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Publié le 24/12/2014
Une lueur d'espoir dans les relations sino-japonaises

Bai Shi

Rencontre entre Xi Jinping et Shinzo Abe à Beijing le 10 novembre

La rencontre prévue entre le président chinois et le premier ministre japonais en amont du 22ème Sommet des dirigeants économiques de l'APEC à Beijing a galvanisé les espoirs sur une possible amélioration des relations entre la Chine et le Japon.

Celle-ci s'est déroulée le 10 novembre à la demande du Japon et fut la première après deux années marquées par de nombreuses disputes sur des questions historiques et territoriales.

En 2012, le gouvernement japonais avait annoncé le « rachat » des îles chinoises Diaoyu, ce qui amena la Chine à prendre des mesures de rétorsion. Après l'élection de Shinzo Abe pour un second mandat au poste de premier ministre en 2012, le Japon s'était montré extrêmement ferme en ce qui concerne les disputes territoriales, ce qui avait eu pour effet d'exacerber les tensions avec la Chine. L'augmentation des patrouilles chinoises et japonaises dans les eaux territoriales contestées avait notamment engendré plusieurs altercations et le dialogue avait été rompu.

Au-delà de ces disputes territoriales, le gouvernement japonais s'est aussi comporté de manière mal avisée à l'encontre de la Chine. Au mois de juillet, il a approuvé une réinterprétation controversée de la constitution japonaise, mettant un terme à l'interdiction de légitime défense collective pour ses forces armées. Pour de nombreux observateurs, ce pourrait être la première étape vers une possible remilitarisation du Japon.

L'animosité historique entre les deux parties complique aussi les relations actuelles. Le gouvernement japonais a longtemps eu une attitude ambiguë concernant les atrocités commises par ses armées durant la Seconde Guerre mondiale. Le sanctuaire Yasukuni, qui honore parmi les Japonais 14 criminels de classe A, a reçu à maintes reprises la visite de nombreux politiciens japonais, au mépris de la forte opposition des pays ayant souffert de l'invasion japonaise pendant la guerre. L'année dernière, la visite de Shinzo Abe au sanctuaire de Yasukuni avait mis à mal les relations du Japon avec ses voisins d'Asie de l'Est. La Corée du Sud avait, elle aussi, dénoncé ce faux pas du premier ministre japonais.

Dans le courant de l'année, Shinzo Abe a répété à de nombreuses reprises lors d'événements internationaux, qu'il espérait pouvoir rencontrer le dirigeant chinois durant le Sommet des dirigeants de l'APEC à Beijing. En réponse, le ministère chinois des Affaires étrangères avait appelé le Japon à assainir la situation, condition essentielle pour que cette rencontre puisse avoir lieu.

Une percée significative dans ce bras de fer diplomatique a finalement été réalisée quelques jours seulement avant le Sommet des dirigeants économiques de l'APEC.

Le 7 novembre, le conseiller d'Etat chinois Yang Jiechi et le conseiller à la sécurité nationale Shotaro Yachi ont ainsi pu s'accorder sur un accord en quatre points lors de leur rencontre à Beijing. Dans un esprit « d'honnêteté face à l'histoire et d'espoir en l'avenir », les deux parties se sont accordées pour reprendre un dialogue sur les plans politique, diplomatique et sécuritaire, tout en reconnaissant leur différence de point de vue sur les îles Diaoyu.

Pour les observateurs, cet accord semble être le résultat d'une pression nationale et internationale grandissante sur le gouvernement de Shinzo Abe.

Celui-ci semble finalement avoir réajusté sa politique envers la Chine. Lors de sa rencontre avec Xi Jinping, il a annoncé que le Japon était déterminé à continuer sur la voie d'un développement pacifique, notant que le gouvernement japonais actuel maintiendrait la même position sur les questions historiques que les gouvernements précédents.

Selon lui, le Japon est prêt à mettre en œuvre l'accord en quatre points, à traiter les questions afférentes de façon sérieuse, et à en faire le point de départ pour l'amélioration et le développement de relations stratégiques et mutuellement bénéfiques entre la Chine et le Japon.

« Le développement pacifique de la Chine est une opportunité significative pour le Japon et pour le reste du monde », a-t-il déclaré face à Xi Jinping.

Pour Qu Xing, directeur de l'Institut chinois des Etudes internationales, du fait que la rencontre entre Xi Jinping et Shinzo Abe s'est tenue à la demande de la partie japonaise, celle-ci diffère d'une simple visite de travail ou d'une visite formelle de dirigeants : « En un sens, cette rencontre aidera à l'amélioration des relations sino-japonaises. La réconciliation entre la Chine et le Japon ne dépend que de la partie japonaise ».

Lors de leur rencontre, le président chinois put souligner une fois de plus l'importance des conditions politiques dans l'amélioration des relations sino-japonaises : « Le gouvernement japonais doit se conformer aux quatre documents politiques établis entre la Chine et le Japon et honorer les engagements pris par les gouvernements japonais successifs. Ceux-ci incluent le discours de l'ancien premier ministre Tomiichi Murayama, dans lequel il exprime l'importance des dégâts et des souffrances imposés aux peuples de nombreux pays, particulièrement en Asie, par la politique coloniale et d'agressions du Japon, et appelle à ce que de telles erreurs ne soient pas renouvelées. Ce n'est que de cette façon que le Japon parviendra à créer des liens amicaux et tournées vers l'avenir avec ses voisins asiatiques. »

Les quatre documents politiques entre la Chine et le Japon font référence à la Déclaration conjointe sino-japonaise signée en 1972, au Traité de paix et d'amitié entre la Chine et le Japon de 1978, à la Déclaration conjointe de 1998 et à celle signée en 2008 sur l'avancée globale des relations stratégiques et mutuellement bénéfiques entre les deux pays.

Pour les observateurs chinois, si le Japon s'engage réellement sur l'accord en quatre points et le met en pratique de façon sincère, les relations entre les deux pays pourront s'améliorer. Dans le cas contraire, elles continueront de se détériorer.

Gao Hong, directeur adjoint de l'Institut des Etudes japonaises au sein de l'Académie chinoise des sciences sociales (CASS) estime que l'accord en quatre points est une étape nécessaire dans l'amélioration des liens entre la Chine et le Japon. Cependant, il note que les politiciens japonais ont une longue histoire de promesses non tenues : « Nous ne devrions pas être très optimistes quant à l'amélioration des relations sino-japonaises. Les disputes sur les questions historiques et territoriales vont probablement continuer et nous devons rester attentifs. Les patrouilles maritimes pour préserver la souveraineté des îles Diaoyu devraient continuer. »

Yang Bojiang, autre directeur adjoint de l'Institut des Etudes japonaises au sein de la CASS, fait remarquer que les disputes entre la Chine et le Japon sont profondément enracinées. Selon lui, Shinzo Abe était contraint de se montrer proactif du fait d'une pression politique grandissante au Japon et à l'étranger : « L'effet stimulant à court-terme de la politique économique prônée par Shinzo Abe touche à sa fin, mais n'a pas abouti à un effet sur le long-terme. Pour cette raison, de nombreuses institutions financières internationales ont revu à la baisse leurs prévisions de croissance pour l'économie japonaise. Par ailleurs, de nombreux Japonais ont aussi remis en cause le fait que Shinzo Abe n'ait pas maintenu de bonnes relations avec les pays voisins. »

Les Etats-Unis, qui sont le partenaire le plus important du Japon, l'ont aussi exhorté à poursuivre les négociations dans la résolution des conflits.

Pour Yang Bojiang, si Shinzo Abe tourne le dos à ce consensus, cela n'endommagera pas seulement les relations sino-japonaises, mais aussi sa carrière politique. « La route qui nous attend peut réserver des surprises et on ne peut exclure la possibilité d'un regain de tensions. C'est pourquoi il nous faut rester vigilants. »

 

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