Cinq gaullistes attachés à la Chine et au sort de son peuple |
Shen Xiaoquan Maître de recherches au Centre d'étude de l'agence Xinhua sur les problèmes mondiaux La France est le premier pays de l'Occident à établir des relations diplomatiques avec la Chine nouvelle au niveau d'ambassadeur, en 1964. C'est avec une vive émotion que nous apprécions la sympathie des partisans du général de Gaulle pour la Chine et leurs efforts pour cultiver l'amitié entre nos peuples et nations, et pour promouvoir la compréhension de la Chine. Nous notons en particulier cinq gaullistes qui ont contribué de manière remarquable au maintien de la position amicale du général de Gaulle envers la Chine, au développement des relations sino-françaises et à la compréhension entre les deux peuples. André Malraux : un écrivain louant les communistes chinois André Malraux est né le 30 novembre 1901 à Paris. Après la fin de ses études secondaires, il est entré à l'Institut national des langues et civilisations orientales. En 1923, il s'est rendu en Extrême-Orient et s'est livré à des travaux archéologiques en Thaïlande, au Cambodge et au Laos. Il a alors établi des liens avec des révolutionnaires vietnamiens, chinois et soviétiques, et a participé à la publication du « Journal de l'Indochine ». Il a séjourné à Guangzhou de 1925 à 1927. Après la défaite de l'insurrection déclenchée dans cette ville de Chine méridionale et la rupture du Parti communiste et du Guomindang (Kuomintang), il a quitté Guangzhou pour revenir à Paris où il rédigeait des œuvres littéraires. En 1933, il a publié en extraits dans la Nouvelle revue française « La Condition humaine », un roman basé sur ses expériences à Guangzhou. Ce roman relate la vie de plusieurs activistes d'extraction, de nationalité et de vues différentes, durant un mois de 1927, lors de la troisième insurrection armée à Shanghai et le massacre des communistes chinois par Jiang Jieshi (Chiang Kai-shek), pour étudier le thème important de la condition humaine. L'auteur décrit les conflits et les luttes entre le Guomindang (Kuomintang) et le PCC et glorifie l'héroïsme des communistes chinois qui ont combattu au mépris de la mort. Ce roman prestigieux a obtenu le Prix Goncourt et est considéré comme « une œuvre classique du XXe siècle ». André Malraux s'est ainsi rangé parmi les grands écrivains français. La Condition humaine a suscité l'intérêt des Français pour la Chine, ce lointain pays d'Extrême-Orient, ainsi qu'une plus grande sympathie pour le sort des Chinois. Certains commentateurs ont écrit que sans ce roman, l'attention et la sympathie des Français et des autres Occidentaux pour les Chinois n'auraient su être si vives au XXe siècle. Après la libération française, André Malraux s'est toujours tenu aux côtés du général de Gaulle, et était l'un de ses principaux assistants. Il a travaillé au gouvernement de la Ve République comme ministre de l'Information, ministre d'État et ministre de la Culture. Trente ans après son départ de Guangzhou, il est revenu en Chine durant l'été 1965 en qualité de ministre d'État chargé des affaires culturelles. Cette visite officielle a été la première visite effectuée par un ministre du gouvernement français en Chine. Le 3 août, le président Mao Zedong l'a reçu au Grand Palais du peuple. Ce geste témoigne de l'estime accordée par le gouvernement chinois à un ami français de longue date. En célébrant le 20e anniversaire du décès d'André Malraux, en novembre 1996, le Quai d'Orsay a publié un document rendant public l'entretien entre le président Mao Zedong et lui. M. Hervé de Charrette, alors ministre français des Affaires étrangères, a déclaré que les notes de cet entretien avaient été sélectionnées parmi les archives secrètes du ministère, parce qu'il s'agit de la première entrevue d'un membre du gouvernement français avec le dirigeant chinois après la reconnaissance de la Chine populaire par la France. Ces notes rendues publiques nous permettent de savoir que le président Mao Zedong, accompagné par le président Liu Shaoqi et le ministre des Affaires étrangères Chen Yi, a procédé à un long échange de vues avec André Malraux sur l'histoire de la révolution chinoise, la situation internationale, et la révolution et l'édification socialistes en Chine. Ce document a publié aussi des extraits des Antimémoires, œuvre publiée plus tard par André Malraux, concernant ses souvenirs et ses commentaires relatifs à cette entrevue. Après la fin de l'entrevue, a écrit André Malraux, je l'ai fixé du regard, parce que Mao Zedong est la plus grande figure capable d'ébranler l'Histoire après Lénine. Mao était prêt à transformer la Chine et il a réussi. Les forces européennes qui perdurent depuis trois cents ans commencent à disparaître et on assiste au début de l'ère chinoise… Alain Peyrefitte : six visites d'étude en Chine Alain Peyrefitte, né le 26 août 1925 à Najac dans l'Aveyron, a commencé ses études supérieures à l'Institut de littérature et du droit de Montpellier, puis à l'Ecole normale supérieure de Paris et l'Ecole nationale d'administration. Le jeune Peyrefitte possédait un talent de diplomate. Dans les années 1960-70, il a été député gaulliste à l'Assemblée nationale et a assumé, sous la présidence de Charles de Gaulle, de Georges Pompidou et de Giscard d'Estaing, les fonctions de ministre de l'Éducation nationale, de l'Information, de la Culture, de la Justice et des Fonctions publiques. Il a présidé, à l'Assemblée nationale, la Commission des Affaires culturelles et sociales, et le comité des amitiés franco-chinoises. On ne peut pas contourner son essai Quand la Chine s'éveillera…le monde tremblera pour évoquer ses liens étroits avec la Chine. Quand il conduisait une délégation d'enquête d'hôpitaux français en Chine, en juillet et août 1971, la première délégation occidentale officielle autorisée à visiter le pays, Alain Peyrefitte a été reçu avec les honneurs du gouvernement chinois. Le premier ministre Zhou Enlai a rencontré trois fois la délégation et a eu une entrevue amicale avec M. Peyrefitte. Ces conversations lui ont permis d'appréhender la grandeur d'âme de cet homme politique chinois et de raffermir sa confiance en la politique d'amitié traditionnelle du général de Gaulle envers la Chine. Au cours d'une réunion organisée à la mémoire du Premier ministre chinois, M. Peyrefitte s'est rappelé les trois entrevues qu'il avait eues avec lui en 1971. Il s'est déclaré fortement impressionné de prime abord par les pas alertes et le visage rayonnant de sagesse du septuagénaire. Le chef du gouvernement chinois a loué le président de Gaulle pour son initiative d'établir des relations diplomatiques avec la Chine. La Chine, a-t-il dit, admire la politique étrangère indépendante du général de Gaulle dont la disparition a été si subite qu'il n'a pas pu visiter le pays, à notre vif regret. M. Zhou a également parlé de son séjour « travail-études » à Paris, et des impressions indélébiles laissées par l'hospitalité des Français, leur attitude d'égal à égal et leur amitié envers les immigrés. M. Peyrefitte s'est également souvenu de la question qu'il avait posée à son hôte chinois, avant son départ de Beijing : « J'ai entendu dire que vous travailliez dix-huit heures par jour. N'êtes-vous pas fatigué ? » Au lieu d'évoquer sa situation personnelle, le premier ministre chinois, connu pour sa modestie et sa prudence, a répondu que « l'ensemble du peuple chinois travaille inlassablement ». Cette enquête a mené Alain Peyrefitte dans dix-huit provinces. Il a ainsi pu connaître la situation globale à la base et avoir une vue relativement objective du travail et des conditions de vie des Chinois. Il a publié en 1973 son premier ouvrage concernant la Chine, Quand la Chine s'éveillera…le monde tremblera, comme le résultat de cette enquête. Il y a présenté la révolution et l'édification menées par les communistes chinois représentés par Mao Zedong et les succès de la Chine nouvelle dans les domaines politique, économique, culturel, éducationnel, scientifique, technologique et diplomatique. Au sujet du titre, il a révélé que lorsque ses troupes expéditionnaires avançaient jusqu'à Moscou, Napoléon Bonaparte a entendu un conseiller lui proposer de s'emparer de la Chine en même temps. Napoléon a prononcé une phrase célèbre : « Quand la Chine s'éveillera, le monde tremblera. » Ce propos signifie qu'aux yeux des Français, la Chine est un lion endormi, qu'il ne faut absolument pas réveiller. Alain Peyrefitte a utilisé cette phrase, présageant l'émergence prochaine du pays. Les résultats de la réforme et de l'ouverture de la Chine ont corroboré sa prédiction. Ce livre a éveillé l'intérêt des Français pour l'ancien empire oriental et a obtenu un succès considérable : il s'est vendu à 1,8 million d'exemplaires. Ainsi, Alain Peyrefitte a gagné une position d'autorité sur questions chinoises. En 1996, il a publié La Chine s'est éveillée. Vingt ans séparent la parution de ces deux livres qui ont suscité un écho réciproque, et le public les a appréciés comme des guides de connaissance sur le pays. En réalité, M Peyrefitte s'est intéressé à la Chine dès les années 1950. Quand il travaillait au consul général de France à Cracovie, en Pologne, le hasard a voulu qu'il tombât sur une collection de notes de voyages et d'aventures conservée par le ministre des Affaires étrangères du tsar Alexandre 1er. Il s'est intéressé tout particulièrement au « Voyage dans l'intérieur de la Chine et en Tartarie, avec la mission de Lord Macartney ». Fasciné par la réception du Lord par l'empereur Qianlong au Palais d'été de Chengde, Alain Peyrefitte a eu l'idée de présenter au public occidental la société chinoise traditionnelle, par une étude comparée des deux civilisations. Mu par cette volonté, il a visité six fois la Chine pour effectuer des enquêtes sur place. Il s'est promené sur les principales digues parcourues par la mission de Macartney et a recueilli 120 000 pages de matériaux originaux. Il est entré dans la Cité interdite de Beijing pour lire les documents relatifs à la réception de l'envoyé diplomatique d'Angleterre par la cour des Qing. Après plusieurs années d'études, il a publié en mai 1989 un récit historique, l'Empire immobile ou le choc des mondes. Il s'est rendu encore une fois à Chengde en 1993 pour assister au séminaire sur le bicentenaire de l'arrivée des émissaires anglais en Chine. Du voyage de Macartney, il a conclu que si la Chine, l'inventeur de la boussole, du papier, de la poudre et de l'imprimerie, et l'Europe, qui a découvert l'électricité et inventé le moteur à vapeur, avaient pu communiquer et coopérer, la civilisation mondiale aurait progressé plus vite. En novembre 2002, lors du 3e anniversaire de son décès, un buste en bronze d'Alain Peyrefitte en robe de membre de l'Académie française a été érigé sur le campus de l'Université de Wuhan, au Hubei. Le peuple chinois a ainsi rendu hommage à cet ami français et souhaité que l'amitié entre les deux peuples ne cesse de se consolider et de se développer. Jacques Chirac, admirateur de la civilisation chinoise
Le public chinois se sent d'autant plus proche de M. Chirac, ancien président français, par rapport aux autres hommes politiques contemporains, qu'il manifeste un intérêt profond pour la Chine, pour son peuple et sa civilisation. Jacques Chirac est un homme politique très cultivé et prestigieux qui a obtenu l'admiration de ses compatriotes pour son amour des arts asiatiques, dont les arts chinois. Sur la rive droite de la Seine se dresse un édifice blanc majestueux, l'Hôtel de Ville de Paris. M. Chirac y a travaillé comme maire avant son élection à la présidence en mai 1995. Dans son bureau spacieux, les porcelaines et les autres antiquités de style oriental, posées sur son bureau, sur la table à thé et sur les rebords des fenêtres, captent les regards. La décoration montre que le maître du bureau est un conservateur et un connaisseur raffinés des objets d'art orientaux. On dit qu'au cours du banquet offert en 1989 à l'Hôtel de Ville en l'honneur du Premier ministre de Singapour Lee Kuan Yew, le maire de Paris a discuté de l'art chinois avec ses invités. Son érudition au sujet de la culture et de l'histoire de l'Orient les a étonnés. Interviewé par un correspondant chinois, M. Chirac a évoqué son intérêt profond pour les arts asiatiques. Il a dit que le musée Guimet, à Paris, était le lieu qu'il fréquentait dans sa jeunesse. Le conservateur du musée a confirmé qu'il venait souvent au musée et qu'il adorait les objets d'art anciens de Chine. A Paris, tout le monde sait qu'il se passionne pour l'histoire et la culture chinoises. En participant à une conférence internationale, M. Chirac écoutait silencieusement des dirigeants d'autres pays prononcer leur discours, et soudain, il s'est mis à écrire sur un bout de papier qu'il a ensuite passé à un assistant assis à ses côtés. Celui-ci a vu qu'il s'agissait d'un tableau chronologique des dynasties chinoises. Le président lui a dit de le vérifier immédiatement. La frise ne contenait aucune erreur. Une exposition des découvertes archéologiques de Chine a eu lieu à Paris en décembre 2000. M. Chirac a visité cette manifestation grandiose qu'il a qualifiée de « chef-d'œuvre des échanges culturels franco-chinois ». Devant les guerriers et chevaux en terre cuite déterrés du mausolée du premier empereur de la dynastie Qin, il a dit à son accompagnateur chinois : « J'ai eu l'honneur d'être l'un des premiers étrangers à visiter cette merveille. C'était en 1978, l'année précédant l'ouverture du musée de l'armée souterraine des Qin. J'y suis retourné plusieurs fois, dont une fois en compagnie de Deng Xiaoping ». Quand Han Wei, directeur de l'Institut d'archéologie de la province du Shaanxi, effectuait une visite à Paris, M. Chirac l'a reçu à l'Elysée. Au cours de leur conversation, le président français s'est renseigné sur les progrès des fouilles des tombeaux Han dans la banlieue nord de Xi'an. Il lui a posé des questions professionnelles comme « Pourquoi la fouille du tombeau du premier empereur des Qin n'est-elle pas faisable maintenant ? Y-a-il la muraille sous le tombeau ? Où se trouvent le mausolée de l'ouest de Fengxiang et celui de l'est de Zhiyang ? » L'étendue de ses connaissances relatives à la culture et à l'histoire chinoises a surpris Han Wei. Plusieurs années après, Han a pris sa retraite mais garde un souvenir vif de sa rencontre avec le président français : « J'admire beaucoup sa personnalité et sa compréhension profonde de la civilisation orientale ». L'intérêt profond de M. Chirac pour l'histoire et la civilisation chinoises est inséparable de sa hauteur de vue propre à un homme politique attaché aux relations stratégiques franco-chinoises. En son temps, le général de Gaulle a pris la décision historique d'établir avec la République populaire de Chine des relations diplomatiques au niveau d'ambassadeur. Cela était un coup de tonnerre dans la guerre froide entre l'Est et l'Ouest. En tant que continuateur du gaullisme, Jacques Chirac a toujours attaché une grande importance au développement des relations amicales entre la France et la Chine. Il a maintenu de bonnes relations personnelles avec les dirigeants chinois. Dans les années 1970, il a reçu à Paris Deng Xiaoping, alors vice-premier ministre chinois, en sa qualité de chef du gouvernement français. Il a exprimé à plusieurs reprises sa profonde amitié pour Mao Zedong, Zhou Enlai et Deng Xiaoping. Quand l'ambassadeur de Chine en France lui a offert un album de photos de Deng, dont une image des deux personnalités côte à côte, il l'a accepté avec émotion. En accueillant une délégation chinoise en 1988, il a déclaré que la Chine avançait sur la voie de modernisation sous la direction de Deng Xiaoping et marchait vers l'avenir avec une sagesse et une détermination incomparables. Il a évoqué le repas qu'il avait pris à l'invitation de Deng, en goûtant des plats préparés selon des spécialités du Sichuan. Il a dit non sans émotion qu'il était honoré d'avoir un ami distingué comme Deng Xiaoping. En automne 2004, le président Chirac a effectué sa troisième visite officielle en Chine, au cours de laquelle il est allé pour la première fois au Sichuan, la région natale de Deng. Avant son départ, il a dit : « Le Sichuan est d'une signification exceptionnelle pour moi, parce que je sais que M. Deng Xiaoping est originaire de cette province et que cette année est le centenaire de sa naissance…J'ai toujours voulu visiter le pays natal de M. Deng sans pourtant pouvoir y aller lors de mes précédentes visites. Cette fois-ci, je peux enfin exaucer mon vœu ». En mentionnant le Sichuan, M. Chirac a naturellement pensé aux grands poètes de la dynastie Tang, Li Bai et Du Fu. « Li Bai était peut-être natif du Sichuan et Du Fu a séjourné à Chengdu. On ne peut pas ne pas se sentir ému en évoquant la chaumière de Du Fu ». Au cours de sa visite à Chengdu, le président français a déclaré qu' « il y a deux mille ans, les habitants intelligents de cette contrée avaient déjà trouvé le moyen de dompter l'inondation. Les découvertes archéologiques dans la région prouvent qu'il y a là une civilisation aussi belle que celle des plaines centrales ». Il a enfin cité Li Bai : « Accéder au Sichuan est aussi difficile que monter au ciel ». Cette citation nous rappelle un fait de 1999. Cet automne-là, le président Jiang Zemin s'est rendu en visite officielle en France. Quand il est arrivé à Paris, son hôte français a organisé exceptionnellement une cérémonie d'accueil solennelle sur la place des Invalides, au centre de Paris. Accompagné par son homologue, Jiang Zemin est allé à l'hôtel sous l'escorte de la garde d'honneur républicaine formée de 180 cavaliers. Cette cérémonie a suscité immédiatement l'attention de l'opinion publique. M. Chirac en a donné l'explication en citant Du Fu : « Le sentier fleuri n'a pas été balayé ; La porte en bois, pour vous, est ouverte. » C'est probablement mû par cette amitié profonde que la France et la Chine ont décidé d'organiser les Années croisées. En 2003, l'Année de la Chine a eu lieu en France et l'année suivante, l'Année de la France en Chine. Les échanges culturels de cette ampleur sont très rares dans l'histoire des échanges culturels internationaux, que ce soit sur la durée des activités, l'étendue des domaines abordés ou le nombre de participants. M. Chirac a commenté ces activités en ces termes : « Les Années croisées ne manqueront pas d'exercer une influence tous azimuts qui permettra aux relations franco-chinoises de longue date d'accéder à un nouveau palier, de resserrer les liens entre les peuples des deux pays et de faire progresser leur partenariat dans tous les domaines ». De son côté, Hu Jintao a déclaré que les Années croisées Chine-France constituaient un grand événement dans l'histoire des échanges sino-français et revêtaient une grande importance pour renforcer la compréhension mutuelle des peuples chinois et français et promouvoir les échanges et l'inspiration réciproque entre les civilisations orientale et occidentale. De telles activités ne manqueraient pas de nourrir un souvenir doux et durable chez les Chinois et les Français. Aujourd'hui, Jacques Chirac est à la retraite, mais son amitié chaleureuse pour la Chine n'a pas du tout reculé. En avril 2009, lors de son retour en Chine, le président Hu Jintao a eu une chaleureuse entrevue avec lui à Diaoyutai, la résidence des hôtes d'Etat, à Beijing. Le président chinois a déclaré que M. Chirac est un ami de longue date du peuple chinois qui force notre respect. Qu'il soit un président en exercice ou à la retraite, il se consacre aux amitiés sino-françaises et apporte une contribution remarquable à la compréhension et à l'amitié entre nos deux peuples et au développement des relations entre nos deux pays. Le peuple chinois ne l'oubliera jamais. Edouard Balladur : l'ouverture d'un nouveau chapitre des relations franco-chinoises Quand le Parti socialiste était au pouvoir, au début des années 1990, une grave crise a éclaté entre Beijing et Paris à propos de la vente d'armes à Taiwan par la France. En août 1991, le gouvernement français a décidé de vendre à Taiwan six frégates La Fayette, et en novembre, 60 Mirages 2000-5, malgré la ferme opposition du gouvernement chinois. La partie chinoise a donc usé de représailles en fermant le consulat de France à Guangzhou, en suspendant les travaux du métro de Guangzhou, de la 2e phase de la centrale nucléaire de Daya Bay, et les négociations sur l'achat du blé français, en contrôlant rigoureusement la circulation de personnes au niveau supérieur à celui de vice-ministre et en boycottant quatre entreprises françaises impliquées dans l'affaire. Les rapports sino-français ont traversé la plus grave crise depuis l'établissement de leurs relations diplomatiques en 1964. Il a fallu un peu plus d'un an pour que cette crise connaisse un tournant. En mars 1993, le Rassemblement pour la République (RPR) a gagné les élections législatives. Il a ainsi obtenu l'occasion de constituer le gouvernement et d'entamer la deuxième « cohabitation » avec un président de gauche. Cette fois-ci, Jacques Chirac a recommandé Edouard Balladur au poste de premier ministre, et lui-même se préparait à l'élection présidentielle qui devait avoir lieu deux ans plus tard. Le changement du gouvernement a fourni aux deux pays une chance de sortir de la crise. Quatre mois après son entrée en fonctions, M. Balladur a décidé d'envoyer un émissaire spécial à Beijing, dans une tentative de trouver des solutions au problème. Il a jeté son dévolu sur Jacques Friedmann, PDG de l'Union des Assurances de Paris et partisan du RPR. Quand M. Balladur était ministre des Finances, il était son conseiller économique et sous son mandat de Premier ministre, il est devenu l'un des artisans de la politique économique du nouveau cabinet. Cet homme de confiance a effectué deux visites secrètes en Chine, en juillet et décembre 1993, et les deux parties ont finalement consenti à publier un communiqué conjoint sur la normalisation des relations bilatérales et annonçé la visite officielle du Premier ministre français en Chine. Le 12 janvier 1994, Beijing et Paris ont publié en même temps le « Communiqué conjoint de la République populaire de Chine et de la République française », annonçant le rétablissement de leurs relations d'amitié et de coopération traditionnelles. La partie française s'est engagée à ne plus vendre d'armes de guerre à Taiwan. Une nouvelle page a ainsi pu être tournée. En avril 1994, M. Balladur a effectué une visite officielle en Chine. Il faut souligner que cette visite représentait alors un certain risque politique, parce qu'un courant antichinois battait son plein sur le plan international, y compris en France. La Chine était la cible d'attaques sur la question des droits de l'homme. Par conséquent, certains médias ont reproché au Premier ministre français de ne pas critiquer publiquement la Chine comme le faisait Washington, et étaient d'avis que la France avait fait trop de concessions envers la Chine et avait été humiliée. A ces reproches, M. Balladur a répondu que sur la question des droits de l'homme, il n'avait aucune raison d'agir comme d'autres puissances. Ces pays veulent toujours donner des leçons à autrui, sans agir effectivement dans ce sens chez eux. Ces propos montrent que la France veut aplanir les divergences sur la question des droits de l'homme par le dialogue et non par la confrontation. C'est justement ce qu'a préconisé la Chine en cette matière. C'est pourquoi la visite de M. Balladur a obtenu des résultats positifs. Elle a balayé les obstacles au développement des relations bilatérales et a jeté la base de leur essor ultérieur. Cinq mois plus tard, en septembre, le président chinois Jiang Zemin a effectué une visite d'Etat en France, qui a tourné un nouveau chapitre dans le développement des relations sino-françaises. Jean-Pierre Raffarin, le « chef des pompiers » Les relations sino-françaises ont connu de graves revers en 2008. D'abord la perturbation du parcours de la Flamme olympique à Paris, puis la menace du président français de boycotter la cérémonie d'ouverture à Beijing au nom de la question du Tibet, et enfin la réception du dalaï-lama à Paris, au mépris de la ferme opposition chinoise. Ce comportement déraisonnable a fortement indigné le peuple chinois et l'hostilité est montée subitement entre les deux parties. Les relations bilatérales ont connu à une période de gel. Au cours de cette crise, une haute personnalité française s'est rendue quatre fois en Chine pour chercher à réconcilier les deux gouvernements et trouver un moyen de surmonter les difficultés et de balayer les obstacles. Elle a obtenu le surnom de « chef des pompiers ». Elle a pu finalement exaucer ses vœux et voir les deux gouvernements normaliser leurs relations. Cette personnalité est M. Jean-Pierre Raffarin, qui était Premier ministre sous la présidence de Jacques Chirac. Déjà dans les années 1970, le jeune Raffarin était attiré par le lointain pays d'Orient. En voyage d'étudiant à Hong Kong en 1971, il a contemplé avec curiosité le continent chinois au télescope. Il n'oubliera pas ce vaste pays mystérieux. En 1976, il a profité d'un programme d'échange franco-chinois pour se rendre dans la partie continentale de Chine. Il a passé un mois à la parcourir en train, de Guangzhou au sud à Harbin au nord. C'était une année très difficile pour la Chine, a-t-il dit plus tard. Cette année-là, les dirigeants chinois Zhou Enlai, Zhu De et Mao Zedong sont décédés, et un grave séisme s'est produit à Tangshan. J'ai eu l'impression de passer une période exceptionnelle avec les Chinois, a dit M. Raffarin. Après trente ans de contacts avec la Chine et ses habitants, Raffarin a écrit un livre sur la Chine, en collaboration avec son épouse, sous le titre Ce que la Chine nous a appris. « Ce n'est ni un livre politique, ni un livre académique. C'est plutôt un livre du cœur. Nous souhaitons dire à nos amis chinois comment nous voyons la Chine et ce que nous avons appris d'elle », explique-t-il. C'est en 2003 que les Chinois ont connu Raffarin. En avril, il a effectué une visite officielle, en sa qualité de premier ministre français. Il était le premier dirigeant occidental à Beijing depuis l'éclatement de la crise du Sras. « Le médecin m'a conseillé de reporter ma visite », a-t-il dit plus tard. « Mais je pensais que mes amis chinois en difficulté avaient besoin de soutien. Je devais donc y aller, sans masque, car je voulais utiliser ma visite pour montrer ma confiance en la victoire des Chinois et ne pas donner l'impression que j'avais peur du Sras ». Cette visite lui a permis d'établir de bonnes relations personnelles avec son homologue chinois Wen Jiabao. Après avoir quitté son poste de premier ministre, il est souvent revenu en Chine, et a toujours reçu un accueil chaleureux de Wen Jiabao. Aux yeux de Raffarin, le Premier ministre chinois est un administrateur capable et judicieux. En 2008 et 2009, les relations sino-françaises ont connu de sérieuses difficultés. M. Raffarin s'est déplace à quatre reprises entre Paris et Beijing pour aplanir les différends et trouver des solutions. Au printemps 2008, suite à la perturbation du parcours de la flamme olympique à Paris et de l'hommage rendu par la mairie de Paris au dalaï-lama en nommant citoyen d'honneur, les relations bilatérales virent à l'hostilité. Le 24 avril, l'ancien premier ministre français est arrivé en Chine, porteur d'une lettre du président Sarkozy à son homologue chinois, en sa qualité d'envoyé spécial. Lors de l'interview qu'il a accordée à la presse, il a déclaré que des chocs sentimentaux survenus entre les citoyens des deux pays et une série de déplaisirs avaient éveillé la vigilance des dirigeants et que les deux parties cherchaient à faire sortir les relations bilatérales de leur situation difficile. En évoquant les raisons occasionnant ces chocs, il a déclaré sans ambages que le maire de Paris avait commis une très grave erreur politique. Quant aux déplaisirs produits lors du parcours de la flamme olympique à Paris, il a décrit les agissements de ces saboteurs comme une « fanfaronnade ». Il a dit que bien qu'ils soient dans le pays natal de Pierre de Coubertin, ces gens-là n'honoraient pas l'esprit des Jeux olympiques et avaient déçu la plupart des Français. En août 2008, M. Raffarin est arrivé une nouvelle fois à Beijing dans le but d'accompagner le président Sarkozy à la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques. Ce résultat l'a beaucoup satisfait. Suite à la réception du dalaï-lama par le président français en décembre 2008, les relations sino-françaises ont connu une nouvelle crise. M. Raffarin est parti deux fois pour la Chine, en février et avril 2009, pour essayer de réparer les relations bilatérales. Le 8 février, il est arrivé à Beijing, à la tête d'une délégation parlementaire. Il était la première personnalité française de haut rang venue en Chine après cette crise. Le Premier ministre chinois a eu une entrevue avec lui, au cours de laquelle il a demandé à la partie française de prendre des actions concrètes et de répondre positivement et directement aux préoccupations de la partie chinoise concernant une question touchant à ses intérêts fondamentaux. M. Raffarin a répondu que la partie française était consciente de la sensibilité et de la grave conséquence d'un tel problème. L'opinion publique était d'avis qu'il était encore une fois l'envoyé spécial de Sarkozy pour réparer la situation. Au début du mois d'avril, il est revenu pour conduire une délégation participant au séminaire économique annuel Chine-France. Cette fois-ci, la délégation française comprenait les chefs de la quasi-totalité des entreprises françaises de renom ayant d'étroites relations de coopération avec la Chine. De toute évidence, la froideur des relations bilatérales a beaucoup inquiété le milieu industriel français. La tenue du séminaire a contribué positivement à relancer les échanges économiques et commerciaux entre les deux pays. Grâce à leurs efforts conjugués, les deux gouvernements sont parvenus en avril 2009 à une unanimité de vues sur la restauration des relations bilatérales. Le 1er avril, les deux parties ont publié le communiqué de presse sino-français, dans lequel la France « récuse tout soutien à l'indépendance du Tibet sous quelque forme que ce soit ». Le même jour, Hu Jintao et Nicolas Sarkozy ont eu une entrevue à Londres. Ces faits montrent que les relations bilatérales ont tourné une nouvelle page, et que la coopération sino-française connaîtra désormais un vigoureux développement dans les domaines économique et commercial. Durant cette période peu commune, on a toujours vu la silhouette de M. Raffarin, ami du peuple chinois qui s'est employé à assurer le développement sain des relations franco-chinoises. Il a ainsi gagné le respect unanime des Chinois.
Source: french.china.org.cn
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