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Publié le 24/09/2012
Création d'une nouvelle image de marque rurale

À Donggaocun, surnommé « le village des violons », près de 3 500 agriculteurs, sur une population totale de 33 000 personnes, sont comme Guo, engagés dans la fabrication des violons.

Hou Weili

Guo Lanzhen, du village de Donggaocun dans le district de Pinggu au nord-est de Beijing est une femme robuste de 47 ans, douce, généreuse, ingénieuse et digne de confiance. D'un esprit très créatif, elle possède une compétence très particulière, et aussi éloignée de l'agriculture que peut l'être la musique classique du rock ; elle fabrique des violons.

« Je confectionne des instruments depuis maintenant quatorze ans », explique-t-elle à BEIJING INFORMATION. Guo travaille à la fabrique d'instruments de musique Huadong. À Donggaocun, surnommé « la ville des violons », près de 3 500 agriculteurs, sur une population totale de 33 000 personnes, sont comme Guo, engagés dans la fabrication des violons.

Il est souvent dit qu'un violon sur trois dans le monde est fabriqué ici. Une telle production et un marché aussi durable devraient donc avoir de fortes retombées économiques sur la ville, mais dans les faits, celle qu'on considère comme le troisième plus grand centre de production de violons dans le monde ne récolte qu'une maigre part des profits étant donné que le prix est fixé par les intermédiaires étrangers.

La fabrication de violons représente toutefois une alternative au travail de la terre pour des agriculteurs qui auparavant en dépendaient complètement et permet ainsi d'améliorer leur niveau de vie.

Le paradis des violons

Personne n'avait prévu que la fabrication de violons deviendrait le pilier industriel de cette ville rurale, lorsque certains agriculteurs locaux ont commencé cette activité vers la fin des années 1980. On compte maintenant 20 fabricants majeurs de violons et 150 ateliers dans la ville, lesquels forment une chaîne industrielle complète allant de l'approvisionnement à l'assemblage en passant par la fabrication des éléments.

La production annuelle est estimée à environ 300 000 instruments de musique, d'une valeur atteignant les 350 millions de yuans (54,9 millions de dollars), soit 30 % du PIB de la ville. Environ 20 % des agriculteurs locaux travaillent dans cette industrie, laquelle contribue à hauteur de 20 millions de yuans (3,14 millions de dollars) au revenu annuel du gouvernement local.

« En travaillant ici j'ai l'impression d'être comme un urbain, avec des horaires de travail fixes. J'obtient grâce à cette activité un revenu supplémentaire d'environ 20 000 yuans (3 140 dollars) par an, en complément de l'agriculture », explique Guo Lanzhen. Dans sa fabrique, la confection d'un violon se divise en 30 étapes.

Suite au processus d'urbanisation, qui a entraîné l'amélioration des techniques agricoles et la raréfaction des terres arables, un nombre croissant d'agriculteurs se sont retrouvés sans emploi. Les plus jeunes de Donggaocun, qui ont bénéficié d'un meilleur enseignement, ont tenté leur chance à Beijing où les opportunités d'emploi sont plus nombreuses et les salaires plus élevés.

Cependant, pour des agriculteurs d'un certain âge comme Guo qui ne possèdent pas de compétences professionnelles particulières et ne peuvent compter que sur le travail de la terre, ces emplois dans les fabriques de violons représentaient un choix plus judicieux. « Cela ne demande pas de compétences particulières et les villageois peuvent réaliser les tâches demandées, malgré un enseignement reçu de moins bonne qualité », dit-elle.

« De plus, cette activité ne nous empêche pas de travailler la terre. Je peux demander un congé au moment de la récolte ou des semis », ajoute Guo.

Des profits limités

La crise financière qui a secoué l'économie mondiale en 2008 a également affecté la ville des violons. « La fabrication de violons est en fait similaire à la confection de vêtements » explique à BEIJING INFORMATION M. Zhao Wei, directeur adjoint du comité d'administration pour la « Music Valley » chinoise de Pingu. Selon lui l'industrie du violon s'est déplacée des pays développés d'Europe vers la Chine, en passant d'abord par le Japon, à la recherche d'une main d'œuvre moins chère. « La fabrication des violons est confrontée au même problème que le reste de l'industrie manufacturière chinoise, à savoir de faibles marges de profit », ajoute-t-il.

Les violons fabriqués à Donggaocun étaient destinés pour la plupart au marché international. Huadong Musical Instrument Factory, le plus gros fabricant de violons de la ville, qui produit 25 % des violons dans le monde, exporte 90 % de ses produits en Europe et aux États-Unis. « Sans nos propres marques, nous devons sous-traiter pour des marques étrangères connues de violons, et nous ne pouvons donc pas décider nous-mêmes du prix », déclare Zhao.

Les plus grands fabricants produisent des violons d'entrée de gamme ou de qualité intermédiaire. Le prix départ-usine de ceux vendus pour plusieurs centaines de dollars sur le marché international n'est que de 200 yuans environ (31,4 dollars). « La marge de profit pour chaque violon tourne autour de 10 yuans seulement (1,57 dollar) », raconte à BEIJING INFORMATION Geng Guosheng, propriétaire d'un atelier de confection de violons.

« Il est crucial de moderniser cette industrie », confie à BEIJING INFORMATION un représentant de Taiwan, Cui Changming. Cui travaille dans le commerce des instruments de musique depuis plus de 20 ans, et connaît bien le secteur de la fabrication de violons.

Notoriété et image de marque

Les fabricants et les artisans de Donggaocun sont conscients des défis à venir. « La solution serait d'augmenter la valeur ajoutée de nos produits », avance Liu Yundong, directeur général de Huadong Musical Instrument Factory.

Afin de promouvoir sa propre marque, «Huayun », Huadong a pris part de façon active à des concours internationaux. Au premier concours international de fabrication de violons, organisé en 2010, huit violons produits à Donggaocun se sont démarqués, se classant parmi les 50 meilleurs violons sur un total de 300 en provenance de pays du monde entier. Un des violons Huadong a d'ailleurs remporté la cinquième place.

« C'est un bon début, mais le coût de développement d'une marque reste relativement élevé », explique Cui. « Il faut mettre en place une stratégie complète de promotion et pouvoir compter sur un support financier suffisant », ajoute ce dernier.

Liu n'était pas le seul à s'efforcer de moderniser cette industrie. Le gouvernement local prévoit de développer un parc industriel national consacré à la musique, une « Music Valley » chinoise, en vue d'attirer les talents et les investissements. Le projet a été inscrit au programme du 12ème Plan quinquennal (2011-15) pour le développement de l'industrie culturelle et créative.

« Ce parc sera un centre de production dans le domaine de la musique, comprenant la fabrication d'instruments et de produits audio, et permettra d'attirer les talents et les ressources financières nécessaires à l'amélioration de la valeur ajoutée du secteur déjà existant de la fabrication des violons », raconte Zhao Wei.

« Ce centre représentera un nouveau moteur de croissance économique pour le district de Pinggu, où se trouve Donggaocun, dans le but de fournir plus d'opportunités pour les agriculteurs locaux et leur garantir une source de revenu stable », explique Zhang Lixin, directeur adjoint de la Commission de réforme et de développement de Pinggu. À terme 50 000 emplois devraient être créés, pour une valeur de production annuelle estimée entre 30 et 50 milliards de yuans (4,7 à 7,8 milliards de dollars).

Guo accueille avec enthousiasme ce projet de « music valley ». Elle espère continuer à fabriquer des violons toute sa vie et prévoit que l'activité locale se transformera de manière positive dans les années à venir.

 

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