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Publié le 04/03/2011
Alain Thote : Artistes et artisans à la fin de l'âge du Bronze

Séparation des artistes et des artisans avec l'apparition massive des arts profanes

Mais plusieurs choses vont changer au 4e siècle avant notre ère, où apparaissent de profonds bouleversements sociaux, religieux et intellectuels. Désormais, un homme peut se faire un nom sans appartenir à l'aristocratie. Avec le renouveau complet des élites, les fondements religieux du pouvoir ont été bouleversés, ce qui a eu pour effet de réduire le poids de religion dans la création artistique. Les artistes et les artisans se sont mis à fabriquer des objet de nature très différente, et en particulier, des objets d'art profanes.

Désormais, les princes font faire des objets extrêmement luxueux, les ateliers du bronze qui avaient été spécialisés dans la production des bronzes rituels se reconvertissent vers la production d'objets luxueux destinés aux mobiliers, à l'ameublement, et au décor des palais princiers. D'autre part, il semble que les artistes aient réalisé pour la première fois qu'ils pouvaient susciter des émotions avec leurs oeuvres, aussi bien de joie que de crainte.

Lampe de Zhongshan

Une lampe exhumée dans la tombe d'un roi Zhongshan, qui date du 4e siècle avant notre ère, représente un arbre avec des branches auxquelles sont suspendus des singes. Un enfant leur lance quelque chose à manger ou les taquine. Dans la même tombe, on trouve également un support d'écran qui montre un tigre dévorant un bouquetin. Au lieu d'avoir une posture figée comme le mode de représentation traditionnel, le prédateur a vraiment l'allure d'un félin, ses muscles sont entièrement tendus, alors que le jeune animal innocent a l'air de gémir de douleur.

Support d'écran en forme de tigre dévorant un ibex

Au 4e siècle avant J.-C., les artistes comprirent peu à peu quel parti ils pouvaient tirer des propriétés exceptionnelles de la laque, marquant une véritable rupture. Une boîte qui provient d'une tombe datée de 316 av. J.-C. en constitue une référence. Le registre comprend cinq scène placées à côté les unes des autres représentant une ambassade en mission diplomatique.

Boîte en laque (5 registres)

« La première scène montre un char conduit dans la campagne ; la seconde, des serviteurs annonçant l'arrivée du char ; la troisième, un homme agenouillé pour accueillir l'ambassadeur, puis apparaît le char de l'hôte ; et enfin la rencontre des deux ambassadeurs. L'événement doit avoir été important, car tout son déroulement est évoqué de manière chronologique, depuis le départ jusqu'à l'arrivée. L'artiste a introduit deux dimensions dans sa peinture, la notion immatérielle du temps et un sens physique de l'espace. C'est la première fois en Chine que l'effet de profondeur est montré par la superposition des trois chevaux et des trois personnages sur le char, l'un de front, l'autre en arrière, et le troisième vu de dos, alors qu'auparavant, représenter des êtres vivants superposés revenait à priver de vie ceux qui étaient à l'arrière-plan. On peut dire qu'au 4e siècle avant notre ère, une conception tout à fait nouvelle se développe en Chine », explique le sinologue.

C'est aussi à partir de cette époque, où la laque commence à influencer le bronze, qu'apparaît l'art du portrait. Parallèlement, se développe un artisanat de grand luxe où l'ornement prend la première place, qu'il s'agisse des mobiliers en bronze ou en laque. Un courant décoratif basé sur les contrastes des couleurs et les motifs des volutes caractérise l'art de la laque qui inspire l'art du bronze, et non l'inverse.

Fiches de bambou de Yunmeng

De plus, à la fin du 4e et au début du 3e siècle, les laques et les céramiques portent les noms de leurs créateurs. En fait, contrairement aux vraies signatures destinées à mettre en valeur des individus, ces marques signifient l'existence d'un système hiérarchique très strict visant à contrôler la qualité des oeuvres, comme l'indiquent des fiches de bambou découvertes dans une tombe datée de 217 av. J.-C., lesquelles reproduisent des textes de loi concernant le travail des artisans de l'Empire de Qin.

« Je pense que paradoxalement, ce système de contrôle s'est développé parce qu'un certain nombre d'artistes et artisans pouvaient exercer librement leur travail. Dans la mesure où ils pouvaient fonder des ateliers privés, s'impose un contrôle extérieur qui pouvait s'exercer du point de vue de l'administration. Désormais, on fait la part entre le créateur et l'exécutant : aux artistes reviennent la création des décors, aux artisans et aux ouvriers l'adaptation de ces décors à un large éventail de formes faisant intervenir toutes sortes de techniques. Le 4e siècle avant notre ère apparaît ainsi comme le moment où en Chine les artistes commencent à se distinguer des artisans, et bénéficient d'un statut qui leur permet de créer avec une certaine liberté. C'est la raison pour laquelle cette période est si importante dans l'histoire de l'art chinois », conclut Alain Thote.

 

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