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Publié le 19/12/2014
Tour d'horizon des relations sino-françaises en 2014

Peng Shuyi

Le thème principal des relations sino-françaises en 2014 aura été le cinquantenaire de l'établissement des relations diplomatiques entre les deux pays. Il y a 50 ans en effet, le président français Charles de Gaulle fit preuve de courage et de jugement et démontra sa vision stratégique, surmonta les obstacles idéologiques dans un contexte de guerre froide et face à des pressions énormes, reconnut la nouvelle Chine socialiste, servant d'exemple aux autres puissances occidentales. Les deux pays ont depuis noué des liens d'amitié allant au-delà de l'ordinaire. A l'heure actuelle, avec la fin de la guerre froide, le mot d'ordre principal est « développement ». L'économie a remplacé l'idéologie pour devenir le principal élément d'influence des relations internationales et les relations entre les deux pays sont devenues plus pragmatiques. Depuis la signature le 26 mars 2014 du « Plan de développement à moyen et à long terme des relations entre la Chine et la France », il est aisé de voir qu'actuellement, tout en maintenant un haut niveau stratégique, les deux pays renforcent constamment la coopération économique, particulièrement en cette période de cinquantenaire et recherchent de nouvelles aires de coopération économique et commerciale dans une optique de bénéfices mutuels. La Chine et la France passent ainsi progressivement des hautes sphères à un niveau plus pragmatique.

Les relations politiques : maintenir un haut niveau stratégique

L'année 2014 a marqué le 50e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France. Dans le domaine politique, les deux parties ont déjà établi un mécanisme de dialogue annuel au niveau des chefs des deux Etats qui oriente des mécanismes d'échanges et de dialogue à de nombreux échelons et guide la progression constante des relations de partenariat stratégique d'ensemble. Le 26 mars, lors de la visite d'Etat en France du président chinois Xi Jinping, les deux pays ont publié un communiqué conjoint proposant d' « initier une nouvelle ère de relations de partenariat stratégique d'ensemble resserrées et durables entre la Chine et la France ». La relation de partenariat stratégique d'ensemble sino-française a été établie en 2004 sur la base de la relation de partenariat d'ensemble initiée en 1997. A la base des relations bilatérales, « la relation de partenariat stratégique d'ensemble » est profondément ancrée.

Il y a 50 ans, alors que les principales puissances occidentales avaient une attitude hostile à l'égard de la nouvelle Chine socialiste, le Général de Gaulle prit la décision d'établir des relations diplomatiques avec la Chine. Les deux grands personnages de l'époque, le Général de Gaulle et Mao Zedong, croyaient que la confiance mutuelle et les avantages réciproques seraient une initiative mutuellement bénéfique. Cette décision historique a fermement enraciné le développement stable et sur le long terme des relations bilatérales. Cinquante années plus tard, et même s'il y a eu quelques périodes d'instabilité, avec des revirements et des régressions, comme lors de la vente de matériel militaire à Taïwan, des perturbations à l'occasion du relais de la flamme olympique à Paris et de la rencontre d'un dirigeant français avec le dalaï-lama, ces difficultés ont pu être surmontées et les différends aplanis pour revenir à la situation qui prévalait au début.

Depuis longtemps, la Chine et la France ont une vision du monde et des intérêts identiques. Sur la scène internationale, les deux pays s'accordent sur les principes d'indépendance et d'autodétermination, recherchent l'établissement d'un système mondial multipolaire, s'opposent à toute création d'un ordre unilatéral qui compromettrait la paix mondiale. La France, un des pays fondateurs de l'Union européenne, joue un rôle de première importance dans cette entité : la confiance et les avantages réciproques entre la Chine et la France ne concernent donc pas seulement la France, mais s'inscrivent dans le cadre plus large de l'Union européenne.

Dans leurs relations bilatérales, les deux pays réitèrent leur indépendance, la compréhension mutuelle, leur vision d'ensemble pour l'avenir et la coopération mutuellement bénéfique. Sur la base de la recherche d'un terrain d'entente et en laissant de côté les différends mineurs, les deux pays continuent de traiter et de régler les relations bilatérales dans une perspective stratégique et sur le long terme. Les deux pays maintiennent les visites resserrées de haut niveau, renforcent la coopération et les échanges tous azimuts et à tous les niveaux, renforcent la concertation régulière et encouragent le développement de la coopération stratégique sur les questions internationales d'importance comme la lutte contre le terrorisme, le changement climatique et la paix régionale et mondiale.

Relations économiques : développer de nouvelles aires de coopération

Les relations économiques sont une partie importante des relations entre la Chine et la France. En 2014, davantage de secteurs économiques ont été concernés par les échanges bilatéraux, mais si on les compare avec la vitalité des relations politiques, les relations économiques restent plus en retrait. Le problème le plus saillant, c'est que même si la France est le quatrième partenaire économique de la Chine dans l'Union européenne, les relations économiques et commerciales sont sérieusement déséquilibrées. La France accuse depuis longtemps un déficit commercial vis-à-vis de la Chine, ce qui désole le président français et motive les critiques voilées que la France adresse à la Chine. Les commentaires qu'on entend souvent en France sont par exemple que « la relation de partenariat stratégique Chine-France est une coquille vide, sans valeur » ou alors qu'il existe « un fossé entre la diplomatie et l'amitié d'un côté et les relations économiques et commerciales de l'autre ». La réalité, c'est que la différence entre la vitalité des relations politiques et la morosité des relations économiques est une grande faiblesse qui entrave l'approfondissement du développement des relations entre les deux pays. Si on les compare avec celles de son puissant voisin allemand, les relations économiques et commerciales entre la France et la Chine restent loin derrière.

La situation que nous venons d'évoquer provient surtout des changements intervenus dans les deux pays en termes de puissance. Depuis ces dernières années, la position de la Chine sur la scène économique internationale ne fait que croître. La France par contre subit les affres de la mondialisation, particulièrement ces dernières années avec la crise économique et financière internationale ainsi que la crise de la dette souveraine en Europe. L'économie française reste affaiblie, le chômage élevé, la dette publique de plus en plus lourde, le marché de la main-d'œuvre rigide, les réformes difficiles, et jamais depuis 1945 la France n'avait connu de difficultés économiques aussi sérieuses. La position dominante de la France dans l'Union européenne a été battue en brêche et la mission principale des derniers gouvernements français aura été de raviver l'économie.

Dans des circonstances aussi moroses, le gouvernement de gauche est contraint de changer ses conceptions fortement teintées d'idéalisme pour prendre la voie du pragmatisme. Il met l'accent sur la diplomatie commerciale et propose clairement de mettre la diplomatie au service de l'économie. Dans ce contexte, la France place de grands espoirs dans la Chine, la seconde entité économique mondiale ; elle souhaite que la Chine achète des quantités importantes de produits français et aide la France à surmonter les difficultés économiques. C'est pour cette raison principalement que lors de sa visite en France en mars dernier, le président chinois Xi Jinping a été reçu en grande pompe, un fait sans précédent. Il est cependant à regretter que la place avantageuse de la France sur la scène internationale s'affaiblisse : le secteur industriel n'arrive pas à la hauteur de l'Allemagne, les secteurs de l'électronique et de la haute technologie n'arrivent pas à la hauteur des Etats-Unis. La coopération économique bilatérale entre la France et la Chine sur le long terme ne concerne que les trains à grande vitesse, le nucléaire, l'aéronautique, trois grands domaines où la France possède un avantage. L'innovation reste en retrait. C'est une des causes majeures de l'accroissement continu du déficit commercial de la France vis-à-vis de la Chine.

Pour changer cette donne et pour que la relation de partenariat stratégique entre la Chine et la France soit plus substantielle, pour consolider les fondations économiques bilatérales, les deux pays ont décidé, en même temps que le maintien et le renforcement de la coopération dans les secteurs traditionnels comme le nucléaire, de trouver de nouvelles aires de coopération et d'explorer de nouvelles avenues. Actuellement, la Chine connaît des transformations dans les sphères économiques et sociales, elle doit abandonner les modèles éculés et moderniser son tissu industriel pour l'orienter sur la voie du développement durable. La Chine insiste sur l'établissement de villes de petite et moyenne importance, renforce le secteur tertiaire comme la culture et le tourisme, développe chaque jour un peu plus une agriculture moderne, des produits biologiques, des énergies renouvelables, etc. La Chine a par conséquent un besoin urgent de bénéficier d'expériences et de technologies avancées. La France possède dans ces nombreux domaines une place de choix et peut donc combler les lacunes en Chine. Les perspectives de coopération entre les deux pays dans ces domaines sont immenses. Dans le « Plan de développement à moyen et à long terme des relations entre la Chine et la France », il est proposé explicitement de développer la coopération dans les villes nouvelles, le secteur médical et pharmaceutique, mais aussi les industries des denrées alimentaires, l'agriculture moderne, des services urbains, des transports, des canalisations souterraines, des énergies renouvelables, du commerce électronique, etc. Les deux pays ont aussi décidé de renforcer la coopération entre les PME, de créer un fonds d'investissement pour les PME, d'améliorer fondamentalement la question du déficit commercial structurel. La France s'est aussi engagée à améliorer l'environnement des investissements ; elle accueille les entreprises chinoises à participer au projet du Grand Paris ainsi que les touristes chinois en simplifiant les procédures d'obtention de visa.

Relations culturelles : renforcer les liens

Par rapport aux sphères économiques et commerciales, les échanges culturels entre les deux pays se développent de manière rapide et vigoureuse. Deux grandes civilisations mondiales, la France et la Chine voient toutes deux la culture comme un vecteur de la puissance douce et s'efforcent, par le biais de l'influence subtile et durable qu'exerce la culture, de renforcer la communication et la compréhension et d'effacer barrières et incompréhensions afin de jeter des bases durables et saines pour les relations bilatérales. La France, grande puissance culturelle et mère des arts, avec sa longue tradition de faire de la culture un instrument de la diplomatie, a été le premier pays avec lequel la Chine a organisé des années croisées de la culture. Les deux pays ont aussi ouvert mutuellement des centres culturels.

Dans le même temps, les deux pays s'efforcent de promouvoir la diversité culturelle afin d'éviter l'uniformité et l'homogénéisation. Dans un monde où l'anglais règne en maître, particulièrement auprès des jeunes, la diffusion des cultures des autres langues est encore plus précieuse. Pour que les gens se détournent des superproductions hollywoodiennes pour mieux connaître les productions françaises ou chinoises, il faut accroître la confiance et la compréhension mutuelle. En 2014, les deux pays ont organisé des spectacles, concerts, pièces et autres représentations scéniques, des festivals du film, des expositions de peinture, de sculpture et archéologiques notamment, dans le cadre des événements et des échanges culturels et artistiques.

Dans le domaine éducatif, la coopération s'est approfondie. L'Université des communications de Shanghai, l'Université de Beijing et l'Université Tsinghua notamment ont signé de nouveaux accords avec des établissements et des laboratoires de pointe. Ces initiatives fournissent à toute une génération de jeunes une plateforme et des opportunités d'échanges qui permettront de passer le relais dans les relations bilatérales entre la Chine et la France.

L'auteur est chercheuse associée au département Europe de l'Institut des sciences sociales de Chine.

 

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