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Publié le 07/07/2010
Quand on partait vers Pékin… à bicyclette !

Jin Duoyou & Guillaume Brandel

Le 22 juin au matin, un jeune français est arrivé sur son vélo chargé au Centre culturel français de Beijing pour répondre aux questions de Beijing Information. L'instant d'après, il reprenait la route, avec comme destination Ulaan Chab, à environ 350 km de la capitale.

Cet homme s'appelle Franck Wallet, 26 ans, diplômé de l'Université de Technologie de Compiègne, passionné de musique et de… voyages. L'appel des grands larges l'a déjà mené en Australie, en Amérique Latine et au Népal, lui ayant permis de frotter et limer sa cervelle contre celle d'autrui, comme l'écrivait Montaigne.

En septembre 2008, tandis que ses camarades fraîchement diplômés se lançaient à l'assaut du marché de l'emploi, Franck, lui, enfourchait son vélo à la conquête du monde.

Premier coup de pédale

« C'est un rêve d'enfant. J'ai toujours su qu'à la fin de mes études, j'allais partir pour un grand voyage. Je me suis dit : Je vais à Beijing. Mais je n'avais même pas décidé de l'itinéraire ! », raconte Franck.

Avant de partir, il n'a fait que très peu de préparatifs : un nouveau vélo, du matériel, des nouvelles chaussures, des habits chauds et des petits équipements.

A l'origine, Franck imaginait traverser la planète en auto-stop. « L'idée du vélo est venue très très tard, peut être un mois ou deux avant le départ. Avant, je pensais partir en stop. Mais parfois, il faut attendre quatre heures avant qu'une voiture s'arrête. Finalement, j'ai préféré prendre le vélo, avec lequel tout ne tient qu'à moi-même, je ne dépends pas des autres. Si je veux avancer, j'avance », explique cet avaleur de kilomètres.

Le 25 octobre 2008, Franck est parti du parvis de Notre-Dame afin de rallier Beijing à vélo, sans visa, sans itinéraire établi… Un voyage magique et merveilleux commençait.

Pas d'avion ni d'hôtel !

Après avoir parcouru environ 30 000 km à la seule force de ses mollets, Franck a traversé la France, l'Italie, la Slovénie, la Croatie, la Serbie, la Bosnie, le Monténégro, l'Albanie, la Grèce, la Turquie, l'Iran, les Emirats Arabes Unis, Oman, l'Inde, le Népal, Singapour, la Malaisie, la Thailande, le Laos, le Vietnam, puis la Chine, arrivant enfin à Beijing le 30 mai 2010.

Au cours de son périple, Franck n'a pris l'avion que deux fois. « Je n'avais pas envie de prendre l'avion, j'avais décidé de faire tout à vélo ». Mais ce désir s'est brisé sur la frontière birmane. « Je voulais, depuis le Népal, entrer en Birmanie pour ensuite arriver en Chine. » La frontière fermée, il a dû rebrousser chemin vers l'Inde puis prendre l'avion pour Singapour. « Là, j'ai tout essayé, mais je ne pouvais pas passer ni par le Tibet, ni par la Birmanie. Au final, j'ai pris l'avion, mais c'était un mal pour un bien. J'étais triste de prendre l'avion, mais il m'a amené à Singapour, ce que je n'avais pas prévu. Et du coup, grâce à ça, j'ai visité Singapour, la Malaisie et le sud de la Thailande. Finalement j'ai vu plein de pays grâce à ça. Dans ce sens, c'est une bonne chose », explique-t-il.

La seconde contrainte que s'était fixée Franck, hormis l'avion, était de ne jamais habiter à l'hôtel. « Je veux rencontrer un maximum de gens, c'est plus intéressant que d'aller tout seul à l'hôtel. Quand je vais au restaurant le soir, il y a des gens qui viennent me voir, qui me posent des questions. Ils me demandent où je vais dormir, je réponds que je ne sais pas. Et parfois, ils m'invitent. Sinon, lorsque je ne rencontre personne, je plante ma tente. J'ai habité chez des gens au moins la moitié de mon voyage. »

La solitude, une peur infondée

Avant son départ, Franck ne craignait qu'une chose : la solitude. « J'en avais peur, mais en fait, je ne l'ai jamais ressentie », a-t-il exprimé.

« Quand j'arrive dans une ville, je vais dans un restaurant ou un café, je rencontre des gens. Donc le soir, je ne suis jamais tout seul ». A chaque fois qu'il entrait dans un nouveau pays, Franck apprenait un minimum de vocabulaire, ce qui facilitait les rencontres.

Et s'il était seul en selle toute la journée, Franck appréciait ces moments. « J'aime beaucoup ça : je regarde les paysages, j'écoute de la musique, je réfléchis à plein de choses. La solitude, je ne la ressens pas. Cette peur est infondée. »

Le monde et ses merveilles

Pendant ce voyage d'environ deux ans, Franck a visité plusieurs dizaines de pays inconnus. Dans chaque nouvel endroit, il ouvre grands ses yeux, et regarde, tout simplement. « Quand je vois des différences avec mon pays, je les note ; j'écris beaucoup. L'idée que je me faisais de certains pays a évolué. Je ne les connaissais pas, donc dans ma tête, c'était très imaginaire. Mais maintenant, je peux donner une image concrète : je me suis fait une nouvelle idée de tous les pays que j'ai traversés. »

Difficile pour Franck de dire quel pays il a préféré. Cependant, notre cycliste long-courrier garde un profond souvenir de l'Iran et de l'Inde. « On dit beaucoup de mal de l'Iran à la télé, dans les journaux… Mais dans la réalité, j'aime beaucoup les Iraniens, ils sont très hospitaliers, très gentils, très accueillants. Ce n'est pas un pays dangereux, j'y ai vu des merveilles ». Comme les Iraniens, les Indiens sont également d'excellents hôtes. « Une fois, je lisais un livre dans un restaurant. Soudain, quarante personnes sont arrivées pour voir ce que je faisais. Ils voulaient toucher le livre, essayer de lire, prendre des photos avec moi », se souvient Franck, amusé.

Mais l'Inde, c'est l'enfer de la petite reine. « Les routes sont défoncées, il y a beaucoup de camions. Et ils klaxonnaient dès qu'ils me dépassaient ; des klaxons beaucoup plus forts qu'en Chine ou en France », nous raconte Franck en se bouchant les oreilles. « En Inde, les villes sont bruyantes, poussièreuses, c'est très difficile de faire du vélo. J'aime bien d'un côté, car c'est vivant, on ne s'ennuie jamais. Mais en même temps, c'est fatiguant, ça prend beaucoup d'énergie ». Mais ces petits désagréments ne sont que détails aux yeux de ce voyageur infatigable.

En Chine, un échange gagnant-gagnant

Franck ne manque pas d'anecdotes, autant d'aventures humaines qu'il ne se lasse pas de raconter. A l'approche de Shaoguan, au nord du Guangdong, son vélo se décomposait littéralement : « Ma chaîne avait cassé la nuit, mes vitesses ne passaient plus et j'étais dans les montagnes, sous la pluie ». Arrivé en ville au matin, il se met en quête d'un réparateur. « Dans la rue, toutes les boutiques étaient ouvertes, sauf celle de vélo ! Je suis allé visiter la ville, voir le marché, puis, quand je suis revenu sur le coup de midi, le réparateur était enfin ouvert. »

« Le marchand ne parlait pas anglais. Je lui montre la chaîne, le dérailleur, il comprend qu'il faut les changer. On s'assied, on prend le thé, mais il ne se passe rien. Il passe des coups de téléphone. En fait, au bout d'une demi-heure, une voiture arrive, avec un caméraman et un journaliste à son bord, puis un autre journaliste. C'est à ce moment qu'il s'est mis à réparer mon vélo, car il voulait le faire devant les caméras. C'était une grande surprise. C'était une bonne publicité pour lui, et il m'a offert la réparation. »

Et la surprise ne s'arrête pas là : « Ce jour-là, il pleuvait. Mais lui, et quatre de ses amis m'ont accompagné sur 10 km en vélo. C'était très touchant d'être escorté par les Chinois, c'est un très bon souvenir », raconte Franck. « Quand je suis dans les pires situations, il finit toujours par arriver ce genre de choses. Donc, à chaque fois, la galère est un très bon souvenir », conclut cet optimiste de nature.

Et demain ? Beijing, peut-être…

Beijing, destination initiale de son périple, n'en constitue plus qu'une étape aujourd'hui : Franck remonte en selle vers la Mongolie, puis il compte bien prendre le transsibérien pour rallier l'Europe. Néanmoins, son séjour de trois mois en Chine l'aura profondément enchanté. Quand on parle de son avenir, Franck révèle qu'il a eu un entretien pour un poste à Beijing, au Centre culturel français. Malheureusement, son visa expirant dans trois jours, il ne peut attendre la réponse. « Il y a de grandes chances pour que je revienne en Chine. Même si cette proposition de boulot est tombée à l'eau, je reviendrai bientôt », assure-t-il enfourchant son vélo.

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