Les Chinois attendent un nouveau doublement de leurs revenus |
Feng Haining et Wang Chuantao Si les Chinois ont retenu une des nombreuses promesses formulées lors du 18e Congrès du PCC, c'est bien celle-là : le doublement, d'ici 2020, du PIB et du revenu par habitant urbain et rural, par rapport au niveau de 2010. L'objectif est clair. Mais, au fond, qu'est-ce que c'est que ce « revenu » ? Et comment garantir que le « doublement » soit également réparti ? L'opinion s'est bien évidemment emparée de ce débat.
Le fossé entre riches et pauvres s'élargit en matière de revenu du capital Selon Liu Shangxi, directeur adjoint de l'Institut de Recherche sur les finances du ministère des Finances, le « revenu » mentionné dans le rapport du 18e Congrès du PCC correspond au revenu par habitant disponible. Si les objectifs de la politique actuelle sont atteints, avec la multiplication par deux du PIB, ce « revenu » pourrait doubler ou plus. C'est la première fois qu'un tel objectif figure dans le rapport de 18e congrès du PCC. Et pendant la dernière décennie, de 2000 à 2010, le revenu par habitant urbain et rural a déjà doublé. Ceci dit, un second doublement demeure tout à fait réalisable. Les milieux économiques le confirment, et le peuple y croit. Certains ont fait le calcul. Si le PIB maintient une croissance moyenne de 7,1% et le revenu par habitant, de 7 %, l'objectif sera rempli d'ici huit ans. Même avec des années aussi mauvaises que cette année, la mission sera accomplie à coup sûr. Certains prédisent même une plus grande hausse du revenu. Sans parler des politiques favorables de la réforme sur la distribution des revenus, telles que la hausse du salaire minimal, l'élargissement de la classe moyenne, la réduction fiscale et la création d'un système salarial consultatif. Mais attention ! Faut-il rappeler que ce nouveau « doublement » est un doublement « moyen » ? C'est à dire que, si les hauts salaires voient leurs revenus doubler, le reste de la population n'aura pas le même sort. L'écart entre les riches et les pauvres continuera de se creuser. Afin d'éviter une telle situation, il faut des projets d'augmentation précis, relatifs aux différentes couches sociales. Autrement dit, pour les 8 ans à venir, l'amplitude de la croissance du revenu des riches doit être restrictive. Evidemment, les riches ont davantage d'opportunités de gagner d'argent que les autres. Pour réduire la disparité entre les riches et les pauvres, il est impératif que tout le monde puisse s'enrichir, et notamment les plus modestes. Plus important, l'origine de cette disparité n'est pas le salaire, mais le revenu provenant du capital, qui doit faire l'objet d'un contrôle concret. Si une partie des Chinois a besoin de doubler son salaire, c'est bien la classe moyenne, partie majoritaire d'une société en olive, considérée comme la plus morale mais qui reste encore un idéal pour la société chinoise, toujours en forme d'haltère. Quant à ceux qui touchent un bas salaire, faute d'opportunités, ils bénéficient beaucoup moins de la croissance économique. Ils méritent un quadruplement de salaire, une mesure efficace pour réduire l'écart entre les riches et les pauvres. S'il est facile de doubler le revenu par habitant, il est pourtant difficile de contraindre l'enrichissement des riches tout en stimulant celui des pauvres. Car les premiers n'ont besoin de personne pour faire fortune, tandis que les autres ont besoin de l'aide du gouvernement, ce qui alourdira la pression financière sur l'Etat et rendra le processus lent et limité. On ne craint pas les impôts, mais l'injustice La 9e conférence annuelle du Forum international sur la Finance tenue le 17 novembre à Beijing a spécialement réservé un atelier à la question de la distribution des revenus en Chine. Dans son discours, Li Shi, directeur exécutif de l'Institut de recherche sur la distribution des revenus de l'Ecole normale de Beijing, a pointé le lien entre fiscalité et revenu : « Puisque l'impôt sur le revenu n'ébranle pas l'assiette fiscale générale, pourquoi ne pas élever le point de départ à 10 000 yuans ? En simplifiant les échelons contribuables, les départements fiscaux économisent les coûts administratifs destinés à la vérification des revenus, et le peuple en profite. Je propose une exécution immédiate. Certains prétendent qu'il faut pour ce faire des données statistiques difficiles à obtenir. Ces données sont-elles plus compliquées à calculer que le lancement d'une fusée Shenzhou ? » En juillet 2011, le Comité permanent de l'APN a ratifié le relèvement du seuil de l'impôt sur le revenu de 2 000 à 3 500 yuans, ce qui a eu des conséquences beaucoup plus grandes qu'imaginé. Le public a fait l'objet du respect des décideurs et en a obtenu de grands bénéfices. Cependant, l'impôt est un éternel sujet. La proposition de Li Shi a largement été diffusée sur Internet. En fait, payer moins d'impôts ne conduit pas forcément à une augmentation de revenu. Par contre, ceux qui paient plus d'impôts pourraient bien être heureux. Le nouvel objectif d'augmentation du revenu formulé par le 18e Congrès du PCC a suscité des débats dans les médias. Faut-il réajuster l'impôt sur revenu de façon correspondante ? Autrement, chacun portera un fardeau fiscal plus lourd. Mais de toute façon, afin d'augmenter le revenu des habitants, la fiscalité n'est que secondaire. L'impératif est de garantir l'égalité. Et cette égalité apporte un sentiment de bonheur et rend indulgent face aux percepteurs. Depuis quelques temps, les critères de choix d'un époux par les Chinoises font l'objet de critiques. L'amour abdique face à la naissance, la profession et le revenu. L'inégalité de la distribution des revenus a déformé la mentalité des gens. Dans un tel contexte, un salaire de 10 000 yuans par mois ou une appartenance à la classe moyenne n'auraient aucun sens. Comment répartir équitablement les biens ? Il faut avant tout lever deux obstacles : le monopole sectoriel et la corruption. Les secteurs tels que l'énergie, les télécommunications et la finance demeurent plus rémunérateurs que d'autres secteurs. Quant à certains détenteurs de pouvoir, ils font fortune grâce à un revenu gris incalculable. Ces phénomènes portent atteinte à la légalité et à la transparence du revenu. Revenons au sujet des impôts, qui intéresse chacun de nos citoyens, il vaut mieux les considérer raisonnablement. Les impôts ne sont pas à craindre. Le vrai coupable, c'est cet environnement inégal dans lequel un levier économique efficace pourrait bien devenir le complice de la disparité entre les riches et les pauvres.
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