolte de fonds du secteur bancaire chinois a atteint les 903,55 milliards de yuans en 2010, soit 27 % du volume total du marché financier. Au cours des six premiers mois de 2011, les banques ont déjà amassé 622,11 milliards de yuans, soit 30,3 % du total du marché financier, et 68,85 % du total du secteur bancaire de 2010.
Un développement basé sur la récolte de fonds n'est pas rationnel pour les banques. S'il s'agit d'un financement par droit d'action, les intérêts des anciens actionnaires diminuent. S'il s'agit d'un financement par obligations, le coût des capitaux augmente. Une fois que le taux de rentabilité baissera et que le développement ralentira, les banques porteront un lourd fardeau. En plus, le financement énorme des banques écrase l'espace de financement des autres secteurs et affaiblit la fonction du marché dans la distribution efficace des ressources. Il sera plus difficile pour les petites et moyennes entreprises d'obtenir des fonds.
Ne pas transférer les dettes locales sur des lignes de compte
D'après Zuo Xiaolei, conseillère du président de China Galaxy Securities, afin de dissiper les inquiétudes internationales, il faut éliminer la pratique de transformation des dettes locales en mauvais compte bancaire. A court terme, il faut trouver une solution pour les dettes locales. A long terme, il faut normaliser les émissions de dettes des gouvernements locaux de manière à évider une crise des dettes.
Zuo résume son opinion en formulant les propositions suivantes :
Premièrement, faire des dettes locales des dettes publiques. 80 % des dettes locales sont sous forme de prêts bancaires attribués aux entreprises, une « plate-forme de financement gouvernemental ». En principe, les finances publiques centrales ne se chargent pas de rembourser ces prêts. Ainsi, il faut diviser ces prêts en différentes catégories, prêts pour les projets de fonction gouvernementale, et prêts pour les projets de service public. En ce qui concerne les prêts pour les crises, il faut les transférer aux finances publiques qui se chargent de les rembourser par les recettes.
Deuxièmement, la plupart des emprunts gouvernementaux sont investis dans des infrastructures à intérêts économiques et sociaux. Il faut donc calculer ces intérêts, ce qui permet d'équilibrer les dettes et les revenus.
Troisièmement, il est possible de rembourser une partie des emprunts à travers la vente de biens nationaux, par exemple, la privatisation de certaines entreprises locales.
Quatrièmement, les banques pourraient constituer des réserves pour neutraliser les éventuelles créances douteuses liées aux dettes locales. Le secteur bancaire chinois enregistre une croissance forte. La qualité des actifs du secteur demeurera stable. Cela permet aux banques de constituer des réserves dédiées aux créances douteuses. Ainsi, le rythme d'expansion des banques ralentira, mais les risques du financement gouvernemental local deviendront contrôlables.
A long terme, il faut calmer l'engouement des gouvernements locaux pour la croissance et l'investissement, principales causes de la dette locale.
Enfin, il est nécessaire pour les banques d'établir un système de responsabilité et de contrainte en ce qui concerne les emprunts gouvernementaux locaux. Les banques chinoises ne sont pas indépendantes de l'intervention administrative, notamment dans leurs opérations de crédit.
Annexe :
La notation des 16 banques chinoises par Fitch Ratings
-Banque industrielle et commerciale de Chine : BB
-Banque de Construction de Chine : BB
-Banque de Chine : BB
-Banque agricole de Chine : BB-
-Banque des Communications de Chine : BB-
-Banque d'affaires de Chine : BB-
-Banque d'investissement Citic : BB-
-Banque de Développement de Pudong : BB-
-Banque Minsheng : BB-
-Banque de Beijing : BB-
-Banque de Shanghai : BB-
-Banque Everbright : B+
-Banque industrielle de Chine : B+
-Banque de Développement du Guangdong : B+
-Banque de Développement de Shenzhen : B+
-Banque chinoise Huaxia : B
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