Huang Tao
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Le 21 avril 2009, la 4e rencontre entre la Chine et la Russie sur les négogications énergétiques, à Beijing. (Photo: Li Xueren/Xinhua) |
Les négociations sino-russes sur la construction de gazoducs ont débuté dans les années 1990. Elles étaient principalement consacrées à la ligne de l'Est, reliant Sakhaline au Nord-Est de la Chine. En avril 2006, lors de la visite du président Poutine en Chine, il a pour la première fois proposé un projet dans l'Ouest, souhaitant transporter le gaz de Sibérie occidentale vers la région ouïgoure du Xinjiang en Chine, à travers la région frontalière sino-russe de l'Ouest. Trois ans plus tard, les deux pays ont signé un « mémorandum d'entente sur la coopération en matière de gaz ». Au mois de mai 2011, le vice-premier ministre chinois Wang Qishan et son homologue russe Igor Sechin ont signé des protocoles. Néanmoins, en raison des différends sur le prix entre Gazprom et Petrochina, le marché n'est toujours pas conclu à ce jour.
Même le président chinois Hu Jintao n'avait pas réussi à conclure la négociation durant sa visite en Russie en juin dernier, échec regrettable mais attendu.
Cette négociation rappelle celle sur le pétrole, longue et ardue. Au 1er janvier 2011, l'oléoduc était finalement mis en service. La coopération gazière entre la Russie et l'Europe, débutée il y a plus de 40 ans, fait fréquemment la Une des journaux. Comme l'a rappelé Valery Yazev, président adjoint de la Douma et président de l'Association du gaz russe : « Le prix est un débat sans fin entre acheteur et vendeur ».
L'aboutissement de cette négociation sino-russe est étroitement lié aux changements de la situation internationale. La Libye a suspendu son approvisionnement de neuf milliards de m³ de gaz vers l'Italie. Suite aux incidents de la centrale nucléaire de Fukushima, le Japon a besoin d'importer 1,3 million de m³ de gaz liquide par an, ce qui se traduit par une hausse exponentielle du prix du gaz. Selon les prévisions, fin 2011, le prix du gaz aura augmenté de 60 % en Europe, et de 40 et 10 %, respectivement en Asie et aux Etats-Unis. Par ailleurs, la question de la sécurité nucléaire a diminué la proportion d'électricité nucléaire dans certains pays, remplacée notamment par du gaz. A tel point que la Russie va adopter une palette de mesures pour augmenter la dépendance de l'Europe et de l'Asie à ses approvisionnements de gaz. D'après Valery Yazev, la demande européenne passera de 300 à 700 milliards de m³, et la part du gaz russe dans la totalité des importations du gaz en Europe de 34 à 42 %.
Spécialistes chinois et russes s'affrontent sur le prix du gaz
Selon Valery Yazev, le gaz russe s'est vendu à 350 dollars les mille m³ vers l'Europe. Ainsi, les 235 dollars proposés par la Chine ne sont pas acceptables.
Pang Changwei, expert à l'Institut de recherche en stratégie énergétique de l'Université du Pétrole de Chine, a répliqué que le prix du gaz n'était pas unique, contrairement à celui du pétrole. De plus, la longueur de l'oléoduc sino-russe est inférieure de 2 500 km à celle de l'oléoduc Russe-Europe : le prix devrait s'en ressentir.
« Si l'on peut le vendre entre 300 et 400 dollars les mille m³, pourquoi devrions-nous accepter les 235 dollars chinois ? C'est une perte pour nous », insiste pourtant Yazev.
Selon M. Pang, le prix du gaz importé d'Asie centrale est de 168 dollars les mille m³, et de 180 dollars seulement pour le gaz australien. L'offre russe est donc trop élevée.
Mais malgré ces différends autour du prix, plusieurs consensus existent.
Toujours d'après cet expert, les départements de l'énergie des deux pays devraient renforcer leur coopération. « Les deux pays devraient communiquer franchement sur leur capacité d'approvisionnement et leur besoin. Par exemple en Chine, la consommation de la houille représente 70 % de la consommation totale d'énergie. La part du gaz n'est que de 4 %. D'ici cinq à dix ans, quel rôle jouera le gaz ? Quelle est la proportion de gaz importé respectivement de la Russie et de l'Asie centrale ? Toutes ces questions doivent être discutées de manière franche et profonde, afin que les deux pays puissent établir un partenariat énergétique de bénéfices mutuels. »
Pour M. Yazev, la Russie doit améliorer le taux d'utilisation de son gaz
M. Pang a suggéré d'établir un prix flexible. « Selon Alexeï Koudrine, ministre des Finances russe, le prix du pétrole sera inférieur à 90 dollars en 2013, mais le prix du gaz équivalent atteindra les 185 dollars. Si les négociations tardent, la Russie sera confrontée à un risque de chute des prix. Par ailleurs, en tant que bon voisin de la Chine, la Russie devrait investir progressivement le marché chinois afin de gagner une place importante dans le plus grand pays émergent à l'avenir. La Chine importe déjà du gaz de plusieurs pays. Si la Russie ne pénètre pas le marché chinois dans les dix ans, elle le perdra éternellement.
Pour M. Yazev, aucun doute. Si les deux pays parviennent à un accord, cela contribuera à une croissance de deux points de pourcentage du PIB russe.
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