St. John's University à Shanghai : lumière et vérité |
Yang Binbin Difficile de dresser une liste exhaustive des prestigieuses universités de Shanghai : Fudan est connu pour le journalisme, Tongji doit sa réputation à l'architecture, l'Ecole normale supérieure de la Chine de l'Est est célèbre grâce à la langue chinoise, et l'Université des Finances et de l'Economie de Shanghai a pour atout majeur l'économie, etc... Et cette répartition des rôles n'est pas le fruit du hasard : tout commence avec la St. John's University.
Au total, quatorze universités anglicanes ont été établies avant la fondation de la Chine nouvelle en 1949. L'université St. John's, issue de la fusion entre deux universités anglicanes préexistante, a été fondé en 1879 sous le nom de « St. John's College » par S. J. Sekoresehewsky, évêque à Shanghai. Le 1er septembre 1879, l'école accueillit ses 39 premiers étudiants, et l'enseignement était effectué principalement en langue chinoise. En 1892, le cursus fut officiellement ouvert, et l'anglais devint une discipline majeure. En 1905, St. John's College fut rebaptisé St. John's University, puis enregistré officiellement à Washington DC. Elle reçut ainsi le statut d'université américaine. Les diplômés de St. John's pouvaient donc s'inscrire en troisième cycle aux Etats-Unis. Par conséquent, l'université attira certains des étudiants les plus intelligents et les plus riches de Shanghai. Elle fut le premier établissement de Chine à décerner le diplôme de bachelor, à partir de 1907. En 1936, l'université commença à admettre des étudiantes. Elle devint l'une des meilleures universités pluridisciplinaires de Shanghai et du pays, avec cinq instituts et seize facultés. Pourtant, ce n'est qu'en 1947 qu'elle fut officiellement enregistrée auprès des autorités compétentes du gouvernement du Guomindang.
St. John's fut le théâtre de deux événements historiques. Suite à l'éclatement du « Mouvement du 30 mai » en 1925, grèves générales et manifestations contre l'impérialisme occidental et les seigneurs de la guerre (dénoncés comme agents de l'Occident), certains enseignants et étudiants en colère quittèrent St. John's pour fonder une nouvelle université : Guanghua. Second fait marquant, après l'incident du Pont Marco Polo en 1937, l'Université chrétienne de Shanghai vit le jour, parallèlement à la fusion de St. John's avec trois autres universités chinoises. Impossible de parler de St. John's sans dire un mot de F. L. Hawks Pott. Né en 1864, cet Américain diplômé en théologie à l'Université de Columbia aux Etats-Unis se rendit en Chine comme pasteur, avant d'enseigner l'anglais à St. John's à partir de 1881. Nommé président de cette école en 1886, il ne quitta plus ce poste durant 52 ans et apporta une contribution considérable au développement de St. John's. Ses mérites et succès pour l'université sont de trois ordres : primo, il fit tout son possible pour réunir des fonds pour agrandir l'école ; secundo, il préconisa l'enseignement en anglais à l'université ; tertio, il adopta une attitude stricte dans la gestion, allant de la propreté du campus au respect de la discipline, en passant par la frugalité. En un mot, ce pédagogue joua un rôle de taille dans les échanges entre l'Orient et l'Occident. De plus, le sentiment qu'il nourrissait à l'égard de la Chine est émouvant : « Ici, c'est ma maison. Je vais y rester toute ma vie, jusqu'à ma mort », disait-il, jusqu'à son décès, le 7 mars 1947, à Shanghai. Au cours de ses 73 ans d'existence, St. John's forma près d'une dizaine de milliers d'étudiants, dont pas mal de personnages éminents, comme Gu Weijun (diplomate), Lin Yutang (écrivain), Jing Shuping (banquier), I.M. Pei (architecte), Dong Dingshan (écrivain). Baptisé « berceau des industriels et des diplomates », l'université exerça une certaine influence sur la modernisation de la société chinoise. En décembre 1950, St. John's se déclara officiellement détachée de l'Eglise épiscopale américaine. De 1949 à 1952, les disciplines et facultés de St. John's University furent respectivement incorporées à d'autres universités de Shanghai : le journalisme à l'Université Fudan, l'architecture à l'Université Tongji et l'économie à l'Institut de finance et d'économie de Shanghai (actuelle Université de finance et d'économie de Shanghai)… La Faculté de médecine fut annexée à l'Ecole médicale N°2 de Shanghai, et maintenant à l'Université des Communications de Shanghai. Le campus devint l'emplacement de l'Université des Sciences politiques et juridiques de la Chine de l'Est. Aujourd'hui, 131 ans se sont écoulés, et St. Johns continue d'exister à travers ses anciens étudiants, qui déploient leurs talents dans divers milieux. Le parcours de l'université devient un thème de recherche pour les spécialistes. Dans les années 1920, St. Johns a introduit la pédagogie occidentale, exerçant ainsi une influence profonde sur la société chinoise. Aujourd'hui, face à la globalisation de l'éducation, le modèle et le concept de St. John's servent d'exemple pour le futur développement pédagogique. Ce qui donne matière à penser, c'est sa devise, en anglais « Light and Truth », et en chinois « Etudier sans réfléchir est vain, méditer sans étudier est désolant » (proverbe de Confucius). Beijing Information
|