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Publié le 27/02/2012
Patrimoine immatériel : propagation et changement

L'Exposition sur le patrimoine immatériel chinois, qui s'est tenue à Beijing du 5 au 15 février, a présenté plus de 180 techniques traditionnelles, allant du papier découpé à la broderie, en passant par l'industrie du thé, le textile, l'imprimerie et la médecine traditionnelle.

Ma Li

La protection du patrimoine immatériel à caractère productif se définit comme une sorte de méthode capable de changer, dans la pratique de nature productive, le patrimoine immatériel et ses produits culturels par le biais de divers moyens comme la production, la distribution et la vente. Cette méthode est centrée sur le maintien de l'authenticité, de l'intégrité et de la propagation du patrimoine immatériel.

D'après les organisateurs, cette exposition se distingue par sa plus grande envergure, le nombre de catégories couvertes, l'ingéniosité des techniques et la richesse de son contenu.

Papier découpé de Weixian, d'hier à aujourd'hui

Dans le district de Weixian, province du Hebei, le papier découpé remonte à la dynastie des Ming (1368-1644). Cet art folklorique jouit d'une grande réputation tant en Chine qu'à l'étranger en raison de son style particulier. La technique consiste à graver principalement en creux, et auxiliairement en relief, avant de colorier le papier. Les thèmes des découpages sont très variés : personnages, fleurs, herbes, poissons, insectes, oiseaux, animaux, etc. Les artistes représentatifs de ce courant sont Wang Laoshang et Zhou Yongming.

Ces dernières années, cet art traditionnel connaît un nouvel essor grâce au renforcement de la protection.

Zhou Shouying est maître du découpage.  L'UNESCO lui a décerné le titre de « styliste folklorique chinoise ». Elle est la fille cadette de Zhou Yongming, élève du maître Wang Laoshang. Ses œuvres ont remporté de multiples prix lors des concours et expositions en Chine et à l'étranger. Elle donne des représentations dans plusieurs pays comme la France, le Luxembourg, la Belgique, et est très appréciée, notamment pour son ingéniosité. Pal mal de ses créations font partie des collections du Palais des Beaux-Arts de Chine, de l'Institut central des Beaux-Arts, et de certaines personnalités chinoises et étrangères.

« Ce que représente un découpage doit bien être choisi. Par exemple, le motif de bon augure signifie chasser les démons et les mauvais esprits ; le bébé, la calebasse, le lotus symbolisent l'abondance des enfants et du bonheur ; les volailles et les bestiaux sont très appréciés des fermiers. L'art du découpage est un art folklorique qui varie d'une région à l'autre. Par exemple, le courant de la province du Shaanxi est simple et libre ; celui de Weixian du Hebei et de Guangling du Shanxi, très coloré ; celui de Nanjing du Jiangsu, aussi épuré qu'extraordinaire ; celui de Yixing, soigné et magnifique ; celui de Nantong, joli et exquis ; celui de Foshan du Guangdong, riche en couleur et plein d'astuce ; celui de Gaomi du Shandong, raffiné et méticuleux », a dit Zhou Shuying.

Cet artisanat, c'est toute sa vie : « Auparavant, je n'avais pas assez d'argent, mais je tenais à apprendre et à créer sans cesse. Parfois, pour participer à une exposition, je payais tout de ma poche : frais de voyage, location de stand, nourriture et eau ».

Sa persévérance est aujourd'hui récompensée. Ces dernières années, grâce au soutien du gouvernement et des autorités locales, le papier découpé de Weixian est devenu un emblème de la région.

« Faire rayonner la quintessence de la culture traditionnelle de la nation et promouvoir l'industrie d'innovation culturelle est un mot d'ordre avancé lors de la septième session plénière du Comité central issu du XVIIe Congrès du Parti communiste chinois. Tous les artistes de découpage y trouvent leur compte. De mon côté, je pense que le papier découpé de mon district occupe une place très importante dans ce milieu », a exprimé Zhou.

Ces dernières années, l'utilisation massive des ordinateurs permet à des artistes de concevoir le motif, de le découper à l'aide de machine et de produire en gros. Face à cette situation, Zhou est mitigée : « Ce que la machine passe seulement quelques minutes à faire nécessite plusieurs années voire même une dizaine d'années de travail humain. Mais le papier découpé artisanal est plus raffiné, plus vivant et possède une couleur plus jolie. C'est quelque chose que la machine n'arrivera jamais à réaliser. Il nous faut faire savoir au public que la technique traditionnelle, vectrice de la culture, ne peut être remplacée par la technique informatique et mécanique, car elle est un trésor vivant de la nation chinoise ».

Pour mieux développer l'art du découpage local, Zhou et ses sept frères et sœurs ont fondé un musée dédié au parcours de la vielle technique folklorique depuis la dynastie des Ming jusqu'à aujourd'hui. Parmi ses 80 adeptes, deux ont le titre de styliste conféré par l'UNESCO et huit ont remporté le titre de maître de découpage au niveau national.

Pendant la Fête du printemps en 2012, Zhou a été invité à exposer l'une de ses œuvres « neuf dragons » dans une émission spéciale de CCTV. Par la suite, un entrepreneur l'a acheté pour 1 million de yuans. Zhou a exprimé son souhait d'en faire don, et d'ouvrir une école de découpage.

Broderie de Suzhou : transmission et innovation

Partie d'une œuvre de broderie de Suzhou

A Suzhou, la tradition populaire veut qu´une fillette commence, à l´âge de six ou sept ans, à apprendre la broderie sous l'œil bienveillant de sa mère. Au fil des générations, l'art de la broderie de Suzhou s´est caractérisé par sa finesse et son élégance.

Trois autres genres de broderies sont célèbres en Chine : celle du Hunan, celle du Sichuan et celle du Guangdong. Pour la broderie de Suzhou, dont l'histoire remonte à deux millénaires, les brodeuses sont connues pour leurs nombreuses créations.

Huang Chunya, 58 ans, est maître styliste supérieur à l'échelon de chercheur. Elle a consacré de longues années à travailler sur la technologie traditionnelle et à introduire dans ses broderies le style des beaux-arts occidentaux, afin d'adapter la broderie de Suzhou au changement de l'époque et de créer son propre style.

« Le ciel bleu asphyxie le champ de blé. L'air semble se solidifier. Un groupe de corbeaux qui volent en bas, un horizon ondulé et des coups de pinceaux déchaînés. Tout révèle un sentiment de répression, de résistance et d'anxiété », a ainsi expliqué Huang à propos de son ouvrage qui imite le chef d'œuvre de Van Gogh « Champ de blé aux corbeaux ». Selon elle, à la vue du tableau de l'Hollandais dans une exposition tenue aux Etats-Unis, elle avait l'impression d'être ensorcelée par quelque chose d'inexplicable à laquelle elle était prédestinée. De son retour en Chine, elle s'est décidée à représenter la peinture du maître dans une broderie. Désormais, elle ne se limite plus aux thèmes traditionnels, et s'intéresse à l'art moderne.

« Bien que la broderie de Suzhou soit une sorte d'artisanat traditionnel chinois, elle se devra d'avoir de nouvelles représentations, de nouveaux thèmes et de nouvelles idées pour connaître un vrai développement. Depuis des années, nous avons invité pas mal de professeurs de l'Institut central des Beaux-Arts pour nous expliquer l'usage de couleurs, la conception, les courants artistiques chinois et étrangers, ainsi que les rapports logiques entre les différentes choses représentées », a dit Huang. D'après elle, depuis ces dernières années, la broderie de Suzhou a atteint un niveau résolument plus élevé dans divers domaines, allant des formes de représentation au contenu, en passant par la technologie.

Mais la maîtrise de cet artisanat traditionnel nécessite la sérénité. Face à diverses tentations à l'heure actuelle, beaucoup de gens ne veulent plus se livrer à ce métier « ascétique », ce qui n'est pas favorable à la succession et à l'innovation de l'art ancestral.

« Il y a deux ans, nous avions vraiment du mal à joindre les deux bouts sur le plan de la succession. Les gens performants comme nous sont tous âgés. Pour bien former nos successeurs, nous essayons de faire entrer le meilleur dans leur tête en peu de temps. Nous avons fondé une équipe de formation qui adapte l'enseignement aux capacités des apprenants, afin de les pousser à faire des progrès plus rapides », a dit Huang. Les efforts inlassables des professionnels ont enfin réussi à rajeunir ce patrimoine immatériel antique. Bien sûr, l'Etat et les autorités locales y ont aussi apporté leur part de contribution.

« La broderie de Suzhou est un vecteur culturel deux fois millénaire. Elle excelle à assimiler les qualités d'autres courants et à les intérioriser tout en conservant son propre style. Le développement de l'art nécessite la communication, le croisement et les échanges interculturels ».

 

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