L'interconnectivité : nouveau pilier pour l'APEC |
Wang Zhenyu Chercheur à l'Institut de Chine pour les études internationales et directeur du Comité national chinois pour la coopération économique dans la région Pacifique Ces dernières années, la construction des infrastructures et l'interconnectivité ont été des questions importantes au sein de la Coopération Economique pour l'Asie-Pacifique (APEC). Elles seront l'un des trois thèmes principaux de la 22e réunion informelle des dirigeants économiques de l'APEC, qui aura bientôt lieu à Beijing. L'interconnectivité concerne la circulation de matériels, de logiciels et des personnes. L'interconnectivité du matériel consiste principalement à améliorer les performances des infrastructures de la chaîne logistique pour les télécommunications, l'énergie, les transports, le transport de marchandises, au sein d'entités économiques intégrées et connectées. L'interconnectivité des logiciels consiste à l'uniformisation et la coopération au niveau des régulations et des procédures. L'interconnectivité des personnes est représentée par la circulation transfrontalière des individus. L'APEC représente 40 % de la population mondiale avec 2,8 milliards de personnes. Au niveau des valeurs mesurées en parité de pouvoir d'achat (PPA), son PIB représente 54 % du PIB mondial et son volume des échanges commerciaux représente 44 % des échanges commerciaux dans le monde. Selon un rapport de la Banque mondiale, si l'efficacité de l'interconnectivité au sein de la chaîne logistique augmentait de 10 points de pourcentage, le PIB de l'APEC augmenterait de 21 milliards de dollars. L'interconnectivité ne rend pas seulement le transport de marchandises plus pratique, mais elle rend la circulation des personnes plus libre. D'après un rapport de l'Organisation Mondial du Tourisme, le nombre de touristes étrangers devrait passer de 38 millions à 57 millions d'ici à 2016, grâce à la facilitation des obtentions de visa. Cela permettrait aux revenus du tourisme de passer de 65 milliards de dollars à 89 milliards, et le nombre d'emplois concernés de 1,8 à 2,6 millions d'emplois. L'institutionnalisation de l'interconnectivité en Asie-Pacifique Malgré l'importance que l'APEC a toujours accordée à la coopération pour la construction des infrastructures et à l'interconnectivité, leur concrétisation fait encore face à de nombreux challenges. La coopération pour la construction des infrastructures et l'interconnectivité nécessite notamment un engagement financier considérable, qui dépasse les capacités de financement de l'APEC. Elle exige aussi la coopération sur le plan technique et économique, ainsi que l'édification des compétences. Ce ne sont malheureusement pas ses points les plus forts. Par ailleurs, les attentes varient fortement de part et d'autre du Pacifique et entre les différents membres de l'APEC. Le caractère peu contraignant et la faiblesse exécutive de cette dernière sont par ailleurs autant d'obstacles à la mise en place du processus de coopération nécessaire à la construction d'infrastructures et à l'interconnectivité. Un processus d'institutionnalisation doit donc être établi, afin de permettre à la construction d'infrastructures et à l'interconnectivité de jouer pleinement leur rôle dans les futurs partenariats de la région. Depuis la réunion informelle des dirigeants économiques de l'APEC en octobre 2013 et l'adoption d'un « Cadre pour l'interconnectivité de l'APEC », ces questions furent approfondies au cours d'un Forum de discussion et 4 réunions entre haut-responsables. A la suite de ces rencontres et d'un atelier sur la feuille de route pour l'interconnectivité, la Chine et l'Indonésie ont sollicité, en amont de la réunion informelle de Beijing, le point de vue et les conseils de nombreuses institutions régionales et internationales, comme les forums de l'APEC, l'ASEAN, le G20, la zone de développement économique du Bassin du Mékong, la Banque asiatique de développement (BASD) et l'OCDE. Ils ont produit ensemble une « feuille de route pour l'interconnectivité », qui détaille un plan d'actions et énonce les objectifs fondamentaux pour l'année à venir. Aujourd'hui, la plupart des membres de l'APEC soutiennent la construction institutionnelle, ainsi que la mise en place de l'interconnectivité et la construction des infrastructures. Le rôle de la Chine « Pour accéder aux richesses, il faut d'abord préparer la voie. » Le développement de la Chine montre que la construction des infrastructures et de l'interconnectivité est une condition et un résultat de la croissance économique. La participation plus active de la Chine dans la coopération économique régionale a renforcé l'importance qu'elle accorde à l'interconnectivité au niveau international. Par les partenariats économiques, elle aspire à la création d'un environnement interconnecté, stable et prévisible, dans lequel les coûts sont réduits et les performances élevées. En ce qui concerne l'interconnectivité et la construction d'infrastructures, la Chine possède des atouts indéniables et souhaite prendre part de manière plus active aux coopérations internationales. En octobre 2013, le président chinois Xi Jinping a abordé, lors de la 21ème rencontre informelle des dirigeants de l'APEC, la question d'une interconnectivité, qui couvre les structures de part et d'autre du Pacifique et solutionne les problèmes de « goulots d'étranglement ». Il a par ailleurs encouragé chacun des membres à participer activement à la coopération dans un esprit de bénéfices mutuels et d'avantages complémentaires, en adhérant au principe de coopération ouverte, transparente et gagnant-gagnant. Ainsi, l'interconnectivité permettra d'établir des relations solides en Asie-Pacifique et d'approfondir la compréhension et la confiance mutuelles. Les questions liées à une coopération interconnectée sont nombreuses. La Chine s'est efforcée de développer les domaines de coopération, d'enrichir son contenu et de promouvoir une coopération multidimensionnelle à tous les niveaux. L'objectif est de parvenir à une structure d'interconnectivité en Asie-Pacifique, unifiant la circulation des marchandises, des logiciels et des personnes. Après la libéralisation des investissements et la coopération économique et technique, la réunion de cette année devrait faire de l'interconnectivité un nouveau pilier dans le processus de coopération économique de l'APEC. Historique du processus de construction des infrastructures et de l'interconnectivité En 1993, les dirigeants des pays membres de l'APEC s'engagèrent, lors du Sommet de Seattle, à promouvoir les communications et les transports, renforcer les contacts entre les diverses entités économiques, et améliorer la fluidité et la rapidité de circulation des biens et des personnes. Entre 2002 et 2006, puis 2007 et 2010, l'APEC mis en place deux plans pour faciliter l'économie, ayant chacun pour but de réduire les coûts moyens de transaction de 5 % et de promouvoir ainsi l'interconnectivité des logiciels entre Etats membres. En 1999, l'apparition de la carte de voyage d'affaires de l'APEC (CVAA) facilite grandement les déplacements des hommes d'affaires au sein des économies membres. Les statistiques montrent qu'entre mars 2010 et mars 2011, près de 90 000 détenteurs de la CVAA ont ainsi pu éviter les formalités de demandes de visa et économisé 43,3 % des coûts. Les coûts liés au temps nécessaire au dédouanement ont diminué de 52,4 % et les frais occasionnés par les demandes de visa ont diminué de 27,8 %, totalisant ainsi une économie de 37 milliards de dollars. En 2009, le concept d'interconnectivité fut adopté au cours de la réunion informelle des dirigeants de l'APEC et huit obstacles entravant les capacités d'ensemble de la chaîne logistique dans la région - faisant augmenter les frais des entreprises, diminuer l'efficacité et augmenter l'incertitude - furent identifiés. En 2010, la déclaration de Yokohama traça le contour des trois domaines de l'interconnectivité. En 2011, le sommet d'Honolulu introduisit le concept d'économie régionale intégrée (seamless regional economy) et proposa des actions concrètes dans les trois domaines de l'interconnectivité. En 2012, le sommet de Vladivostok souligna l'importance de la construction d'une chaîne logistique fiable et des partenariats éducatifs transnationaux. En 2013, le « Cadre pour l'interconnectivité de l'APEC » et le « Plan pluriannuel d'investissement et de développement des infrastructures » (MYPIDI) furent adoptés au cours de la réunion informelle des dirigeants de l'APEC. Ceux-ci décidèrent de construire une Asie-Pacifique interconnectée et intégrée. L'adoption du « Cadre pour l'interconnectivité de l'APEC » marqua le début d'une nouvelle ère dans la coopération formelle et multidimensionnelle pour la promotion de l'interconnectivité au sein de l'APEC. Elle fit aussi de l'interconnectivité un nouveau pilier dans son processus de coopération économique.
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