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Publié le 09/01/2012
L’ère post-Kim Jong-il

Dans cette nouvelle période qui s'ouvre, la Chine espère maintenir l'amitié sino-nord-coréenne ainsi que la stabilité à long terme dans la péninsule coréenne.

Shi Yongming

(L'auteur est chercheur associé à l'Institut chinois d'Etudes internationales)

Kim Jong-un (au centre) visite une centrale hydroélectrique début novembre 2010.

La mort de Kim Jong-il, dirigeant de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), a été le dernier grand événement de l'année 2011. A l'annonce de son décès, les dirigeants du monde entier se sont concertés pour étudier les conséquences de cet événement. La République de Corée (RDC) a placé son armée en état d'alerte alors que le Japon a ordonné une vigilance accrue de ses gardes-côtes. Le président américain Barack Obama est resté en contact étroit avec ses homologues sud-coréens et japonais, tout en exprimant sa préoccupation au sujet de la RPDC.

Dans cette période critique, tout le monde s'interroge sur l'avenir de la RPDC. Certains ont même exprimé des doutes sur la capacité du jeune héritier de Kim Jong-il, son troisième fils Kim Jong-un, qui approche la trentaine, à sortir la RPDC de ses difficultés actuelles. Ces mêmes voix sont curieuses de savoir comment cette transition en RPDC va influencer la situation régionale.

Priorité à la stabilité

« Stabilité » demeure le maître-mot au sujet de la mort de Kim. Le monde espère assister à une transition en douceur, et souhaite que la RPDC puisse jouer un rôle actif dans la promotion de la stabilité régionale.

De même, la Chine souhaite sincèrement que tout se fasse dans la stabilité. Après l'annonce du décès de Kim Jong-il le 19 décembre, soit deux jours après sa mort, le Comité central du Parti communiste chinois a immédiatement envoyé un message de condoléances à la RPDC. Le lendemain, le président Hu Jintao et les dirigeants chinois se sont rendus à l'ambassade de Corée du Nord à Beijing pour présenter leurs condoléances.

Ces actes ont permis de transmettre deux messages à la RPDC : les condoléances chinoises, et le fait que la Chine s'en tiendra à sa stratégie de consolidation et de développement de l'amitié traditionnelle et de la coopération entre les deux pays.

L'Histoire prouve que la coopération amicale entre la Chine et la RPDC est d'une importance particulière pour maintenir la paix et la stabilité dans la Péninsule coréenne. Par conséquent, la Chine a exprimé ses vœux pour une transition réussie du pouvoir en RPDC, et à long terme la stabilité dans la péninsule.

La politique intérieure de la RPDC a permis un transfert de pouvoir stable. En effet, si la mort de Kim Jong-il est survenue subitement, de son vivant, le haut dirigeant avait fait des arrangements minutieux concernant sa succession. Nous n'assisterons pas à une vacance du pouvoir. Le processus de succession sera naturel, lisse et régulier, car en dépit du jeune âge de Kim Jong-un, le groupe de dirigeants est expérimenté et mature. Parallèlement, les nouveaux dirigeants doivent ajuster les relations intérieures, et construire l'avenir dans un environnement intérieur stable. Ainsi, la stabilité sera la priorité de la RPDC dans les mois à venir.

Le développement d'abord

Avec le processus de succession, le nouveau gouvernement sera davantage confronté à d'importants défis économiques plutôt que politiques. Le nouveau leader devra également accorder une attention particulière aux problèmes des moyens de subsistance provoqués par les difficultés économiques depuis la guerre froide, afin de garantir la stabilité politique dans le pays.

Pendant la guerre froide, de la fin des années 1940 au début des années 1990, l'économie nord-coréenne fonctionnait, car elle a bénéficié de l'appui d'autres pays socialistes. Mais après la désintégration du bloc communiste en 1991, la RPDC a perdu son soutien extérieur, et a été exclue du processus de réconciliation en Asie du Nord, à cause de raisons complexes internes et externes. En conséquence, son ouverture économique du début des années 1990 a échoué. Kim Il-sung, fondateur de la RPDC, est décédé en 1994. Dans les années qui suivirent, la RPDC a été frappée par des catastrophes naturelles dévastatrices, qui ont réduit les récoltes. Cette malchance a fait chuter l'économie nationale, et a placé le pays dans une situation difficile.

A cette époque-là, certains pays estimaient que la nouvelle administration, dirigée par Kim Jong-il, serait incapable de redresser la RPDC, et s'attendaient à des changements au sein du pays. Tout ceci a provoqué une grande inquiétude de la RPDC quant à la sécurité de son environnement externe. Par conséquent, la politique Songun (tout-militaire) a commencé à dominer toutes les décisions de Pyongyang. La reprise économique et le développement ont ainsi été limités, puisque la majorité des ressources ont été allouées à la défense nationale.

Le leader de troisième génération jouit aujourd'hui d'un meilleur environnement interne comme externe, comparé à l'époque de la prise du pouvoir par Kim Jong-il. Tout d'abord, en raison des progrès rapides dans la défense nationale de l'époque du Songun, la confiance du pays dans sa sécurité s'est renforcée. Deuxièmement, les conditions économiques se sont améliorées au cours des dernières années. Troisièmement, l'émergence de l'économie chinoise offre un meilleur soutien extérieur à la Corée du nord.

Pyongyang a désormais besoin d'un plan de développement clair. La RPDC peut s'inspirer des expériences de la Chine, du Viet Nam, de la Birmanie ainsi que d'autres pays en développement en Asie du Sud, en Amérique latine et en Afrique.

Le rêve de la RPDC, « Un pays plus prospère et puissant » à horizon 2012 est évidemment irréaliste. Mais si le nouveau dirigeant peut sortir de l'ancien modèle, il pourra conduire son pays vers le développement économique.

Environnement extérieur

Pays situé au cœur des rebondissements géopolitiques, la RPDC subit bien évidemment les influences de l'environnement externe sur son développement politique et économique.

Pyongyang s'est trouvé piégée dans un dilemme sécuritaire, car elle a essayé d'éviter les dommages causés par la nouvelle structure des relations internationales après la fin de la Guerre froide. La question nucléaire a été la principale cause de ce dilemme.

La RPDC a élaboré un plan de développement à grande échelle de l'énergie nucléaire dans le milieu des années 1980, lorsque ses conditions économiques étaient assez bonnes. Elle a participé au Traité de non-prolifération nucléaire, mais n'a pas signé les accords de sécurité nécessaires, ce qui a déclenché des conflits entre Pyongyang et Washington sur la question nucléaire.

Les relations entre Corée du Nord et Corée du Sud se sont améliorées au début des années 1990. Les deux pays ont signé l'Accord sur la réconciliation, la non-agression, la coopération et les échanges à Séoul en 1991, et la Déclaration conjointe sur la dénucléarisation de la péninsule coréenne en 1992. Cette tendance n'a pas été acceptée par Washington, qui traversait à l'époque une mauvaise passe en Asie.

Les Etats-Unis ont été contraints de se retirer d'une base militaire aux Philippines, et ont ressenti la pression du régionalisme et du pacifisme au Japon et en Corée du Sud. Par conséquent, Washington ne pouvait tolérer la possibilité de laisser le Sud et le Nord organiser seuls l'avenir de la péninsule. Et la question nucléaire de la RPDC est devenue le meilleur levier de Washington pour contrôler les événements dans la péninsule.

Les affrontements entre Pyongyang et Washington se sont intensifiés sur la question nucléaire, ce qui a compliqué le problème. En 2005, les pourparlers à six visant à résoudre le problème se sont terminés par une déclaration conjointe le 19 septembre, dans laquelle les parties - Corée du Nord, Corée du Sud, Etats-Unis, Chine, Russie et Japon - ont convenu de régler le problème grâce à des solutions pacifiques.

Quelques mois plus tard, la RPDC a néanmoins effectué son premier essai nucléaire, affirmant qu'il s'agissait d'une réponse à la politique américaine de George W. Bush, qui tentait d'étouffer la RPDC. Cet acte de Pyongyang a eu des conséquences négatives : la propagande américaine de diabolisation de la RPDC sur la question nucléaire s'est intensifiée, et les conservateurs ont pris le pouvoir en Corée du Sud.

La détérioration des relations Pyongyang-Séoul a entraîné une série d'événements. En mai 2009, Pyongyang annonçait avoir mené avec succès un second essai nucléaire souterrain. En mars 2010, le navire de guerre sud-coréen Cheonan a explosé et coulé, faisant 46 victimes. Estimant Pyongyang responsable de cette attaque, Séoul a répondu en lançant un blocus économique contre la RPDC ainsi qu'une série d'exercices militaires de grande envergure. Le 23 novembre 2010, les troupes d'artillerie sud-coréennes ont effectué des manœuvres militaires annuelles près de la Ligne limite nord, une frontière maritime contestée entre les deux pays. Estimant que ses protestations n'avaient pas été entendues, la RPDC a réagi de manière excessive et a ouvert le feu sur l'île voisine de Yeonpyeong, tuant deux civils sud-coréens. L'environnement extérieur de la Corée du nord s'est considérablement dégradé.

Heureusement, Pyongyang a commencé à montrer une attitude positive concernant la reprise des pourparlers à six cette année. Selon le calendrier précédent, la troisième réunion entre Pyongyang et Washington devait se tenir le 22 décembre. La RPDC aurait exprimé une position active sur l'acceptation des mesures préliminaires de dénucléarisation, et un consensus pourrait même être trouvé avec Washington sur l'acceptation d'enquêtes de l'Agence internationale de l'énergie atomique.

La réunion a dû être reportée en raison de la mort de Kim Jong-il. Mais il est prévu que les pourparlers américano-RPDC connaissent un bel avenir, car les deux pays sont aujourd'hui face à une opportunité historique. S'ils ne la saisissent pas, ils la perdront à jamais.

 

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