Zou Yuqin
La poulette Carmela ne supportait plus la vie monotone qu'elle menait dans le poulailler. Songeant tous les jours au monde extérieur, elle se résolut enfin à entamer un périple afin de réaliser son rêve. À l'autre bout de la mer elle fit connaissance avec un dindon et l'amena chez elle...
En 1997, Christian Jolibois et Christian Heinrich créèrent un livre illustré baptisé « La petite poule qui voulait voir la mer ». Quatre années plus tard, cet album pour enfants reçut le Prix du livre de jeunesse de la ville de Cherbourg. Le succès du premier tome de ce livre à épisodes « Les petites poules » ne s'est pas démenti auprès des jeunes lecteurs, grâce à son histoire remplie d'humour et à l'image d'une poulette mignonne, sémillante et courageuse.
Après avoir été introduit en Chine en 2006 par la maison d'édition chinoise 21e Siècle, cette album, ces trois dernières années, toujours caracolé sur le podium des ventes de livres pour enfants de Dangdang (un site d'achats de livres en ligne). Jusqu'à présent, les ventes ont dépassé le million d'unités dans le pays.
Le 19 octobre 2008, Christian Jolibois et Christian Heinrich ont été invités en Chine et ont accordé un entretien à Beijing Review.
Beijing Review: Tout abord, je tiens à vous souhaiter la bienvenue à Beijing. J'ai appris qu'il s'agissait de votre première visite en Chine. Quelles sont vos premières impressions sur la capitale chinoise?
Christian Jolibois : La première chose qui saute aux yeux est la vitalité de cette mégalopole. Dans les rues de Beijing, les gens semblent heureux et joyeux et arborent généralement un sourire. A vrai dire, mes derniers souvenirs de Chine remontent aux années 1980, c'est pourquoi je suis curieux d'observer l'évolution du caractère des Chinois.
Le premier tome des aventures de la petite poule Carmela se vend comme des petits pains en Chine. Est-ce quelque chose d'inattendu pour vous ? Comment restez-vous informé en France du développement artistique de la Chine ?
Christian Jolibois : Je suis surpris par le volume de vente de nos livres en Chine, et je suis très content qu'ils aient intéressé les lecteurs chinois. Etant donné que les journaux français débordent d'informations politiques et consacrent peu de reportages sur la Chine dans d'autres domaines, je pourrais difficilement émettre un avis sur votre dernière question.
La création de livres illustrés en Chine n'en est encore qu'à ses balbutiements. Pourriez-vous-nous en dire plus quant au processus de création de cet album illustré ? Par ailleurs, des divergences voire des disputes sont-elles apparues au cours de la conception de cet ouvrage?
Christian Jolibois : La naissance de cet oeuvre provient de nos efforts communs. En réalité, les disputes sont restées assez rares, car nous partagions directement nos vues quant aux problèmes afin de les régler en équipe.
Nous avons énormément discuté au cours des quatre premiers mois. Après avoir jalonné la structure essentielle de l'histoire, je me chargeai de la transposer à l'écrit, ce que Heinrich transposait par des illustrations appropriées. Par moment, j'écrivais des descriptions d'après ses dessins. C'était un véritable fourmillement d'idées.
Comment percevez-vous le succès des petites poules ?
Christian Jolibois : Le principal succès du livre, je le retrouve dans le sourire des lecteurs. Il s'agit d'une oeuvre accessible à tous.
Dépourvus de visées philosophiques, nous voulions tout simplement apporter de la joie aux enfants.
Christian Heinrich : Je suis père de deux enfants. Malgré les différences des deux héros de l'histoire, les enfants peuvent découvrir que l'union fait la force pour terrasser le monstre. La compréhension graduelle est très indispensable pour eux. Nous voulons que les enfants puissent découvrir au travers de cette histoire un monde où des tas de choses sont relatives à la vie réelle.
Il y a quantité de détails intéressants cachés dans les dessins, comme la rencontre avec Christophe Colomb et de célèbres peintures. Certains restent plus difficiles à décrypter pour les enfants chinois, en raison d'un contexte culturel bien différent de celui des jeunes occidentaux. Aviez-vous l'intention de vous adresser exclusivement aux jeunes occidentaux lors de la création ?
Christian Jolibois : J'avoue que notre création était seulement destinée à l'édition en Europe, c'est pourquoi les détails intéressants sont plus faciles à découvrir pour les enfants occidentaux. En effet, nous avions peu d'attentes sur le marché asiatique. Grâce à cette visite en Chine, j'ai pu m'imprégner de la culture chinoise qui était une grande inconnue pour moi. Elle m'intéresse beaucoup, et je l'incorporerai à nos prochains ouvrages. J'ai déjà imaginé quelques trames d'histoires à ce sujet.
Avez-vous déterminé le nombre de tomes de Carmela ?
Christian Jolibois : Je crois que nous cesserons la création quand les enfants trouveront nos livres monotones et répétitifs. Les intrigues seront constamment améliorées, afin de tenir les lecteurs en haleine. Donc il nous est impossible de prévoir combien de tomes seront édités à l'avenir.
Christian Heinrich : De nombreuses bonnes idées n'ont pas encore été matérialisées, ce terreau d'idées nous permet de poursuivre le processus de création.
Avec la généralisation de l'usage de la télévision et d'Internet, les enfants chinois lisent de moins en moins. Quelle est la situation dans l'Hexagone ?
Christian Jolibois : La situation est assez similaire en France. Les enfants préfèrent l'Internet et les jeux en ligne à la lecture d'ouvrages imprimés. Cependant, la lecture nourrit l'imagination des enfants tandis que les jeux en ligne stimulent l'esprit de compétition. C'est vraiment un phénomène inquiétant pour lequel les remèdes adéquats n'ont pas encore été trouvés.
Christian Heinrich : Je n'empêche pas mes enfants de se divertir avec les jeux en ligne, en tout cas, à mes yeux il s'agit d'un phénomène constant qui accompagne le développement social. En fait, je limite le temps qu'ils consacrent aux jeux vidéo et leur demande de lire un peu avant de se coucher.
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