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Publié le 13/01/2014
Impressions sur l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France

Cai Fangbai, ancien ambassadeur de Chine en France

En décembre 1963, j'étais à l'université de Genève et j'avais été transféré pour servir d'interprète à une délégation chinoise dans le secteur des hydrocarbures en visite en France. J'ai soudain reçu un appel de l'ambassade de Chine en Suisse qui me demandait de revenir sur le champ pour une nouvelle mission.

Cai Fangbai  (Photo: Shi Gang)

A mon retour à l'ambassade, j'ai été informé des négociations qui se déroulaient entre la Chine et la France pour l'établissement des relations diplomatiques. Les autorités chinoises avaient décidé de m'envoyer avec un autre camarade joindre un groupe de travail préliminaire destiné à préparer la future ambassade de Chine en France. Après avoir régularisé ma situation à l'université, j'ai été affecté début janvier 1964 à l'ambassade de Chine en Suisse au bureau de la recherche. Peu après l'arrivée à Paris du groupe de travail, nous avons débuté notre mission. C'était ainsi que j'ai pris connaissance des vicissitudes rencontrées dans le processus de rapprochement de nos deux pays ainsi que des enjeux des décisions de nos hauts dirigeants.

Le 18 mars 1962, la France signait les Accords d'Evian avec l'Algérie qui mettait fin à la guerre d'Algérie. Le dernier obstacle à l'établissement des relations diplomatiques était donc éliminé. Le général de Gaulle a dès lors commencé à chercher à créer des liens avec la Chine. En octobre 1963, il y dépêchait l'ancien premier ministre français Edgar Faure, porteur d'une missive personnelle. En sa qualité d'envoyé spécial, il devait discuter avec les dirigeants chinois de l'établissement des relations diplomatiques. Suite à l'invitation de Zhang Xiruo, président de l'Association du peuple chinois pour les affaires étrangères, Edgar Faure et son épouse sont arrivé à Beijing le 22 octobre. Edgar Faure a eu des entretiens avec le premier ministre Zhou Enlai et le vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères Chen Yi à Beijing et Shanghai.

Les négociations ont buté sur la question de Taïwan, avec qui la France ne voulait pas rompre de son propre chef ses relations diplomatiques. Il a même été question de la possibilité d'y maintenir un personnel consulaire. Le premier ministre Zhou a alors déclaré : « L'opposition de la Chine à « deux Chines » est ferme et ne changera pas ». Devant la volonté de la France de maintenir un consulat, Zhou Enlai a répondu : « C'est impossible ». Afin de laisser du temps à la réflexion, Zhou Enlai a décidé de suspendre les négociations afin d'examiner de nouvelles mesures pendant que les époux Faure visitaient Datong et Houhehot. Trois jours plus tard, le couple était de retour à Beijing et la Chine a présenté un nouveau projet.

Après des discussions prolongées, le premier ministre Zhou Enlai et Edgar Faure se sont entendus sur les termes d'un accord tacite en trois points. Le premier, c'est que le gouvernement de la République française ne reconnaît que le gouvernement de la République populaire de Chine comme seul représentant légal du peuple chinois. Son corollaire, c'est que le soi-disant gouvernement de la « République de Chine » à Taïwan n'exerce plus cette fonction. Deuxièmement, la République française soutient les droits et statut légitimes de la République populaire de Chine à L'ONU, et cesse de soutenir ceux de la « République de Chine ». Troisièmement, après l'établissement des relations diplomatiques, quand le soi-disant gouvernement de la « République de Chine » à Taïwan rappellera ses représentants diplomatiques et fermera ses organes de représentation, la République française fera de même à Taïwan. Après que les deux parties ont signé un document relatif à l'établissement des relations diplomatiques, le président Mao Zedong a rencontré Edgar Faure et son épouse.

En octobre 1963, le premier ministre Zhou Enlai s'entretient avec Edgar Faure, l'envoyé spécial du général de Gaulle, sur l'établissement des relations diplomatiques avec la France. (Photo d'archives)

Le 5 novembre, les époux Faure sont repartis en France après une escale à Rangoon et à New Delhi. C'est à New Delhi qu'Edgar Faure a écrit un rapport adressé au général de Gaulle. Il a été transmis à l'Elysée par un diplomate en poste à New Delhi. Le 22 novembre, le président français rencontrait Edgar Faure et approuvait les conclusions de son rapport. Le 12 décembre, Jacques de Beaumarchais, le directeur de l'Europe continentale au ministère des Affaires étrangères, était envoyé à Berne pour y rencontrer l'ambassadeur de Chine en Suisse, Li Qingquan, afin d'y discuter des aspects concrets de l'établissement des relations diplomatiques. Conformément à l'esprit des instructions du général de Gaulle, M. de Beaumarchais a proposé de remplacer les échanges de notes, prévus dans l'accord tacite conclu à Beijing comme modalités d'établissement des relations diplomatiques, par la publication d'un communiqué conjoint ou de deux communiqués unilatéraux aux contenus similaires. Le 26 décembre, l'ambassadeur Li Qingquan partait en Algérie où le premier ministre Zhou Enlai effectuait une visite, pour lui demander personnellement des instructions. Malgré son emploi du temps chargé, Zhou Enlai lui a donné personnellement des instructions détaillées.

Le 2 janvier 1964, M. de Beaumarchais se rendait à l'ambassade de Chine en Suisse à la demande de Li Qinquan pour poursuivre les négociations. Au cours de ces discussions, la partie chinoise a mis en avant l'accord tacite en trois points et réaffirmé que l'établissement des relations diplomatiques s'effectuera selon les modalités énoncées dans l'échange de notes. M. de Beaumarchais a répondu que le dossier qu'il soumettait était conforme à l'esprit des discussions effectuées à Beijing, le plus simple étant le mieux. Voyant qu'il n'enfreignait pas les principes de l'accord tacite en trois points, Li Qingquan a poursuivi en disant: « Si la France reste réellement fidèle à la position de ne pas soutenir « deux Chine », et compte tenu des difficultés de la France, nous pouvons convenir des modalités proposées par la France et de la formulation du communiqué conjoint. Le gouvernement chinois va cependant publier sa propre explication, pour justifier sa décision d'établir des relations diplomatiques avec la France, à savoir que la République populaire de Chine est le seul gouvernement légitime à pouvoir représenter le peuple chinois ». M. de Beaumarchais a alors déclaré : « Vous recevrez une réponse formelle après que j'aurai rendu compte du contenu des négociations au gouvernement français ». M. de Beaumarchais a ensuite de son propre gré convenu du calendrier de la prochaine réunion.

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