Modifier la taille du texte

Modifier la taille du texte

Imprimer cet article

Commenter cet article

BEIJING INFORMATION
CULTURE Vidéos ÉDUCATION ET SCIENCES Panorama du Tibet VOYAGE E-MAIL
À LA UNE
Publié le 10/01/2014
Les liens affectifs avec la France

Un entretien avec Cai Fangbai, ancien ambassadeur de Chine en France

Depuis 1964, les relations sino-françaises sont passées par trois phases: après un développement dans des conditions favorables, elles sont tombées au plus bas avant l'établissement d'un partenariat stratégique global. A l'approche du 50e anniversaire du rapprochement entre les deux pays, Beijing Information rencontre un ancien diplomate qui a été témoin de grands événéments qui ont marqué cette amitié particulière.   

Yang Jiaqing

La prise de rendez-vous pour cet entretien avec l'ancien ambassadeur de Chine en France et en Suisse, Cai Fangbai, n'a pas été chose facile. Il a pris sa retraite en 2004, mais reste toujours très actif. Il est notamment responsable du Comité consultatif politique du ministère des Affaires étrangères et président d'honneur de l'Association chinoise des anciens diplomates. Il dirige par ailleurs le PEN Club des diplomates. C'est finalement au cœur de l'hiver, au siège de l'Association des anciens étudiants de retour d'Europe et des Etats-Unis, à proximité de la place Tiananmen, que l'entretien avec M. Cai Fangbai s'est finalement déroulé.

Cai Fangbai (Photo: Shi Gang)

Ce retraité toujours actif portait une paire de lunettes dont l'imposante monture laisse entrevoir un visage souriant. Avec sa voix enjouée, il marque son interlocuteur par sa présence. A plus de 70 ans, il reste encore alerte et vif. C'est devant une tasse de thé et dans un climat détendu que l'entretien de deux heures avec M. Cai s'est déroulé.

 

Une prise de fonction à un moment difficile

En août 1990, M. Cai Fangbai, qui était ambassadeur de Chine en Suisse, a été nommé ambassadeur en France. Le 19 novembre, accompagné de son épouse, il partait pour Paris pour y prendre ses fonctions.

A son arrivée, Cai Fangbai s'est trouvé confronté à une situation internationale en pleine évolution. Les deux grands bouleversements de cette période, à savoir la réunification en Allemagne en 1990, mais surtout l'effondrement de l'Union soviétique en 1991, mettaient fin à un environnement bipolaire. C'est dans ces circonstances de grands bouleversements que les dirigeants français ont mal interprété la situation et pris une série de mesures hostiles vis-à-vis de la Chine. La France a d'abord pris l'initiative d'imposer des sanctions à l'égard de la Chine mi-1989. Le pays a ensuite vendu six frégates à Taïwan en 1991, puis 60 chasseurs de nouvelle génération Mirage 2000-5. Ces actes ont gravement porté atteinte à la sécurité et à la souveraineté de la Chine, ainsi qu'à la réunification nationale.

« C'était un environnement très sombre pour nous à l'époque. Au début des années 1990, l'Occident a, à notre avis, commis une erreur stratégique grave. Ils estimaient qu'après l'effondrement de l'Union soviétique, la Chine subirait le même sort. Les pays occidentaux, dont la France, ont imposé des sanctions contre la Chine, cessé les relations au niveau politique et prohibé les ventes d'armes dans le but de ruiner la Chine ».

L'ancien diplomate estime que l'Occident a mal évalué la situation en Chine en raison de son inaptitude à avoir une vision d'ensemble. Qu'il s'agisse du déroulement de la révolution, de la construction économique et plus tard de la réforme et de l'ouverture, la Chine et l'Union soviétique diffèrent en de nombreux points. La révolution russe est le fruit de conflits violents qui se sont déroulés dans les centres urbains. En Chine, la révolution est l'aboutissement de plus de vingt années de luttes acharnées, au terme de l'encerclement des villes par les campagnes pour fonder la Chine nouvelle. Le Parti communiste chinois dispose donc d'une base solide constituée par les masses. Par ailleurs, même si la Chine s'est inspirée de l'URSS pour mettre en place son économie planifiée, des différences existaient. Si l'URSS s'est concentrée sur le développement de l'industrie lourde, le président Mao a par contre préconisé que l'économie se développe d'abord par l'agriculture, puis l'industrie légère et enfin l'industrie lourde. Après la politique de réforme et d'ouverture, la situation a complètement changé.

De de Gaule à Sarkozy, un ouvrage de Cai Fangbai

« Les pays occidentaux n'ont pas compris la situation en Chine, la situation militaire chinoise et la capacité du Parti et du gouvernement à contrôler la situation dans son ensemble, notamment la structure dirigeante. Deng Xiaoping et les autres dirigeants appartenant à l'ancienne génération, encore présents à l'époque, pouvaient maîtriser la situation afin de ne pas en perdre le contrôle. La réforme soviétique et la réforme chinoise étaient aussi différentes. M. Gorbatchev a commencé par la réforme politique et le cap n'était pas clair, alors que nous avons commencé la réforme en direction de l'économie, que nous avons progressivement étendu au politique, l'objectif étant d'améliorer le système socialiste aux caractéristiques chinoises », analyse M. Cai.

C'est dans ces circonstances que les relations entre les deux pays sont tombées au plus bas. On peut dire qu'elles ont stagné. Il a été très difficile de travailler à la reprise car l'Occident voulait isoler politiquement la Chine et faire pression sur la question des droits de l'homme notamment. Comme le dit Cai Fangbai dans son livre, « j'ai pris mes fonctions à un moment difficile ».

Afin de répondre aux méthodes contreproductives françaises, le gouvernement chinois s'est employé à lutter de pied ferme et a pris une série de mesures. D'abord, la Chine a opposé une résistance des plus fermes, exigeant la fermeture dans un délai d'un mois du consulat général de Guangzhou. C'est une mesure très importante. Ensuite, les négociations portant sur de grands contrats ont été annulées, principalement le métro de Guangzhou et la seconde phase de construction de la centrale nucléaire de Daya Bay. Il y a aussi eu la résiliation des contrats d'achat de blé français et l'arrêt de toute négociation avec la France portant sur des grands projets. Troisièmement, les échanges au niveau vice-ministériel ont fait l'objet d'un contrôle strict. Quatrièmement, enfin, plus aucun contact n'a eu lieu avec les quatre entreprises qui avaient vendu des armes à Taïwan.

L'Ambassade de Chine en France a également fait son travail dans la mesure du possible en rassemblant les personnalités françaises favorables à la Chine, en encourageant aussi les milieux d'affaires français à pousser leur gouvernement à modifier ses mesures erronées vis-à-vis de la Chine. En outre, l'ambassade a également suivi la situation, effectué des recherches et adressé des rapports tout en préconisant des mesures aux décideurs chinois.

« A cette époque, la situation était très difficile, mais en tant qu'ambassadeur, et grâce au soutien de la patrie qui n'a cessé de se développer globalement et de se renforcer, j'ai abordé mon travail avec confiance. Sur le plan politique chinois, les dirigeants du Parti étaient résolus et sur le plan économique, le développement suivait une trajectoire ascendante. C'est le fil conducteur de notre travail diplomatique. Le développement de la patrie se renforçant, nous autres diplomates nous exprimions avec plus de hardiesse », a déclaré Cai Fangbai avec enthousiasme.

1   2   3   4   page suivante  



Beijing Information
24 Baiwanzhuang, 100037 Beijing République populaire de Chine
Edition française: Tél: 68996274 Fax: 68326628