La Chine, qui a connu une croissance économique miraculeuse, va renforcer ses efforts pour protéger son environnement en s'attaquant à la pollution engendrée par son ancien modèle de développement.

Lan Xinzhen

Wang Jinnan, ingénieur en chef et directeur adjoint du Bureau de la planification environnementale relevant du ministère de la Protection de l'Environnement (MPE), a révélé, lors du 6^ème Forum sur l'industrie de la protection environnementale en Chine, tenu le 28 mars, que le gouvernement chinois accélérait l'affectation des investissements prévus pour la protection de l'environnement au cours du 12^ème Plan quinquennal, investissement qui s'élèvent à 3 400 milliards de yuans.

« Le MPE envisage d'intégrer le contrôle des particules PM2,5 dans le cadre des normes contraignantes. Les investissements en la matière vont être augmentés, ce qui annoncera une nouvelle ère pour l'industrie de la protection environnementale », a-t-il déclaré.

Au cours des derniers mois, la persistance d'un épais smog dans l'est de la Chine a poussé le gouvernement central à y attacher plus d'importance.

Selon les données du MPE, la part du budget de l'État à consacrer à la dépollution au cours du 12^ème Plan quinquennal sera augmentée de 57,4 % par rapport à la période précédente. Cette année joue un rôle crucial dans la mise en place des investissements prévus pour réduire les principaux polluants (notamment le dioxyde de soufre) de 8 % en 2015 par rapport à la fin de 2010.

De belles opportunités commerciales

Chongqing Jiulong Electric Power Co., LTD (Jiulong), entreprise cotée en Bourse spécialisée dans la production d'électricité, est prête à se transformer en entreprise spécialisée dans la protection de l'environnement. La transformation est telle que de nombreux regards se tournent vers elle.

Ancienne centrale thermique, Jiulong a investi dans le projet de désulfuration des fumées afin de répondre aux normes nationales strictes en matière de protection de l'environnement, ce qui en a fait l'une des premières entreprises à s'investir dans le domaine.

Selon le rapport de l'entreprise, l'accent sera mis sur les activités relatives à la protection de l'environnement, telles que la désulfuration des fumées, le traitement des eaux usées, la dénitrification et le traitement des déchets nucléaires.

Madame Huang Qinghua, vice-présidente de l'entreprise a fait savoir que celle-ci s'était fixée l'objectif de se hisser au premier rang du secteur.

Après son enquête sur Jiulong, Song Ying, chercheuse de la société boursière Wanlian, est parvenue à la conclusion que la transformation de l'entreprise est une bonne décision dictée par la politique nationale. « L'industrie de la protection environnementale est l'un des rares secteurs à obtenir les faveurs politiques du gouvernement central », a-t-elle dit.

De son côté, Hebei Sailhero Environmental Protection Hi-tech Co., Ltd. (Sailhero), entreprise spécialisée dans le contrôle de la qualité de l'air, a réussi à remporter des appels d'offres sur le projet de construction du réseau national de contrôle de la qualité atmosphérique dans des villes pilotes du Hebei.

À l'initiative du MPE, le projet vise à établir un réseau couvrant des zones et des villes d'importance majeure. Le MPE a prévu de commencer cette année par le contrôle dans 113 villes avant de s'étendre dans 388 villes en 2015. Sailhero va s'occuper du contrôle sur le PM2,5 (les particules fines), l'ozone (O3) et le monoxyde de carbone (CO).

Selon le calcul de Liang Yumei, chercheuse de la société boursière Shanxi, avec 20 points de contrôle par ville en moyenne, qui vaudrait chacun 200 000 yuans, le coût total du projet atteindrait 1,5 milliard de yuans. « Le contrôle de la qualité atmosphérique sera un secteur bénéfique pour les entreprises concernées », a-t-elle dit.

Wang Jinnan a dit qu'au cours du 12^ème Plan quinquennal, le gouvernement central allait s'attaquer au traitement de la pollution sur tous les plans, avec des investissements de l'ordre de milliers de milliards de yuans dans plusieurs secteurs tels que le contrôle de la qualité de l'air, la désulfuration et la dénitrification. Cela va certainement apporter de belles opportunités aux entreprises spécialisées dans le domaine.

Priorités aux investissements

Wang Shiwen, conseiller général de l'Union chinoise des investissements de l'environnement, a dit que les investissements sur la protection environnementale avaient deux priorités : prévenir la pollution ; apporter des solutions aux zones polluées. Le budget que l'État prévoit de consacrer pour l'année 2013 à la protection de l'environnement et à l'économie des énergies est de 210,127 milliards de yuans, soit une augmentation de 18,8 % par rapport à l'année dernière. Il s'agit de l'augmentation la plus rapide de toutes les dépenses budgétaires.

D'après le rapport sur le budget de l'État pour l'année 2013 établi par le ministère des Finances, la protection de l'environnement portera notamment dans les quatre domaines suivants : soutenir davantage le traitement de la pollution atmosphérique ; promouvoir la construction des projets de pointe sur les économies d'énergie et encourager le développement de l'industrie de services en matière d'environnement ; favoriser la prévention et le traitement des eaux usées, propulser l'établissement et la mise en service des réseaux des eaux usées et renforcer des efforts pour protéger l'environnement écologique des lacs ; procéder à la prévention et au traitement des métaux lourds et mettre en marche une nouvelle série d'aménagement dans des zones rurales.

Selon le rapport de la société boursière Wanlian, sous l'influence de la persistance d'un épais smog depuis le début de l'année dans l'est de la Chine, les activités de désulfuration et de dénitrification seront appréciées et demandées par le marché puisqu'il s'agit là d'un outil clé pour l'amélioration de la qualité de l'air.

Song Ying, chercheuse chez Wanlian, explique que conformément aux nouvelles normes nationales sur les émissions atmosphériques, à compter du premier janvier 2012, l'émission d'oxydes d'azote des nouvelles centrales thermiques doit se limiter à 100mg/m³ et avant le premier juillet 2014, toutes les anciennes unités doivent être renouvelées. Tout cela a permis d'ouvrir le marché de la désulfuration et de la dénitrification, qui n'avaient équipé que 17 % des entreprises du pays jusqu'à la fin de 2012. « L'installation des nouvelles unités et le renouvellement des anciennes unités ont tous besoin d'investissements importants », a-t-elle dit.

À l'heure actuelle, Jiulong est devenu leader du secteur. En 2012, le montant de ses commandes en la matière a déjà dépassé 2 milliards de yuans.

D'après Song Ying, il faut être surtout vigilant vis-à-vis des investissements sur les économies d'énergie. Malgré des soutiens financiers et politiques du gouvernement, les économies d'énergies, dictées par la situation de développement des secteurs en amont, comporte des risques.

Quand la conjoncture économique morose affaiblit les profits et aggrave les liquidités des entreprises industrielles, celles-ci sont moins motivées pour faire des économies d'énergie et vice-versa.

Un long chemin à parcourir

« Des gouvernements à tous niveaux vont prêter plus d'attention à la qualité de l'environnement, cela signifie que l'industrie de la protection environnementale va connaître un essor, mais il est encore trop tôt pour dire que l'environnement chinois va bientôt s'améliorer effectivement », a-t-il dit M. Chang Miao, directeur de l'Institut de gestion et de recherche sur les politiques environnementales de l'Université Tsinghua.

Pour le moment, l'industrie de la protection de l'environnement en Chine souffre de son manque de capacité d'innovation, de sa défectibilité dans son système d'innovation, de l'insuffisance des biens investis dans l'exploitation technique. Certaines techniques essentielles ne sont pas encore maîtrisées, quelques équipements clé reposent sur les importations. En dépit de la mise en place de plusieurs politiques nationales en la matière, les responsables locaux privilégient la croissance économique au détriment de l'application de ces politiques qui souffrent de l'insuffisance des investissements et de l'étroitesse des réseaux pour le financement. « Avant 2020 il est peu probable qu'on assiste à une amélioration sensible de l'environnement en Chine », a-t-il dit.

Selon Feng Bo, responsable du Département des normes techniques du MPE, le plus grand défi au développement chinois de la protection environnementale n'est pas le financement mais la technologie. En tant qu'industrie émergente stratégique, la protection environnementale aurait dû faire valoir le rôle d'orientation des technologies. Mais nos technologies en la matière sont confrontées à deux principales difficultés : le mode d'établissement des plans quinquennaux ne va pas avec le long cycle de l'exploitation technique ; les technologies destinées à traiter de la pollution apparaissent après l'établissement des normes.

Zhao Penggao, membre du Département de l'environnement et de l'utilisation globale des ressources de la CEDR est d'accord pour dire que les techniques sont effectivement l'un des obstacles dans le développement de l'industrie de la protection environnementale. À titre d'exemple, il existe de grandes opportunités sur le marché de la réhabilitation des sols, mais les techniques concernées laissent à désirer.

Il nous reste un long chemin à parcourir afin de réduire notre écart avec les pays avancés en termes de technologie.

Selon Wang Jinnan, il est nécessaire que le gouvernement central continue ses efforts pour promouvoir le développement de l'industrie de la protection de l'environnement en mettant en place des fonds destinés au développement de l'économie des énergies et de l'économie recyclable.

Beijing Information