Sun Chunlong, Jian Guangzhou et Dai Xiaojun, trois journalistes qui ont fait lumière sur les pires scandales de 2008 en Chine, ont reçu le titre d'« Activistes de l'année pour l'intérêt public », décerné par le quotidien méridional de Guangzhou Nanfeng Chuang, un magazine bimensuel qui fait école. Depuis 2003, ce prix consacre les individus et les organisations qui apportent une grande contribution au progrès social.
M. Sun, âgé de 32 ans est un journaliste d'investigation officiant pour l'hebdomadaire chinois Oriental Outlook.
Le 1er août 2008, un glissement de terrain se produisit sur le site d'une mine de fer locale du bourg de Loufan, dans la province du Shanxi. Selon des rapports provisoires, il s'agissait d'un désastre naturel et le nombre de victimes s'élevait à 11.
Cependant, lors de son enquête, M. Sun élucida qu'au moins 41 personnes décédèrent des suites d'un accident qui était principalement imputable à des activités humaines. Il fit part du fruit de ses enquêtes dans un rapport adressé à son magazine au terme du mois d'août. Cependant, aucune réponse des autorités locales ne se fit entendre.
Par la suite, le journaliste envoya une lettre ouverte au gouverneur du Shanxi, Wang Jun, le 15 septembre, proposant l'ouverture d'une enquête approfondie sur la couverture médiatique du glissement de terrain. Cette missive attira en définitive l'attention des dirigeants nationaux. Une équipe d'investigation dépêchée par le gouvernement central annonça le 26 octobre que le glissement de terrain avait provoqué 44 décès et un blessé. Les enquêteurs reprochèrent aux responsables de la mine leur incapacité à suivre les règlements étatiques relatifs aux conditions de sécurité lors de la production ainsi que la supervision inefficace des autorités locales. Trois fonctionnaires ont été arrêtés par la suite.
Jian, 35 ans, travaille pour le journal shanghaïen Oriental Morning Post.
Bien qu'il ne soit pas le premier journaliste à couvrir le scandale du lait pour enfants mélangé à la mélamine qui ôta la vie à près de six enfants en bas âge et qui mit en péril la santé de 290 000 bambins sur le reste du territoire, M. Jian fut le premier à désigner l'entreprise publique Sanlu, en tant que productrice du lait mélangé à la mélamine. Par ce faire, il vint à bout de la tradition de longue date en Chine qui veut que l'on ne nomme pas explicitement les cibles de reportages critiques, plus particulièrement lorsqu'il s'agit de célèbres marques locales.
Le reportage de M. Jian, qui fut publié dans son journal le 11 septembre 2008, a contraint le secteur des produits laitiers chinois à une complète restructuration.
Sanlu, une entreprise déjà présente sur le territoire depuis 50 ans, contrôlait 18% des produits laitiers pour enfants en bas-âge, est désormais proche de la faillite. Son ancienne PDG a été arrêtée. Près de 21 produits laitiers dont la haute teneur en mélamine a été confirmée ont également connu de grandes pertes, au point de vue financier tout comme au niveau de leur popularité.
Plusieurs fonctionnaires de haut rang visés par des accusations de complicité au scandale ont démissionné ou ont été renvoyées.
Dai, 42 ans est un photographe qui fait ses armes au bureau de Shanxi du journal pékinois West Times.
La révélation de la corruption d'une partie de la presse a fait connaître le nom de Dai dans l'ensemble de la Chine après que celui-ci ait fait partager le 27 septembre sur son blog plusieurs photographies montrant les gestionnaires d'une mine de charbon de la ville de Huozhou, dans la province du Shanxi, verser des dessous de table à des journalistes qui étaient censés les aider à dissimuler un accident de sécurité mortel remontant au 20 septembre.
Afin de prendre ces clichés, M. Dai a risqué sa vie pour se rendre sur la scène de l'accident le 25 septembre, après avoir été mis au parfum de l'affaire par un ami.
Malgré certaines menaces téléphoniques le visant nommément tout comme sa famille, M. Dai a reconnu qu'il avait tout simplement fait ce qu'il avait pu pour laver de tout soupçons l'industrie qui l'emploie depuis deux décennies.
L'Administration générale de la presse et de l'édition a annoncé le 27 novembre que quatre journalistes, 26 acteurs du monde des médias et 28 faux reporters avaient reçu 319 300 yuans (33 208 euros) dans le cadre de l'histoire révélée par M. Dai. Les quatre journalistes ont été renvoyés ou ont vu leurs cartes de presse révoquées.
Beijing Information
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