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Publié le 05/07/2010
Projet de maglev à Beijing : la colère des riverains

Pour dissiper les inquiétudes des habitants vivant le long du parcours envisagé, les autorités devraient avancer des preuves scientifiques irréfutables.

Lan Xinzhen

La municipalité de Beijing se prépare à la construction d'une ligne de train à sustentation magnétique reliant la zone urbaine et la banlieue de l'Ouest de la ville.

Cette ligne appelée S1, qui adopte la technique de sustentation magnétique à basse et moyenne vitesse, est intégralement le fruit de recherches chinoises. Le S1, piloté soit automatiquement soit manuellement, pourrait atteindre les 150 km/heure.

Par rapport au métro, dont le coût de construction est de 600 à 800 millions de yuans/km, le maglev chinois ne coûte que 400 millions de yuans le kilomètre. De plus, il est plus à l'aise dans les virages, n'ayant besoin que de 75 m dans les virages, voire 25 m lors des essais (contre au moins 300 m pour le métro standard). Ces caractéristiques lui permettent de se faufiler aisément en zone urbaine. Enfin, le train à sustentation magnétique représente une excellente alternative dans les régions où les tunnels sont difficiles à creuser.

Tous ces avantages ont motivé l'utilisation de cette technologie pour la construction de la ligne de S1. Cependant, cette décision s'est heurtée à la résistance des riverains.

L'opposition des riverains

La Beijing Infrastructure Investment construira la ligne, tandis que le Centre d'ingénierie et d'évaluation environnementale (CIEE) de l'Académie chinoise des sciences des chemins de fer (ASCF) se chargera de l'évaluation de l'impact du projet sur l'environnement. Le 6 mai, l'ASCF a publié un rapport d'évaluation environnementale sur son site internet, invitant les citoyens à se prononcer.

La ligne S1 sera construite à proximité de deux quartiers résidentiels, « Maison de la Chine » et « Biguili », où habitent au total plusieurs dizaines de milliers de personnes, dont certaines à 30 m du futur tracé. Zhao Lei, propriétaire d'un appartement à « Maison de la Chine », s'inquiète des conséquences du maglev sur la santé des riverains.

Les habitants des zones concernées ont déjà adressé une lettre de protestation à l'ASCF, à la Beijing Infrastructure Investment et au gouvernement municipal de Beijing. Parallèlement, la colère des internautes gronde sur la toile.

La première phrase de la lettre de protestation résume parfaitement leur position : « Nous, riverains de la future ligne à sustentation magnétique - une grave menace pour la santé et l'environnement – nous opposons fermement à la construction de S1. »

Les opposants à la construction de la ligne maglev avancent quatre arguments. Tout d'abord, la crainte du rayonnement magnétique. La sécurité de la technologie maglev n'a pas encore été prouvée pour une application à grande échelle, les données statistiques n'étant pas suffisantes pour évaluer une éventuelle pollution liée aux radiations électromagnétiques, et les méfaits associés.

Le deuxième point concerne la distance entre la ligne et les zones résidentielles. Selon les normes ferroviaires allemandes, la distance minimum de sécurité est de 300 m. Et d'après les recherches de l'Académie des Sciences de Chine (ASC), il est interdit de construire à moins de 100 m des rails.

La pollution sonore est également avancée par les opposants au projet. Beaucoup prétendent que le bruit d'un train à sustentation magnétique est plus dérangeant que celui d'un train standard.

Enfin, les riverains remettent en cause les travaux concluant que les secousses du train ne dérangeront pas leur vie. D'après eux, les essais, basés sur des statistiques provenant d'expériences menées dans un environnement sans véhicules, sans résidents ou usines, n'ont aucune valeur.

« La sécurité est garantie »

Beijing Enterprises Holdings Maglev Technology Development fournira la technologie maglev pour la construction de la ligne S1. La recherche et le développement de cette technologie ont été soutenus par la Commission municipale des sciences, avec un financement public de 40 millions de yuans (5,86 millions de dollars).

En 2008, cette société a construit une ligne expérimentale de 1,547 km à Tangshan, dans la province du Hebei, et y ont fait rouler un train. L'expérience a été couronnée de succès.

Le 5 mars, le train a été expertisé; et il a passé avec succès les tests de quatre organismes spécialistes du secteur, dont l'Institut de génie électrique de l'Académie des Sciences de Chine, et le Centre de surveillance de la protection environnementale de Beijing.

L'intensité du rayonnement magnétique du train à sustentation magnétique à faible et moyen débit est inférieure à la norme de sécurité établie par la Commission internationale de protection contre les rayonnements ionisants (International Commission for Non lonizing Radiation Protection), et est égale à celle des trains standards, selon le rapport publié par l'équipe d'experts.

Le rayonnement d'un maglev à faible et moyen débit est suffisamment sûr pour la santé des gens. « Grosso modo, nous vivons déjà dans un environnement électromagnétique », a rappelé Sun Guangsheng, chercheur au Laboratoire de bioélectromagnétique de l'Académie des Sciences de Chine, qui a participé aux essais de la ligne de Tangshan.

« Les lampes fonctionnent généralement à une fréquence de 50 Hz. La fréquence maximum du train est de 90 Hz, et un blindage empêche tout rayonnement électromagnétique. Donc, le train maglev ne nuit pas à la santé de la population », a-t-il conclu.

« Les passagers, eux non plus, n'ont pas besoin de se soucier de la radiation, car le rayonnement du maglev est quasiment équivalent à celui d'un sèche-cheveux ou d'un rasoir électrique », a déclaré Cong Chunshui, ingénieur de la Beijing Enterprises Holdings Maglev Technology Development.

Concernant la seconde préoccupation des riverains, le bruit, Liu Zhiming, président de Beijing Enterprises Holdings Maglev Technology Development, a affirmé qu'il n'était que d'environ 64 dB à 10 m des rails, soit inférieur à celui d'un train léger sur rail (92 dB).

Par ailleurs, la Beijing Infrastructure Investment affirme que la ligne S1 répond aux normes nationales sur le rayonnement électromagnétique, le bruit, et les vibrations.

Mais les riverains, qui n'ont pas encore eu accès aux normes nationales concernées, ne sont toujours pas convaincus.

Faire des concessions

L'enquête d'opinion sur l'impact environnemental de la ligne maglev de S1 devait durer dix jours, mais a été prolongée afin que les riverains expriment davantage leurs points de vue.

Un chercheur de l'ASCF a déclaré que l'équipe d'experts est en train d'étudier les questions soulevées par les riverains, et publierait ses conclusions dans le deuxième rapport. Mais aucun calendrier n'a encore été fixé.

Cependant, les habitants peuvent se réjouir d'une petite victoire : le 12 mai, le CIEE de l'ASCF a affirmé que la longueur de la partie souterraine du projet serait étendue, de 455 m à 2 969 m.

L'extension de la longueur souterraine réduira le nombre de riverains exposés, mais ne met toujours pas à l'abri les quartiers Bisenli et la Maison de la Chine.

Zhao Lei et ses voisins ont décidé de continuer leur combat, en envoyant de nouvelles pétitions aux administrations concernées.

« A l'étranger, la technologie du maglev est toujours en expérimentation. Alors pourquoi la Chine se dépêche de le développer ? », s'interroge M. Zhao.

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