La Suisse célèbre le 65e anniversaire de ses relations avec la Chine |
Jacques Fourrier
C'est par un télégramme laconique envoyé le 17 janvier 1950 que la Suisse reconnaît « de jure le Gouvernement central de la République populaire chinoise (sic) avec lequel il est prêt à établir des relations diplomatiques ». Max Petitpierre, le radical de Neuchâtel, champion de la neutralité et de la solidarité, alors président de la Confédération, ouvre ainsi la voie à l'établissement des relations diplomatiques entre les deux pays qui prendra effet le 14 septembre de la même année. L'ambassade de Suisse avait organisé le 6 février une conférence de presse à l'occasion de ce 65ème anniversaire. Accueillis par Jenny Piaget, la première secrétaire de l'ambassade en charge de la culture et des médias, les journalistes se sont vus remettre le traditionnel « pack média » contenant notamment le communiqué de presse et le programme des festivités. Son excellence Jean-Jacques de Dardel, ambassadeur de Suisse en Chine depuis le 27 février 2014, dont la maîtrise de l'anglais laisse transparaître à la fois son aisance communicationnelle et un long séjour sur la côte est des Etats-Unis, a donné à ce rendez-vous un ton convivial.
Prenant la parole, l'ambassadeur évoque les relations bilatérales avec un chiffre symbolique, celui des échanges commerciaux entre les deux pays frôlant la barre des 60 milliards de dollars en 2013 ainsi que l'entrée ne vigueur de l'accord de libre-échange Chine-Suisse le 1er juillet 2014. Il souligne l'envergure et la vigueur du dialogue bilatéral, comme l'illustrent notamment les deux visites effectuées par le premier ministre chinois Li Keqiang depuis son entrée en fonction. Si le commercial et le politique restent au centre des relations entre les deux pays, l'année 2015 verra se dérouler « de nouveaux événements, des points forts et de nouvelles activités ». Et de citer notamment les deux escales chinoises de Solar Impulse 2, un avion propulsé par l'énergie solaire qui effectue un tour du monde. L'ambassadeur laisse ensuite la parole à Mme Eveline Widmer-Schlumpf, conseillère fédérale, présidente de la Confédération pour l'année 2012 et actuellement cheffe du département fédéral des Finances, en visite de travail à Beijing pour discuter des arrangements pour faire du pays un hub de première importance des transactions en renminbi ainsi que des modalités règlementaires relatives à l'ouverture en Suisse de la filiale d'une banque chinoise. Sur ce dernier point, l'ambassadeur a annoncé qu'il s'agissait « d'une grande banque chinoise », laissant à Mme Widmer-Schlumpf le soin d'annoncer ultérieurement « la bonne nouvelle ».
La cheffe du département fédéral des Finances a rappelé la vitalité des relations commerciales bilatérales. La Chine est devenue le premier partenaire commercial asiatique de la Suisse, mais aussi son troisième fournisseur mondial, derrière l'Union européenne et les Etats-Unis. Elle a aussi évoqué la signature d'un mémorandum d'entente entre la Banque nationale suisse et la Banque populaire de Chine relatif à la conclusion en Suisse d'accords de compensation en renminbi. Malgré son emploi du temps visiblement chargé qui lui a fait quitter la conférence de presse immédiatement après avoir lu son texte, Mme Widmer-Schlumpf, faisant référence aux prévisions de bon augure à quelques jours du Nouvel an chinois, esquisse un sourire en disant que « les astrologues avaient peut être les relations bilatérales à l'esprit ». Les événements culturels ont bien évidemment été mis à l'honneur, comme l'exigent toutes les commémorations périodiques de ce type. Jenny Piaget a choisi de présenter une sélection qui lui tient à cœur. Outre les escales chinoises de Solar Impulse 2, elle met l'accent sur la troisième tournée en Chine de l'Orchestre symphonique de Bâle les 23 et 25 mars prochain et sur l'exposition sur l'horlogerie suisse « Genève au cœur du temps » au Musée de la Capitale de Beijing du 23 avril au 12 août. La vocation humanitaire de la Suisse sera aussi à l'honneur avec la projection du film « Henri Dunant : du rouge sur la croix » en présence du réalisateur suisse Dominique Othenin-Girard dans le cadre des Rencontres du cinéma francophone.
Lors de la séance de questions-réponses, l'ambassadeur a annoncé qu'un troisième Institut Confucius allait ouvrir en Suisse, après celui de Genève et de Bâle, sans toutefois en dire plus sur le choix de la ville d'accueil. Parlant des touristes chinois en Suisse, il a souligné que le marché chinois était le plus dynamique et que le tourisme hivernal allait se développer, d'autant plus, précise-t-il, que la Chine a posé sa candidature pour l'organisation des JO d'hiver en 2022. Il a aussi annoncé des mesures pour faciliter l'obtention des visas, sans toutefois en spécifier le contenu. L'envolée soudaine du franc suisse par rapport à l'euro le mois dernier a bien sûr été abordée, des journalistes souhaitant en connaître les répercussions sur les échanges commerciaux, le tourisme et le budget des étudiants chinois en Suisse. L'ambassadeur en a d'abord rappelé les causes : il a mis en exergue la politique d'indépendance de la Banque nationale Suisse et justifié la décision d'abandonner la défense du cours plancher de 1,20 franc suisse par euro, disant que « plutôt que de s'interroger sur le désarrimage du franc suisse et de l'euro, il faut s'interroger plutôt sur la nécessité initiale de cet arrimage ». Il s'est ensuite montré rassurant, indiquant que le taux de change du franc suisse et du renminbi n'avait pas été affecté. Le rapport franc suisse/renminbi était de 1/7 à son plus haut de 2014 avant de chuter à 1/6 en janvier 2015. Il est repassé à 1/7 en l'espace de quelques jours mais se stabilise maintenant autour de 1/6,5. Le désarrimage du franc suisse à l'euro est donc, selon lui, indolore pour les touristes et étudiants chinois. Pour dissiper tous les doutes, et pour rappeler la tradition horlogère de son pays, il poursuit en disant que pour acquérir une montre suisse, le touriste chinois a le choix entre son achat en Chine, en Suisse et, par exemple, en France. « Où croyez-vous que le touriste réalisera la meilleure affaire ? », conclut-il.
Beijing Information |