Modifier la taille du texte

Modifier la taille du texte

Imprimer cet article

Commenter cet article

BEIJING INFORMATION
CULTURE Vidéos ÉDUCATION ET SCIENCES Panorama du Tibet VOYAGE E-MAIL
À LA UNE
Publié le 23/03/2015
Réforme judiciaire : les juges sous la seule autorité de la loi

Xu Bei

« Chaque fois qu'une erreur judiciaire se produit, nous éprouvons un sentiment profond de contrition. Il faut que les tribunaux à tous les niveaux tirent les leçons des erreurs passées et améliorent les mécanismes de prévention et de correction des erreurs judiciaires. »

C'est en ces termes que s'est exprimé Zhou Qiang, président de la Cour populaire suprême, lors du rapport d'activité de la Cour populaire suprême, qu'il fit le 12 mars au Grand Palais du peuple à Beijing. En 2014, les tribunaux de Chine ont rejugé et modifié le jugement de 1 317 affaires pénales, conformément à la procédure de supervision des peines. Parmi elles figurent les cas de Hugjiltu et de Nian Bin. Ces efforts des organes judiciaires pour s'autocorriger ont été bien accueillis par les Chinois et ont entraîné une forte amélioration de leur image, ainsi que qu'une attention et des espérances sans précédent. Les membres du Comité national de la CCPPC issus de la communauté des sciences sociales ont ainsi proposé quelques éléments de réponse sur la façon dont les juges pourraient jouer un rôle pour une justice plus équitable.

 

Le juge est responsable de son jugement

L'un des objectifs de ce nouveau cycle de réformes judiciaires est de « faire en sorte que le peuple sente que chaque affaire est traitée avec équité et justice ». Pour réaliser cet objectif, nous ne pouvons que nous en tenir à la règle fondamentale de responsabilité du juge dans son jugement.

Pour Shi Jie, membre du Comité national de la CCPPC et directeur associé du cabinet d'avocats Sichuan Dingli : « Les auditions au cours d'un procès permettent à l'accusation et à la défense de débattre des preuves. Il n'y a que cette façon qui permette aux juges de rendre un verdict basé sur l'écoute complète des deux parties. » Shi Jie estime que les juges sont la clé dans cette réforme du système judiciaire, qui permettrait de remettre le procès au cœur de ce système. En attendant, les problèmes liés au système du comité de jugement continuent d'influencer dans une certaine mesure les juges. En effet, ces organisations internes établies dans chaque tribunal populaire exercent une direction collective du travail judiciaire, leur tâche principale étant de synthétiser les expériences et de discuter des affaires « importantes, difficiles ou complexes ».

Shi Jie explique que les membres de ces comités rendent parfois un verdict sur le seul rapport oral ou écrit qui leur est fait par le juge. Ce genre de décisions est généralement biaisé et apparaît contraire aux principes de verdict imposé et d'audition publique. Par ailleurs, la définition des critères « majeur », « difficile » et « complexe » n'est pas assez précise pour être utilisée dans des affaires pénales. Ainsi, la transmission des dossiers aux comités de jugement est relativement arbitraire. Enfin, ces comités se basant sur la discussion collective et la prise de responsabilité commune, peuvent représenter une sorte de « bouclier » pour éluder les responsabilités dans les affaires présentant certaines contradictions.

Au cours de la période des « deux assemblées » de 2014, Shi Jie avait proposé une motion à cet effet : « La réponse de la Cour populaire suprême montre qu'elle attache une grande importance à la réforme des comités de jugement. Une série de mesures a ainsi été conçue, avec par exemple la mise en place d'un mécanisme permettant de définir et de filtrer clairement les affaires majeures, difficiles et complexes devant être présentées devant le comité de jugement. De plus, les comités de jugement devraient être limités à juger en droit et vérifier que la loi a été correctement appliquée aux faits. »

Shi Jie reconnaît l'importance des réformes déjà engagées en matière de système de comités de jugement. Il estime cependant, que « seul le transfert véritable du pouvoir judiciaire aux juges permettra aux personnes inculpées d'être jugées et au juge de porter cette responsabilité. »

Membre du Comité national de la CCPPC et vice-présidente du Tribunal populaire supérieur du Sichuan, Xie Shanghua a quant à elle quelques inquiétudes : « Aujourd'hui, la qualité des juges est extrêmement variable et les capacités professionnelles globales sont encore loin des exigences de la réforme. Une décentralisation globale dans cette situation pourrait donc entraîner une augmentation des erreurs judicaires, mais aussi des troubles sociaux. C'est la raison pour laquelle, il nous faut encore conjuguer les aspects de connaissances sociales et de garantie institutionnelle, afin de permettre au juge d'assumer véritablement leurs responsabilités. »

 

Améliorer la qualité des juges par la sélection

La mise en place d'un système de sélection des juges est l'une des solutions aux problèmes dont se soucie Xie Shanghua. Le 26 février, la Cour populaire suprême a indiqué dans un document intitulé « Suggestions pour l'approfondissement global de la réforme des tribunaux populaires », qu'il fallait bâtir les échelons supérieurs de la magistrature à partir de mécanismes de sélection par le mérite de magistrats exerçant dans les échelons directement inférieurs. Il s'agit de mettre en place un système permettant de désigner comme juge, une personne émérite travaillant dans les domaines de la législation, de sa supervision ou de son application.

Pour Cao Yisun, membre du Comité national de la CCPPC et professeur à l'Université de Chine des sciences politiques et de droit : « La mise en place d'un système rigoureux de sélection des juges constitue le fondement et la clé pour la professionnalisation des juges. En recrutant des juges capables d'indépendance judiciaire et ayant le courage d'assumer leurs responsabilités, il sera alors possible de corriger dans une certaine mesure les problèmes d'inaptitude de certains juges dans l'exercice de leurs fonctions. »

En tant qu'avocat, Shi Jie partage cet avis. Une grande partie des avocats d'aujourd'hui ont intégré le travail judiciaire directement après avoir terminé leurs études supérieures et passé des concours de la fonction publique ou de la magistrature. Malgré le fait qu'ils possèdent une certaine connaissance théorique, ils semblent cependant manquer d'un peu d'expérience dans la conduite réelle d'un procès : « Certains juges dans les auditions pour des affaires de divorce n'ont parfois jamais été eux-mêmes impliqués dans une relation, et les jugements rendus par ces juges, ayant peu d'expériences sociale et professionnelle, sont rarement convaincantes pour les plaignants. »

« Dans toute affaire, un juge se doit de rendre un jugement impartial et indépendant. Il faut par ailleurs qu'il soit honnête, qu'il ait de solides capacités professionnelles, ainsi qu'une vie sociale riche. […] La sélection de juges parmi des avocats ou des légistes émérites est cohérente avec les règles législatives. Les avocats ayant une longue expérience possède non seulement une connaissance approfondie de la loi, mais aussi une vie sociale suffisamment riche. Le suivi et l'évaluation de leur expérience professionnelle, par exemple, s'ils présentent des comportements allant à l'encontre de la loi, s'ils font l'objet de plaintes ou si leur réputation est bonne ou mauvaise, peuvent permettre de juger de manière plus précise s'ils ont les qualités requises pour exercer les fonctions de juge. »

Pour Xie Shanghua : « Non seulement les juges des tribunaux de haut niveau sont confrontés à des affaires plus complexes, mais ils doivent également faire face aux nombreux cas nouveaux et épineux. Les exigences sont donc encore plus élevées pour le niveau, les capacités et l'expérience de ces juges. C'est la raison pour laquelle, il est nécessaire de mettre en place rapidement un système de sélection pour les juges, qui permettra d'établir un contingent de juges ayant de fortes qualifications académiques, de solides aptitudes professionnelles et de nombreuses expériences. »

  

Le système garantissant le professionnalisme des juges doit se doter d'un suivi

Ces juges de haut-niveau seront-ils capables de garantir à l'inculpé un jugement équitable et de porter leurs responsabilités ? Quelles sont les obstacles à la mise en place de ces systèmes de responsabilité et de prévention des erreurs judiciaires ? Face à cette question, la Commission légale sociale du Comité national de la CCPPC a proposé de mettre en place un système de responsabilité judiciaire faisant coïncider les droits et les devoirs. Il nous faut mettre en place un système de gestion catégorielle des équipes judiciaires, qui soit conforme aux règles judiciaires et aux caractéristiques de cette profession. Par ailleurs, il est également nécessaire de gérer séparément les différents niveaux de la profession, de mettre en place un système de sélection par concours et de renforcer la protection de l'emploi.

Pour Xie Shanghua, cette profession se caractérise par la nécessité d'une gestion rigoureuse, une supervision multipartite, des contraintes sur le comportement en dehors du travail et la poursuite en responsabilité. Ces conditions mettent les juges sous une pression extrêmement importante, qui est inversement proportionnelle au respect, au statut social et aux revenus dont bénéficient les magistrats. Cette situation a entraîné une perte d'enthousiasme, voire la désertion parmi les juges.

« Pour donner un exemple, dans les tribunaux des provinces de l'Ouest comme le Sichuan, de nombreux juges possèdent un doctorat en droit et ont passé les différents degrés des concours pour pouvoir se hisser au rang de juge. Chacun d'entre eux doit traiter près de 200 affaires par an, soit plus d'une affaire par jour. Ce contraste entre le nombre d'affaires et le manque de juges est flagrant. Mais à cela s'ajoutent les réunions, les événements spéciaux, les recherches et les publications et à la fin du mois, leurs revenus ne dépassent pas les 4 000 yuans. »

Face à ce problème, Xie shanghua propose d'augmenter de manière appropriée la spécialisation du droit, de renforcer le personnel en auxiliaires judiciaires, de dégager les juges de leurs activités administratives, et de résoudre par la réforme les problèmes flagrants dans l'exercice de la justice.

 

Beijing Information



Beijing Information
24 Baiwanzhuang, 100037 Beijing République populaire de Chine
Edition française: Tél: 68996274 Fax: 68326628